Le musée de la vigne et du vin

Château de Boudry Ambassade du vignoble neuchâtelois, œnothèque et musée

Auberges et cabarets d’autrefois

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Comme nous l’avons à plusieurs reprises affirmé, la vigne a été dans le pays de Neuchâtel durant des siècles une des principales sources de revenus pour les habitants du Littoral. Lorsque les vendanges arrivaient et que les fruits d’un labeur annuel étaient conduits en cave, on savait enfin si l’année à venir s’annonçait sous de bons ou de mauvais auspices. Fallait-il encore que le vin se fasse bien et qu’il ne souffre pas trop des nombreuses maladies dont il pouvait facilement être victime.

Cependant, les critères de qualité n’étaient pas aussi importants qu’aujourd’hui. Comme les habitudes de culture favorisaient les hauts rendements, les raisins obtenus ne possédaient que rarement un équilibre acide-sucre optimal. Ainsi, les vins obtenus à partir de telles vendanges n’étaient que rarement excellents et devaient être rapidement bus. Cet état de fait faisait que les vins nouveaux étaient commercialisés dès décembre.

Trois débouchés s’offraient alors aux producteurs: premièrement, débiter au détail le vin de son cru, deuxièmement écouler les vins en tonneau auprès des aubergistes et cabaretiers, troisièmement, exporter des barriques vers les cantons combourgeois de Berne, Soleure, Fribourg et Lucerne ou vers d’autres régions. Avant le milieu du XIXe siècle, l’usage de la bouteille restait une exception. Seuls les vins de qualité jugés dignes d’être vieillis jouissaient d’un tel conditionnement.

Dans le cas qui nous occupe présentement, nous allons étudier quel rôle les auberges et les cabarets jouèrent dans l’histoire neuchâteloise, en tentant de cerner autour d’une profession, toute une mentalité et un état d’esprit. Cette analyse du monde des établissements publics est basée sur l’étude des règlements et des mandements publiés ainsi que sur les arrêts du Conseil d’État.

De tous temps, le nombre considérable des débits de boissons et leur prolifération ont préoccupé les autorités, les poussant à légiférer, intervenir, interdire afin que la santé morale et le bien-être de la population soient préservés. Entre le plaisir de boire du vin et la chute dans l’ivrognerie, il y a un fossé que de nombreux Neuchâtelois ont franchi aisément.

Le mandement du 27 décembre 1825

Le 27 décembre 1825, un mandement signé du gouverneur Zastrov concernant les cabarets est promulgué. Dans le préambule, il est dit que le nombre excessif des débits de vins et de liqueurs a poussé l’Etat à intervenir.

« Non seulement dans les dernières années surtout, leur nombre s’est multiplié dans une proportion croissante, mais ce genre d’occupation est devenue dans bien des cas comme la dernière et trompeuse ressource des hommes obérés et corrompus que l’appât du gain et leur penchans déréglés incitent également à favoriser le désordre, et qui choisissant de préférence des lieux écartés, loin de l’œil des honnêtes gens et propres à les soustraire à la surveillance de la Police, font de leurs demeures des refuges du vice, et même des lieux de débauche et de scandale. »

Le Gouvernement tient donc à prendre soin de la santé de ses sujets et à combattre tous les maux qui pourraient la corrompre. Il considère que les rixes, tumultes et désordres de toutes espèces ont principalement lieu dans les cabarets et que l’alcoolisme mène au dénuement le plus complet des familles entières. Rongé par l’alcool, un homme ne peut plus travailler et fait alors tomber sa famille à la charge des Communautés et des fonds de charité, qui voient fondre leurs revenus, ayant:

« des familles entières à leur charge, des enfants abandonnés par leurs parents, des pauvres assistés, qui détournent au profit de leurs passions les deniers des aumônes qu’on leur accorde et qui dérobent ainsi la nourriture à leur propre famille, des hommes déclarés prodigues et auxquels on a interdit l’entrée des cabarets, et qui, bravant les défenses, trouvant dans les cabaretiers eux-mêmes des séducteurs et des complices, se montrent publiquement et pour ainsi dire chaque jour dans un état dégoûtant d’ivresse. »

Des mesures radicales doivent donc être prises pour lutter contre cet état de fait, afin qu’une partie de la population ne tombe point à l’assistance. Le tableau dépeint par le Gouvernement est volontairement assombri. Toutefois, l’industrie naissante dans les Montagnes développe un prolétariat. C’est dans les communes du Locle et La Chaux- de-Fonds que les problèmes d’alcoolisme et de proliférations de débits semblent trouver le plus d’échos. En effet, dans la Juridiction de La Chaux-de-Fonds, en plus des cabarets proprement dit,

« on compte (…) soixante cafés; enfin les boutiques d’épicier, de boulanger et de pharmacien sont pour la plupart autant de lieux où ceux qui ont le goût de la boisson peuvent se livrer à leur penchant déréglé. »

Le métier de détaillants de vin et de liqueur est devenu le métier de ceux qui n’en ont pas ou de ceux qui pensent qu’ils vont facilement gagner de l’argent.

« Un ouvrier horloger ne peut-il plus gagner sa vie, il monte un cabaret, achète quelques meubles, prend à crédit chez un marchand en gros, et au bout d’un ou deux ans, il se trouve absolument ruiné et tombe à la charge d’un fonds pieux. »

L’État se sent un rôle moral et doit par conséquent prendre des mesures afin de lutter contre cette situation. Il convient en premier lieu de réduire le nombre des débits et de n’accorder la permission d’exercer l’état de cabaretier qu’à des gens honnêtes, attachés au respect de l’ordre. Si ces mesures semblent en théorie aisées, leurs mises en pratique soulèvent de fortes réactions.

Le mandement du 27 décembre stipule:

  • qu’il est interdit à tous les habitants de l’État de tenir « un cabaret, café, pinte ou bouchon, et de vendre en détail et donner à boire dans un lieu quelconque, du vin ou des liqueurs sans une permission du Conseil d’État ». Les permissions seront personnelles et non réelles, comme pour le droit de schild des auberges.
  •  Que tous ceux qui tiennent à ce jour un débit s’annoncent afin qu’un répertoire soit dressé.
  • Les Officiers de Juridictions adresseront un rapport au Conseil d’État dans lequel ils indiqueront le nombre de cabarets auxquels il faut tendre pour chaque communauté.
  • Tous ceux qui contreviendront aux dispositions seront poursuivis.
  • Cette ordonnance n’est point applicable à la Ville de Neuchâtel en vertu de son droit de police, attesté dans les franchises de 1406. En effet, la Ville de Neuchâtel a sa propre police et ses propres règlements en matière d’auberges et cabarets.

La publication d’un tel mandement répondait à un besoin. Tentons maintenant d’expliquer la prolifération d’un aussi grand nombre de cabaret dans le pays.

L’état général des auberges et cabarets de la Principauté en 1826 nous apprend qu’il a y 566 établissements pour une population de 52223 âmes, soit un établissement pour 92 personnes, soit 123 auberges et 443 cabarets.

À la suite du mandement de 1825, les officiers de Juridiction proposèrent une réduction de 182 établissements. À leur avis, le nombre de 384 auberges et cabarets serait idéal. En 1829, on comptait encore 480 établissements (116 auberges et 364 cabarets), soit une très légère diminution.

En 1825, le problème de la prolifération des cabarets était venu au premier plan suite au rapport détaillé que le maire de La Chaux-de-Fonds, M. Sandoz, avait adressé au Conseil d’État. Lui-même avait pris la décision d’exiger la fermeture des endroits les plus mal famés. Ces fermetures avaient provoqué l’ire des cabaretiers qui voyaient là une attaque à la liberté de commerce et d’industrie garantie aux sujets de l’État et aux bourgeois de Valangin.

Un rapport du 24 juin 1818 consigne l’opinion des Audiences générales sur ce point-là:

« La commission a sincèrement regretté de ne pouvoir proposer la réduction du nombre des cabarets dont la multiplicité est une des principales causes du désordre et de la misère publique. Cette réduction lui a paru blesser jusqu’à un certain point la liberté illimitée de commerce; elle espère toutefois que les corporations les plus jalouses de ce privilège provoqueront elles-mêmes des mesures pour empêcher que la première cause de leur prospérité ne devienne pas celle de leur ruine. »

Les mesures restrictives suggérées par le maire Sandoz pourraient être envisagées comme une réponse à cet appel. Mais de quoi le maire Sandoz se plaint-il? Que propose-t-il? Les abus quels qu’ils soient sont intolérables aux yeux des bons citoyens et il faut s’efforcer de les supprimer bien qu’ils soient conformes au droit et aux franchises. Pour Sandoz, le droit de vendre du vin et des liqueurs, droit compris dans le pays dans la classification de liberté de commerce,

« doit être rangé dans cette catégorie d’abus, et que tout ce qu’il y a de gens honnêtes verrait avec plaisir l’anéantissement d’un privilège pareil. Il n’y a rien de plus immoral et de plus ridicule que de voir, et le cas n’est pas rare, une femme seule chargée d’un débit de liqueurs, demeurant quelquefois dans des lieux écartés, ayant à faire à des ivrognes et des débauchés; comment maintiendra-t- elle l’ordre dans sa maison? Une femme honnête voudrait-elle passer la soirée en pareille compagnie et si c’est une femme dépravée, pourquoi lui confier et lui permettre un vendage de vin: n’est-ce pas autoriser le vice que de protéger des repaires. »

Il est donc normal que la police agisse pour réprimander et faire cesser de telles pratiques. Sandoz nous apprend qu’il faudrait dix-sept gendarmes pour surveiller la Juridiction de La Chaux-de-Fonds, alors qu’il n’y en a qu’un! L’ensemble du pays en compte dix-neuf pour environ cinquante mille habitants.

Celui du Locle vient trois fois par semaine faire une course à La Chaux-de-Fonds. Il est évident que faute de maréchaussée, les contrebandiers font alors ce qu’ils veulent!

S’il y a environ une soixantaine de cafés et cabarets officiellement reconnus à la Chaux- de-Fonds, il faut ajouter tous ceux qui s’ouvrent de manière clandestine. Sous le couvert de vendre simplement du vin sans hébergement comme cela était permis à tous les bourgeois de Valangin depuis les arrêts de 1707 et 1709, on sert à boire, échappant ainsi aux règlements. Les gens qui fréquentent ces pintes clandestines conservent une discrétion totale à leur égard. Personne n’en soupçonnerait l’existence si l’on n’entendait au milieu de la nuit les cris, les injures et le tapage de ceux qui en sortent.

La police ne peut donc rien faire. Toutefois, à La Chaux-de-Fonds, d’après Sandoz, l’ordre semble régner, de manière relative il est vrai.

« Tous les étrangers qui ont demeuré quelques temps ici m’ont témoigné l’étonnement qu’ils éprouvaient en voyant une population aussi nombreuse, d’une classe ouvrière, être aussi tranquille. »

En revanche, dans les environs et sur les frontières:
« Les gens de Franche-Comté, spécialement occupés du commerce de contrebande, attendent dans ces cabarets le retour de la nuit. (…) Ceux du canton de Berne y viennent employer leur argent; ils y trouvent des avantages bien précieux pour eux: l’eau-de-vie à meilleur compte et la mesure plus grande que chez eux. »

Ces abus n’auraient pas lieu si la vente des liqueurs et des vins étaient confiés à des gens « honnêtes », soit des gens qui suivent l’éthique protestante basée sur la morale chrétienne et le travail. En diminuant le nombre de ces lieux de vente, la concurrence diminuerait et ceux qui les tiendraient gagneraient mieux leur vie, ce qui les pousserait peut-être à s’occuper davantage de leur état et à faire respecter l’ordre chez eux.

Il est clair que l’abus de liqueurs et toute autre forme d’alcoolisme est incompatible avec le métier d’horloger. S’il est normal que l’ouvrier, qui a travaillé toute la journée, puisse se détendre quelque peu en s’attablant au cabaret, il faudrait qu’il puisse le faire dans des auberges qui ont bonnes réputations et où l’on trouve une compagnie honnête et tranquille.

« Ne serait-ce pas faire son bonheur que de fermer ces asiles du désordre et de l’inconduite et le forcer de fréquenter des gens de bonne compagnie? Le moyen infaillible de parvenir à ce but est d’empêcher la canaille de recevoir publiquement le monde dans ses habitations. »

Cette vision paternaliste correspond au rôle dont le gouvernement se sentait investi. Pour lui, le bien général des peuples passait avant les libertés individuelles. Sandoz, en sa qualité de notable, est sincère lorsqu’il souhaite faire le bonheur des ouvriers, même au détriment de leurs libertés d’action. Ne répond-il pas à la phrase de l’Evangile: « Père, pardonne-leur parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font. »? Pour arriver à ce but, il convient donc de réduire de deux-tiers le nombre des cabarets existants, de supprimer le droit de vendre librement du vin et des liqueurs et d’augmenter la surveillance.

« Quel plus important service pourrait nous rendre le paternel gouvernement de cet Etat que de s’occuper d’une réforme pareille: combien de familles lui devront le bonheur? »

Ainsi, sans attendre une action gouvernementale, le maire Sandoz prit des mesures et fit fermer deux ou trois des bouchons les plus mal famés. Et malgré les récriminations d’un des débitants, la Bourgeoisie de Valangin ne bougea pas alors que jusque-là, elle avait toujours vigoureusement défendu ses ressortissants menacés d’une limitation de liberté de commerce.

La question est donc la suivante: jusqu’où s’étendait la liberté de commerce en matière de vente de vin et de liqueurs acquise des bourgeois de Valengin?

Dans le pays de Neuchâtel, la liberté de commerce n’était pas illimitée bien qu’elle fut reconnue comme telle en 1707. Elle était soumise à de nombreuses restrictions. Par exemple, le Gouvernement protégeait les droits acquis aux moulins banaux, prohibait la vente des vins étrangers dans le Vignoble, interdisait l’entrée du bétail de France. La liberté de commerce pouvait être restreinte lorsque l’intérêt public l’exigeait.

Vendre du vin et tenir cabaret forment-ils un ou deux métiers? La vente du vin au détail, à l’instar d’autres marchandises, dans une boutique ou servir à boire à des clients attablés, qui peuvent entrer et sortir à leur guise, voire rester toute une journée, sont bien deux états différents. Une distinction entre vendre du vin en gros ou en détail et tenir un lieu public est donc nécessaire. Et, de tous temps, celui qui loge et donne à manger aux passants doit avoir la permission de l’autorité. Si la liberté de commerce emporte le droit de servir à boire, pourquoi n’emporterait-elle pas celui de loger et de donner à manger? Or, il est incontestable que personne ne peut tenir une auberge sans un octroi – le droit de schild – du Conseil d’État. En conséquence, en vertu de quel principe, chaque sujet de l’Etat aurait-il le droit d’établir un cabaret?

C’est à cette question que nous répondrons dans le prochain numéro du Vignolant. ( à suivre)

Patrice Allanfranchini

 

AUBERGES ET CABARETS (suite)

Les Manuels du Conseil d’État contiennent plus d’une centaine d’arrêtés de 1603 à 1809, qui permettent de cerner quelle était la coutume en matière d’auberges et de cabarets.

D’après les arrêtés du 22 novembre 1603, du 6 novembre 1610 et du 12 juin 1719, il est précisé que la vente de vin à pot et à pinte dépend de l’autorité de la Seigneurie. Seuls ceux qui débitent le vin de leur cru, soit les encaveurs, sont librement autorisés à écouler leur produit. L’arrêt du 6 décembre 1603 stipule encore:

« que personne ne débite vin à la maison si ce n’est les hostes ordinaires, qu’il ne soit de son cru, mais seulement par pinte, sans soustenir ni loger personne. »

Que l’on soit communiers, sujets de l’État, justiciers, étrangers, chacun est soumis à cette règle. Le 6 décembre 1614, il est décidé que les justiciers ne pourront plus exercer l’état de tavernier. Cet arrêt contraint le justicier Abram Evard de Chézard à cesser son commerce. Pour tenir un cabaret, il faut donc une autorisation du Conseil d’État.

Chaque sujet de l’État, qui possède des vignes, a le droit de vendre le vin de son cru en gros ou au détail, mais sans bouchon ni enseigne, comme de nombreux arrêts le démontrent.

Donnons l’exemple de Jacques Barbezat de La Côte aux Fées. En 1758, il demande au Conseil d’Etat l’autorisation d’écouler au détail le vin du cru de ses vignes dans son village. Là, les autorités de la Paroisse défendaient à quiconque de vendre du vin. Seuls les deux aubergistes patentés le pouvaient. Comme il semblait s’agir de vin provenant des vignes dudit Barbezat, le Gouverneur donna droit à sa requête, tout en précisant que il ne pouvait en aucun cas accrocher bouchon ni enseigne. Comme les autorités locales contestèrent cet octroi, elles furent autorisées à vérifier que le vin débité par Barbezat provenait bien de ses vignes. Finalement, il fut prouvé que Barbezat ne possédait aucune vigne et qu’il avait utilisé cette astuce pour vendre du vin. Il dut donc cesser ce commerce. Toutefois, si un jour Barbezat pouvait prouver qu’il était bien propriétaire de vignes, il pourrait alors écouler les vins de son cru.

Faire la preuve de l’origine des crus a provoqué bien des aléas et des différents au sein des habitants du Vignoble, qui trouvaient aberrant de devoir faire certifier la provenance de leurs vins. Toutefois, comme de nombreux propriétaires de vignes ne résidaient pas sur le Littoral, il était nécessaire qu’ils puissent attester de la provenance de leurs vins s’ils voulaient les vendre au détail. En ville de Neuchâtel, il était permis de faire entrer de la vendange, mais il était interdit d’y introduire du vin sans autorisation, même si celui-ci venait de vignes possédées hors du territoire de la ville.

Normalement, le nombre de cabaretiers autorisés dans chaque district était établi. Une liste des cabarets était tenue à jour. Toutes les tavernes superflues étaient supprimées. Cependant, de tous temps, le nombre des cabarets a été jugé trop élevé. Par exemple, le 28 février 1604, le Conseil d’Etat se proposa de faire fermer toutes les auberges et tavernes considérées comme des lieux de débauche et d’afficher dans celles qui subsisteraient des listes nominatives des personnes interdites d’auberges. Ces mesures de salubrité firent que le nombre des débits du Val-de-Travers fut réduit à six (le 8 novembre 1630) et à cinq pour La Sagne (le 9 novembre 1630). Aux Geneveys sur Coffrane, le droit fut accordé comme un privilège exclusif à une seule personne (le 9 mars 1637), de même qu’à Savagnier (le 20 mars 1645), avec ordres aux trois autres cabaretiers du village de fermer immédiatement leur taverne.

À La Côte aux Fées, le nombre des cabarets fut finalement réduit à deux, le 12 janvier 1739. On s’était rendu compte qu’il était préférable d’y avoir deux pintes plutôt qu’une, afin de créer une certaine concurrence, bien qu’au départ, la volonté de la Paroisse fût de n’avoir qu’un seul établissement. C’est elle qui amodiait la charge de tavernier.

Aux Bayards, il en fut fait de même le 28 octobre 1754. Il subsista dès lors un cabaret au Petit-Bayard et un autre au Grand-Bayard. Les autres taverniers obtinrent un délai de deux mois pour écouler leurs stocks. L’Etat mandata un lieutenant qui dut choisir quels étaient les deux cabaretiers des Bayards qu’il fallait conserver! Dans ce village, le 1er janvier 1755, défense expresse de vendre vin fut faite et quiconque désobéirait serait recherché et puni.

On s’efforçait d’accorder le droit de vendre du vin qu’à des personnes honnêtes et capables. On attachait donc une grande importance à la réputation des gens qui embrassaient une telle carrière. Des tournées d’inspection étaient organisées par les principaux officiers du pays: le maire de Neuchâtel, le maire et procureur de Valangin, le procureur général, les châtelains de Thielle et du landeron. Les Communautés devaient fournir des attestations de bonnes moeurs. (Arrêts des 8 et 9 novembre 1630 – 12 février 1639 – 8 novembre 1645 – 29 novembre 1652). Toutefois, il semble que ces pratiques devinrent désuètes au XVIIIe siècle.

Ce sont les Communautés elles-mêmes qui demandaient des mesures restrictives. Le 6 novembre 1610, sur la représentation des communes du Val-de-Ruz et des Montagnes, on décida de supprimer les tavernes et cabarets:

« Partout hormis es lieux de passages qu’il sera à propos et requis d’y avoir pour la nécessité des passants et étrangers et pour faire noce tant seulement. »

Le 6 février 1654, les bourgeois de Valangin supplient la Seigneurie de pourvoir au règlement des hôtes comme d’ancienneté. Nous reviendrons plus loin sur les différents règlements en usage pour les aubergistes et cabaretiers.

Le 19 janvier 1675, la communauté de Villiers demanda la suppression des deux cabarets du village, car les jeunes gens s’y adonnent à la débauche et aux vices. Le 6 décembre 1718, comme plusieurs habitants du village s’étaient érigés cabaretiers et vendaient du vin, ce qui amena quelques scandales, la commune de Lignière sollicita l’intervention de la Seigneurie pour que ces pratiques cessassent. Il lui fut répondu que le lieutenant dudit lieu pouvait faire cette défense de sa propre autorité et que:

« ceux qui y vendront vin devront prêter le serment ordinaire que sont obligés de faire les hôtes et les cabaretiers, aussi bien que leurs femmes et enfants qui sont en âge. »

Lignière ne conservait que son auberge de commune, qui avait acquis son droit de schild en 1631.

Ces quelques exemples montrent que, périodiquement, des communautés essayaient de limiter le nombre des cabarets sur leur territoire. Toutefois, ceux-ci réapparaissaient dès que l’attention faiblissait.

Il arrivait fréquemment que le Conseil d’État autorisât des particuliers à tenir taverne pendant une période limitée. Le 12 février 1639, Pierre Galon obtint la permission de vendre du vin pendant une année. Le 6 juillet 1637, il fut accordé à Josué Delachaux de vendre du vin tant que la garde des frontières consécutive à la guerre qui faisait rage en Franche-Comté, durerait, notamment au Dazenet et au passage chez les Gendre. Pendant la guerre de Trente Ans, les Neuchâtelois purent avantageusement écouler leurs vins sur la frontière où les fourriers des armées suédoises venaient se ravitailler.

Le Conseil d’État pouvait aussi autoriser certains particuliers à débiter le vin qu’ils recevaient en paiement, en leur permettant d’ouvrir une pinte temporaire, comme ce fut le cas de Pierre Humbert-Droz, le 30 septembre 1653. La quantité à débiter pouvait aussi être précisée: le 7 février 1654, un débit à pinte de quatre chars fut accordé à Pierre Billon des Brenets.

Tous ceux qui vendaient du vin sans autorisation étaient mis à l’amende ou incarcérés. La peine de prison était aggravée d’une amende de 30 à 50 £, avec menace d’un châtiment exemplaire en cas de récidive.

Le 26 août 1611, le maire du Locle reçut l’ordre de poursuivre tous ceux qui vendraient du vin sans licence de la Seigneurie. Suite à une dénonciation, le sauthier de Valangin, qui avait vendu du vin sans autorisation, fut mis un jour et une nuit à la javiole. En cas de récidive, sa charge lui serait retirée (8 avril 1618).

Le 6 janvier 1619, pour ce délit, Pierre Vesin du Locle fut emprisonné et condamné à payer 30 livres d’amende. Le 14 juillet 1620, Jean Montandon de La Chaux-de-Fonds dut verser 50 livres. Le 28 novembre 1653, David Quartier LaTente, pintier aux Brenets dut purger deux jours de prison pour avoir enfreint le règlement des cabaretiers. En effet, les violations de serment étaient passibles de peine de prison, comme nous le verrons plus loin.

De tous temps, les pintiers devaient jurer d’observer les ordonnances de police en prêtant un serment. Ils s’engageaient à respecter les us et coutumes de cette profession ( arrêts des 8 novembre 1630, 9 mars 1637). Ceux qui ne se conformaient point aux consignes voyaient leur pinte fermée (27 mai 1606). Le 9 mai 1611, il fut interdit à Claude Favre dit Bulle de tenir taverne suite aux excès qui avaient eu lieu dans son établissement. Suite à de nombreuses plaintes, le procureur général du comté de Valangin fut chargé d’inspecter toutes les communes et villages du comté pour vérifier les auberges et cabarets existants possédaient des autorisations et si les hôtes respectaient les règlements en vigueur.

Le 11 avril 1701, le lieutenant de la justice du Val-de-Travers commença une enquête pour savoir si le cabaretier de Môtiers, Abram Divernois, était responsable des troubles qui eurent lieu dans son établissement. Interdit d’exercer sa profession, Divernois engagea une procédure, qui dura deux ans, afin de pouvoir tenir à nouveau son cabaret:

« à la charge qu’il aura soin de faire observer un si bon ordre (…) qu’il n’y ait plus lieu d’en pouvoir faire des plaintes légitimes faute de quoy on luy défendra le vendage de vin pour toujours. »

Ceux qui éludaient la défense de vendre du vin au détail en ayant ni enseigne ni bouchon, n’en étaient pas réputés en contravention. Par exemple, divers particuliers de la châtellenie de Thielle vendaient du vin en détail dans leurs maisons, où ils recevaient du monde à toutes heures. Parce qu’ils n’avaient pas de marque, ils prétendaient se soustraire à l’obligation de prêter le serment des cabaretiers. Le 30 mars 1784, après de longues délibérations, le Conseil d’Etat chargea le châtelain de Thielle d’interdire à tous ceux qui n’avaient pas de marque, de vendre du vin, à moins de solenniser le serment des cabaretiers.

Les mêmes problèmes se retrouvent au Val-de-Travers. Divers cabaretiers se plaignaient que des clients, en quittant leur pinte à l’heure de fermeture, soit dix heures du soir, se rendaient chez des particuliers pour poursuivre leurs libations. Il fut ordonner au maire de Travers de faire notifier à tous ceux qui vendaient du vin au détail une défense de continuer à moins qu’ils ne prêtent le serment de cabaretier au préalable.

La vente du vin était donc très réglementée et il fallait une autorisation du Conseil d’Etat pour exercer la profession de cabaretier.

***

Il est maintenant intéressant d’examiner dans quelles circonstances, les modifications intervenues au XVIIIe siècle portèrent atteinte au droit de haute justice du gouvernement.

C’est en 1719 que, pour la première fois, la Bourgeoisie de Valangin prétendit que ses bourgeois pouvaient vendre du vin sans autorisation.

Cette année-là, le maire du Locle avait signalé que diverses personnes, même des non-communiers, se permettaient de vendre librement du vin et de placer des bouchons devant leurs maisons, où il se commit divers scandales. Après délibération, le Conseil d’État chargea deux de ses membres de chercher dans les manuels du Conseil tout ce qui pourrait concerner le droit et privilège dont se prévalait la Bourgeoisie de Valangin pour autoriser ses bourgeois à vendre librement du vin sans que la Seigneurie ne puisse les empêcher. Le 10 avril 1719, il fut ordonné au maire du Locle:

« de faire défense à tous les cabaretiers qui ne sont pas établis sous l’autorité de la Seigneurie de donner à boire et à manger chez eux pour faire des écots à moins qu’ils n’en obtiennent la permission de la Seigneurie, leur laissant cependant la faculté de vendre vin en pinte. »

Par cet arrêt, on reconnaissait à chacun le droit de vendre du vin par pinte. Cependant, le Conseil d’Etat précisait que personne ne pouvait tenir un lieu public sans la permission de l’autorité.

La Bourgeoisie de Valangin n’accepta pas cet arrêté. Le 1er mai, elle demandait au maire du Locle de surseoir de quinze jours à l’exécution des ordres donnés par le Conseil d’Etat, afin qu’elle pût consulter ses membres. Le 10 juillet, une députation de la Bourgeoisie se présenta devant le gouverneur. Comme celui-ci était absent, elle s’adressa au doyen du Conseil pour lui dire:

« que le Conseil de Bourgeoisie ayant été informé par quelques particuliers de la défense à eux faite de plus vendre vin sans en avoir au préalable obtenu la permission de la Seigneurie, il avoit trouvé que cette défense interessoit les libertés et les franchises des Bourgeois de Valangin, il avoit envoyé des députés pour prier la Seigneurie qu’il fut imposé silence au Sr maire du Locle. »

Malgré l’absence du gouverneur, il fut ordonné au maire du Locle de poursuivre les deux particuliers avaient refusé d’obtempérer.

Les députés de Valangin se rendirent à Montmirail, où séjournait le gouverneur, afin de lui faire part de leurs remontrances.

« Ils le prièrent de vouloir se charger d’une lettre que ledit Conseil de Bourgeoisie vouloit se donner l’honneur d’écrire à Sa Majesté pour l’en informer du droit que les Bourgeois ont de trafiquer en pain, en vin, en sel, etc. »

Le Conseil d’État campa sur ses positions, attendant la copie de la lettre adressée au Roi par la Bourgeoisie. Finalement, celle-ci dut se rendre compte qu’elle n’avait pas le droit de son côté et elle renonça à faire valoir ses prétentions.

En 1784, la Seigneurie interdit à un nommé Elie Robert, bourgeois de Valangin domicilié à Hauterive, qui vendait du vin au détail sans marque de vendage, de poursuivre ses activités sous peine de contraventions. La Bourgeoisie de Valangin émit immédiatement des réclamations, considérant qu’une telle défense était contraire à ses franchises et coutumes, se référant à l’article premier des Articles généraux qu’elle avait reçus en 1707, qui dit:

« Que d’autant plus le commerce est libre et plus un Etat s’enrichit, qu’il y ait un commerce libre pour ceux de Valangin au dehors de l’État, pour toutes sortes de denrées, sans qu’à cet égard il ne se fasse de nouveautés, soit pour le vin étranger, soit pour d’autres denrées que l’on achète et que l’on vend, conformément à leurs franchises et usances. »

Le 5 juillet, le Conseil d’État lui répondit qu’elle donnait à cet article une interprétation qui était contraire à la pratique de cet État. Les bourgeois de Valangin n’ont le droit d’aucune façon d’exercer le commerce du vin en détail en vendant à pot et à pinte dans les districts des communautés, dont ils ne sont pas membres à moins qu’ils n’obtiennent la permission de la Seigneurie. En conséquence, le Conseil ne peut pas lever l’interdiction faite à l’égard d’Elie Robert.

Le 18 octobre, les bourgeois de Valangin exposèrent à nouveau leurs remontrances au Conseil. Celui-ci chargea une commission d’examiner la requête valanginoise. Le 2 novembre, le Conseil la déclara mal fondée et ratifia ses précédentes décisions.

Alors que la Bourgeoisie tentait d’étendre ses prérogatives, le gouvernement abandonnait de son côté certains de ses droits de police qu’il exerçait précédemment.

Premièrement, par les arrêtés des 12 et 19 juin 1719, il cédait aux officiers de juridiction le droit d’autoriser ou non les lieux de vente de vin. Il mettait comme seule restriction que les communiers devaient être préférés tout d’abord aux autres sujets de l’État; les étrangers ne devaient être choisis qu’en dernier ressort.

Ensuite, il parut reconnaître que le droit d’autoriser ou d’interdire les débits de vin appartenait aux communautés elles-mêmes. Dans un arrêt du 12 avril 1762, suite à une plainte des maîtrebourgeois de Valangin consécutive à l’interdiction faite à l’un de leurs ressortissants par la communauté de Saint Blaise de vendre du vin, il est dit:

« que la Communauté de Saint Blaise n’a fait que d’user du droit qu’elle a, de même toutes les autres communautés de l’État, lorsqu’elle fait défense audit Sr Girard, habitant audit lieu, de continuer à débiter du vin en détail. »

Le procureur général Joel Matile, dans un rapport daté du 13 décembre 1825, pense que:

La Bourgeoisie de Valangin l’avait reconnu implicitement malgré ses nombreuses réactions lorsqu’elle tenta d’assimiler la liberté de commerce avec le droit de tenir librement un établissement public.

Matile considère que le droit exercé par les communautés du pays d’autoriser ou d’interdire les débits de vin peut être considéré comme une délégation:

« que le Conseil d’Etat a jugé sans inconvénient de leur faire un certain temps de son droit de police à cet égard, droit qu’il a d’ailleurs toujours maintenu et souvent exercé dans des cas particuliers, et qu’il peut incontestablement retiré entièrement à lui, si le bien de l’Etat lui fait juger nécessaire d’exercer directement cette partie de police. »

Au début du XIXe siècle, la situation est donc la suivante:

  1. le droit de vendre en gros ou en détail le vin de son cru a été et reste acquis à tous les sujets de l’Etat;
  2. que celui de faire commerce, même en détail, de tous les vins, indigènes et étrangers, a été reconnu aux bourgeois de l’ancien comté de Valangin par les Articles généraux de 1707;
  3. qu’une extension de ce droit à tout le pays à l’exception du Vignoble a été reconnue par la déclaration royale de 1814, et réglée par l’ordonnance de 1820;
  4. que personne ne peut donner à boire pour faire écot, c’est-à-dire tenir une auberge ou un cabaret sans une permission expresse de la Seigneurie: ceci sur tout le territoire de l’Eta à l’exception de celui de la ville de Neuchâtel où ces permissions dépendent des Quatre Ministraux en raison de leur droit de police.

En 1825, quels remèdes faut-il prescrire?

C’est en nous fondant sur le rapport de Joel Matile que nous allons essayer de répondre à cette question. Matile ne voit qu’une solution: la réduction du nombre des établissements. Il est clair qu’on ne peut les supprimer tous. Il importe donc de faire un choix et de ne laisser subsister que ceux tenus par des honnêtes gens. Comme la police des cabarets dépend directement du Conseil d’État, celui-ci peut prendre des mesures sans avoir recours aux Audiences générales, puisqu’il s’agit de règles exécutives et non législatives. D’après Matile, il semble qu’il était question d’imposer les cabaretiers comme cela se pratiquait dans un grand nombre d’États et de cantons suisses. Mais une telle mesure serait alors de nature législative et du ressort des Audiences.

À ce propos, Matile dit:

« Quel but le gouvernement se propose? Ce n’est pas se procurer de l’argent, mais d’améliorer les mœurs publiques. Or ce but et le résultat de pareilles impositions sont presque unanimement de se procurer un revenu. Avec un pareil régime, on accorde le droit de tenir un cabaret à ceux qui peuvent et veulent payer et point du tout à ceux qu’on juge plus honnêtes et plus amis de l’ordre; en second lieu, on sait qu’une grande partie des communautés du Pays perçoivent une imposition pareille de non-communiers auxquels elles accordent le droit de vendre vin. L’établir maintenant au profit de l’Etat paraîtrait dépouiller ces communautés et les priver d’une ressource; exiger qu’elles la perçussent pour elles-mêmes de leurs communiers serait inexécutable en pratique. D’ailleurs en troisième lieu, nous voyons tous les jours que les giètes de 2 ou 3 Louis imposés ainsi par les communes à des habitants détournent nullement ceux-ci de vendre vin. Une faible imposition serait donc tout à fait inefficace et une imposition élevée serait inadmissible; car et c’est ici la quatrième considération, toute imposition mise sur un débitant de vin est mise en réalité sur le vin qu’il débite. »

Il faut donc éviter l’escalade des prix en taxant les cabaretiers, qui ne manqueraient pas d’accuser le gouvernement de ce renchérissement. Au Moyen Age, les habitants de ce pays ont payé pour s’affranchir de l’ohmgeld, appelé le mauvais denier. Taxer à nouveau les vins serait donc une mesure impopulaire que les Audiences n’accepteraient jamais. Il faut donc avoir recours à des mesures administratives, qui sont du ressort du gouvernement.

Mais comment opérer cette réduction? Il est clair qu’une réduction de moitié, voire des deux tiers comme certains le souhaitent est impensable. Ceci conduirait certainement deux à trois cents familles à la ruine en leur supprimant leur gagne-pain. Il est certain que cela soulèverait une vague de protestation de la part des corporations et des bourgeoisies.

Finalement, le gouvernement se décida pour l’ordonnance du 27 décembre 1825, dont nous avons déjà parlé. Seul le temps devait opérer cette diminution souhaitée. Aucune nouvelle permission d’exploiter un débit ne serait octroyée avant que l’objectif voulu ne soit atteint. Seuls des gens jugés honnêtes et convenables pourraient en bénéficier.

Cette ordonnance provoqua de fortes réactions de la part des bourgeoisies du Landeron, Valangin et Boudry. Celles-ci considéraient que la liberté de commerce garantie en 1707 devait s’étendre aussi bien à l’établissement de pinte et de cabaret qu’à la vente en détail d’autres denrées et marchandises. Pour elles, il suffisait qu’un de leurs sujets se plie et observe les règlements de police pour qu’il puisse ouvrir un cabaret, et ceci sur l’ensemble du territoire de la principauté.

Elles se rendaient toutefois compte de la nécessité d’une surveillance par l’Etat. Elles pensaient que les buts de la mesure pourraient être atteints en laissant aux communes un certain pouvoir décisionnel, surveillé par les officiers de juridiction. Cela éviterait:

« les frais d’une requête et les graves inconvénients qui peuvent résulter dans certains cas de ce que l’obtention ou le refus d’une permission peut dépendre entièrement de la personne chargée de faire un rapport sur la demande qui est faite. »

En réalité, elles espéraient obtenir les mêmes prérogatives que celles de la ville de Neuchâtel.

Par un arrêt du 25 juin 1827, le Conseil d’État reconnut aux propriétaires de vigne le droit de vendre à pot et à pinte le vin de leur cru, et encore sous des modalités qui en rendait l’exercice moins facile et moins avantageux qu’autrefois. Suite à cette ordonnance, les bourgeoisies supplièrent le Conseil d’État de revenir à l’ancien état de chose.

Il est clair que les bourgeoisies confondaient deux matières totalement différentes l’une de l’autre: à savoir la pleine et entière liberté de commerce garantie aux sujets de l’Etat par les Articles généraux de 1707 et par l’ordonnance royale de 1814, et l’établissement des pintes et cabarets, qui dépendait totalement de la haute police du gouvernement.

Après comme avant 1707, le Conseil d’État avait maintenu ce droit et l’avait exercé dans toutes les régions du pays, en faisant fermer des débits ouverts sans autorisation ou lors de plaintes répétées et fondées pour non-respect des règlements.

En revanche, le gouvernement n’a jamais empêché quiconque d’exercer toutes espèces de commerce licite en gros ou au détail et n’a jamais fait fermer un magasin.

Comme l’établissement ou la suppression d’un cabaret, soit d’un lieu public, relève de la compétence de la police administrative, le Conseil d’Etat ne peut consentir à s’écarter de cette règle importante de la Constitution en abandonnant aux communautés le droit de décider de l’ouverture ou de la fermeture des établissements publics.

En réponse aux diverses remontrances, le Conseil d’Etat proposa aux bourgeoisies d’examiner avec attention les matières sur lesquelles elles pouvaient être appelées à s’adresser au gouvernement, afin d’éliminer toutes celles mal fondées a priori!

Serments et règlements des cabaretiers

De tout temps, les cabaretiers durent se soumettre à des règlements, qui subirent périodiquement des modifications sous l’égide du Conseil d’État. Celui-ci précisait, affinait certains articles, provoquant à coup sûr de nombreuses controverses de la part des cabaretiers, qui jugeaient tel ou tel article inacceptable ou simplement inapplicable, refusant alors de prêter serment.

En ville de Neuchâtel, au début du XVIIIe siècle, les cabaretiers devaient prêter le serment suivant:

Serment des Hostes Tavernier et Cabaretiers

  1. Vous jurés et promettés de rendre bon et fidèle compte de tout ce qui vous sera remis en main par tous ceux qui logeront dans vostre logis, sous peine d’en estre responsable et de restituer ce qui se trouvera perdu.
  2. Vous ne baillerés ni ne laisserés bailler à boire ni a manger d’aucunes personnes durant les prédications du Dimanche, si ce n’est à des passants estrangers.
  3. Vous empecherés qu’il ne fasse de bruit et de scandale chez vous après la retraite sonnée, à peine d’estre châtiés au rapport des guets.
  4. Vous rapporterés fidèlement toutes batteries qui se feront à Mr le Maire tant bamp qu’eschiernes pour les faire condamner, desquels bamp, d’eschiernes les deux tiers sont à SAS et l’autre tiers à Messieurs les Quatre Ministraux , dont relation leur sera faite.
  5. Vous rapporterés tous blasphémateurs afin qu’ils soient chastiés.
  6. Et au cas qu’il se fit quelque complot ou monopole contre les autorités de SAS Madame la duchesse de Nemours, les droits de Messieurs les Quatre Ministraux et de Messieurs du Conseil de la Ville de le révéler incessamment à Monsieur le Maire et à Messieurs les Quatre Ministraux.

Avec l’avènement de la maison de Prusse en 1707, cette formule de serment ne connut que des modifications de détail.

En comparant ce texte avec celui que le Conseil d’Etat fit imprimer le 27 mars 1786, on ne peut qu’être frappé par la pérennité du fond, dont la formulation toutefois a été adaptée à la langue et l’orthographe de l’époque.

On y précise toutefois les heures de fermeture fixée à 22 heures et un délai de trois jours est accordé aux cabaretiers pour rapporter verbalement ou par écrit à l’officier en chef toutes infractions commises dans leur établissement.

Le texte de ce serment inquiéta quelques cabaretiers du Val-de-Ruz, qui, visiblement, n’avaient pas compris certains passages. Le Maire de Valangin leur apporta les précisions suivantes le 27 mai 1786:

  1. Les cabaretiers peuvent servir les passants ou les voyageurs même après dix heures du soir si ceux-ci dorment à l’auberge et pendant le culte du dimanche. Ils n’ont pas besoin d’obtenir d’autres dispenses.
  2. À l’occasion de noces ou de repas de corps, ils peuvent obtenir des autorisations de prolongation d’ouverture auprès du lieutenant de Justice ou chez le plus ancien justicier du village; le maire déléguant ses pouvoirs.
  3. Le délai de trois jours pour rapporter les désordres semble suffisant pour tous, excepté peut-être pour quelques cabarets éloignés. Dans ces cas-là, le maire saura apprécier selon les circonstances.

Malgré ces précisions enregistrées dans les Manuels de Justice, le Conseil d’Etat fit paraître un nouveau serment le 25 juin 1787 qui abrogeait celui du 28 juin 1785. Quelques modifications avaient été apportées. L’article 3 était rédigé ainsi:

« De ne permettre qu’il soit bu chez vous ni vin ni liqueur après les dix heures du soir. On excepte de cette règle les voyageurs ou passans qui devront coucher dans votre logis. On en excepte aussi les repas de Corps, les noces & les autres cas extraordinaires de cette nature moyennant qu’au préalable vous avez eu soin d’obtenir une dispense de l’Officier, ou du Justicier de l’endroit à qui l’Officier aura délégué ce pouvoir. »

L’interdiction de donner à boire pendant le culte à l’exception des voyageurs fait l’objet d’un article. L’article 6 est complété comme suit: « de n’user que de bons poids & de loyales mesures usitées dans ce Comté. »

Le formulaire est imprimé d’un côté en français et de l’autre en allemand.

Dès que les Officiers reçurent le texte de ce nouveau serment, ils durent l’intimer à tous ceux qui exerçaient la profession de cabaretiers. Si certains refusaient de le solenniser, les Officiers devaient leur défendre de poursuivre leur commerce.

Des bourgeois de Valangin réagirent fortement contre cette nouvelle formule de serment. Ils en firent part au Conseil d’Etat. Ils reprochaient par exemple à l’article 3 de pénaliser ceux qui se trouvaient en voyage après dix heures du soir. Ceux-ci ne pouvaient plus simplement se sustenter dans une auberge sans devoir impérativement y dormir.

À propos des dispenses à obtenir de l’officier, les bourgeois de Valangin disent: « que cette dispense fait véritablement grief à la liberté naturelle de chaque citoyen; qui doit avoir le droit de boire et de manger honnêtement lorsque le cas légitime y échoit, sans en demander permission ou dispense; à plus forte raison peut-on moins se soumettre à telles astrictions, lorsqu’il s’agit de sociétés respectables, des repas de paix & de fraternité, d’honnêtes récréations où l’amitié en fait l’agrément, où la décence et l’honnêteté règnent, et où les travaux et occupations de la journée jusqu’à l’heure (ou à beaucoup près) où l’on pourrait sans permission sustenter en commun ses forces épuisées, obligeroit, soit le cabaretiers, soit ceux qu’il doit servir, à en solliciter la dispense, quelquefois à un simple individu en sa qualité de justicier, lequel même suivant ses caprices pourroit l’accorder ou la refuser. Non, on n’a pas d’exemples dans nos annales de pareille astrictions, pas même lorsqu’on étoit sous la main-morte et la servitude personnelle; et comment à plus forte raison pourraient-elles avoir lieu sous la qualité de francs Bourgeois? Conséquemment, nous continuons à en solliciter l’entière suppression. »

A force de se pencher sur ce serment, la Bourgeoisie de Valangin y observait de nouveaux inconvénients « dans l’acceptation du nouveau règlement auxquels même jusqu’ici on n’avoit pas fait attention ».

Par exemple, l’article 5 stipule: « que le raport doit se faire dans l’espace de quatre jours y compris celui où le délit aura été commis ». L’ancienne règle accordait un délai d’une huitaine. Les motifs de plainte proviennent des difficultés que rencontrent certains cabaretiers à se déplacer surtout au coeur de l’hiver et lorsque les chemins sont impraticables.

Les Bourgeois de Valangin souhaitaient encore que l’heure de fermeture soit repoussée d’une heure afin que ceux qui avaient commandé quelque chose à boire et à manger « à l’heure permise » puissent achever leur consommation en toute quiétude. Dans ce passage, la supplique des bourgeois de Valangin fait preuve d’une naïveté attendrissante. Ils cherchent purement et simplement à prolonger l’heure d’ouverture jusqu’à onze heures.

Après avoir étudié les requêtes de la Bourgeoisie de Valangin, le Conseil d’Etat publia une nouvelle formule de serment le 29 décembre 1789. L’article 3 devint alors:

« De ne pas permettre qu’il soit bu chez vous ni vin ni liqueur dès les onze heures du soir.
On excepte de cette règle les cas de repas de corps, & tous les voyageurs, soit qu’ils s’arrêtent dans votre logis pour y coucher, soit qu’ils veuillent continuer leur route.

On en excepte aussi les noces & autres cas extraordinaires de cette nature, moyennant qu’au préalable vous ayez eu soin d’informer l’Officier, ou, à défaut, le Justicier de l’endroit. »

Ayant obtenu satisfaction presque sur tout, la Bourgeoisie de Valangin se montra satisfaite.

Cependant, l’ouverture des cabarets jusqu’à onze heures fut vite ramenée à dix. Toutefois, un rescrit royal du 15 mars 1794 la ramena à onze, pour revenir à dix, le 18 juillet 1803!

En analysant les arrêts du Conseil d’État, il semble que de nombreuses difficultés surgirent encore pour obtenir des cabaretiers qu’ils entérinent ce serment.

Comme des cabaretiers se plaignirent auprès de la Bourgeoisie de Valangin de cette formule de serment, celle-ci demanda au Conseil d’Etat de surseoir aux prestations de serment, tant qu’elle n’aurait pas analysé les réclamations qui lui étaient adressées. Le Conseil d’Etat rétorqua qu’il ne pouvait y souscrire vu que la suspension demandée prolongeait en fait les désordres. Il réitérait son ordre aux officiers de procéder aux prestations de serment. Face à cette attitude, la Bourgeoisie de Valangin renvoya alors une nouvelle remontrance, qui ne put être reçue.

Pendant ce temps, les cabaretiers récalcitrant, se sentant soutenus par leur Bourgeoisie, continuaient de braver l’autorité en refusant la prestation du serment.

De 1789 à 1810, les dissensions durèrent. Bon nombre de cabaretiers des Montagnes continuèrent à refuser le serment, au risque de paraître en justice. Cette anarchie favorisa la prolifération des débits et le nombre des procès.

Pour essayer de prévenir les désordres qui avaient lieu dans les cabarets et autres débits de vin et liqueur, le Conseil d’État promulgua le 11 décembre 1810 un nouveau règlement qui se substituait à toutes les mesures qui avaient été prises jusque-là. Les chefs de Juridiction durent « faire publier le dit Règlement tant par la lecture qui devra être faite en ouverte justice et à l’issue du service divin, que par affiche aux lieux accoutumés, et d’en faire remettre un double à tous les cabaretiers, vendeurs de vin et gens tenant café ou billard ».

L’article 1 fixait les heures de fermeture: dix heures pour les établissements qui avaient des enseignes (droit de schild); neuf heures pour les autres. Seules les auberges munies d’un droit de schild pouvaient obtenir des dérogations lors de repas de corps, noces ou autres cas exceptionnels auprès de l’Officier ou du Justicier de l’endroit. Les

autres articles reprenaient les mêmes mesures que précédemment et dernier article disait: « toute contravention au présent amendement, sera punissable par trois jours et trois nuits de prison civile, et frais résultant ».

Le durcissement de la position du Conseil d’Etat provoqua de très vives réactions. La Bourgeoisie de Valangin exposa à plusieurs reprises les inconvénients d’un tel règlement. En 1820, trente cabaretiers du Val-de-Ruz adressèrent des remontrances au gouverneur et au Conseil d’Etat. Citons quelques points de controverse.

Si l’heure de fermeture différenciée entre auberge et cabaret ne leur paraît pas susciter de problème, en revanche, il conviendrait de la repousser d’une heure. Voici quelques uns de leurs arguments:

« À 9 heures en été, il n’est presque pas nuit et si des agriculteurs qui n’ont pas de vin chez eux (c’est le plus grand nombre) ont besoin en venant alors des travaux de la campagne, de se réconforter, ou qu’ils ayent quelques marchés à faire de bétail ou autres, de les enjoindre à s’en aller incessamment lorsque l’heure est arrivée, quelque fois même avant qu’ils ayent bu la moitié d’une bouteille; s’ils n’ont pas le plus grand empressement de partir, le cabaretier est obligé de mettre de la vigueur, et il arrive quelquefois que c’est envers des supérieurs civils ou militaires, ce qui est extrêmement pénible puisqu’il est rare qu’on l’oublie. Si le cabaretier eusse d’égard qu’il laisse passer quelques minutes il est pris par un employé de police et dénoncé sans miséricorde comme étant en contraventions, quand même la plus parfaite tranquillité règne chez lui; il est poursuivi à l’exigence du cas et aux frais sans aucun espoir de succès s’il vouloit tenter de se défendre. »

Étant donné que six clochers seulement étaient munis d’horloge dans toute la Juridiction de Valangin, il y avait souvent désaccord entre la montre du gendarme et la pendule de la pinte!

Quelques chefs de villages, lorsqu’ils s’amusent, octroient à certains cabaretiers de leurs amis des permissions qu’ils n’accorderaient pas à d’autres. Ces différences favorisent la jalousie. A coup sûr, il y avait du favoritisme si bien que certains, bénéficiant d’appuis, n’étaient jamais dénoncés alors que d’autres étaient punis à la moindre incartade.

Les cabaretiers du Val-de-Ruz demandaient encore égalité de traitement avec leurs collègues des Montagnes, qui, par autorisation spéciale, pouvaient fermer leurs établissements une heure plus tard. On considérait que les nombreux ouvriers habitant cette région devaient pouvoir se détendre après le travail!

Quant aux peines de prisons qui les menaçaient pour la moindre faute, elles étaient jugées trop sévères. Ceux-ci souhaitaient voir appliquer le règlement existant en ville de Neuchâtel, par lequel on punit les contrevenants une première et une seconde fois par des amendes pécuniaires, ainsi que les buveurs en faute.

Pour donner suite à la requête des cabaretiers du Val-de-Ruz, le maire de Valangin convoqua les trente signataires afin qu’ils citent de vive voix les fonctionnaires publics qui favoriseraient certains au dépens d’autres. Ils ne nommèrent personne, retirant même leur accusation. Toutefois, le maire accorda du crédit à cette entrevue puisqu’il adressa une lettre au gouverneur dans laquelle il dit que les deux derniers points de la requête des cabaretiers méritaient attention. Il estimait que tous devaient être astreints aux mêmes heures de fermeture car « on se soumet avec peine à une loi à laquelle vos voisins ne sont pas obligés de s’astreindre. »

Il admet aussi que la peine de prison punissant les fautes des cabaretiers est trop lourde et que des amendes – il propose 20 livres – seraient plus justifiées. Il lui semble toutefois impossible de punir les buveurs contrevenants car seuls deux gendarmes surveillent la juridiction et que les flagrants-délits sont rares. Les infractions ne sont souvent découvertes que deux jours plus tard, ce qui empêche de citer en témoignage les buveurs. Pour terminer, il propose que dans les villages qui n’ont pas d’auberges, les cabarets puissent accueillir les repas de corps et les noces et qu’il faudrait mieux expliquer l’article interdisant de donner à boire pendant le culte, vu que, dans une même paroisse, il y a plusieurs villages, donc divers cabarets, et que, l’heure du sermon et du catéchisme variant, il n’est guère possible de savoir dans chaque cabaret l’heure exacte à laquelle le culte se termine.

Soucieux de contenter au mieux ses sujets, le Conseil d’Etat chargea une commission de revoir le règlement des cabarets. Le 6 janvier 1823, Joel Matile présenta un rapport circonstancié dans lequel il s’interroge à propos des cabarets. Selon lui, il est nécessaire de distinguer les auberges, qui ont un droit de schild, des cabarets et des pintes, qui, par leur trop grand nombre, minent « la prospérité publique dans ses fondements ».

« La Suisse passe pour le pays de l’Europe qui a les meilleures auberges jusque dans les vallées les plus reculées, au moins à l’égard de quelques cantons. On ne trouve nulle part un meilleur gîte et un meilleur accueil, une nourriture plus agréable et une plus grande sûreté pour les voyageurs que pour leurs effets, mais le principauté de Neuchâtel n’a pas part à de pareils éloges. Nous n’avons que peu d’auberges bien montées, un grand nombre ne sont pas dignes de recevoir des gens qui se respectent et qui ont l’habitude de l’aisance; c’est particulièrement dans les cantons voisins et aux tables d’hôtes que l’on entend les plaintes des voyageurs contre notre pays à cet égard. N’est-il pas intéressant de rechercher les causes de ce désordre et de voir si le gouvernement n’a pas les mêmes moyens d’avoir de bonnes auberges que les cantons suisses? »

Pour remédier à cette situation, Matile propose simplement « d’environner de quelques considérations les aubergistes ». Par exemple, dans le canton de Berne, il n’est pas rare de voir des membres du gouvernement témoigner de la considération aux aubergistes particulièrement en présence du public et de les accueillir à leur table pour partager le repas. Et même, certains membres du Conseil souverain ne dédaignent pas d’exercer la profession d’aubergiste.

« Tous sont comme autant de Lieutenants du Gouvernement sur lesquels celui-ci peut compter et dont la présence au milieu d’une chambrée de buveurs en impose comme un supérieur respectable à ses subordonnés. »

Dans le pays de Neuchâtel, au contraire, « le bien-être et la sûreté exigent que les aubergistes soient emprisonnés, chargés de frais, découragés, mécontents du Gouvernement ». D’après Matile, les poursuites les plus nombreuses devant les tribunaux sont celles contre les aubergistes et les cabaretiers. Pour ces derniers, plutôt que de les soulever contre l’autorité par des règlements sévères, il vaudrait mieux s’attacher en réduire le nombre, d’où la raison d’être du mandement du 27 décembre 1825.

Les peines de prison civile auxquelles sont condamnés les aubergistes à la moindre faute, les frais considérables qu’entraînent les procès, les inquiétudes conduisent non seulement les aubergistes mais aussi le public à proférer des malédictions contre le Gouvernement. Toutes ces tracasseries détournent de la profession toutes les personnes honnêtes si bien que de nombreux Neuchâtelois exercent ce métier dans le canton de Berne! Ainsi, ceux qui tiennent les auberges sont souvent des étrangers « qui ne jouissent que d’une très médiocre considération, qui ont peu de fortune et pour qui cet état n’est quelque fois qu’un accessoire ».

Afin que des Neuchâtelois exercent la profession d’aubergistes, il faudrait que les règlements évitent l’arbitraire et ne prescrivent point des peines sans proportion avec les délits commis. Nulle part ailleurs, de telles peines sanctionnent de tels délits. Un système de contraventions progressives devrait être mis en application.

Matile se propose ensuite d’examiner en détail le premier article du projet de règlement. Son analyse sémantique le pousse à réfuter certains termes, qui, par leur sécheresse et leur manque de souplesse, conduisent obligatoirement à l’arbitraire. Il s’attarde sur l’expression « fermé à telle heure » ou sur la valeur sémantique du mot « voyageur ». Il considère aussi que les heures de fermeture prescrites sont mal choisies et qu’une heure reculée serait préférable. « Je crains que les mesures du gouvernement pour changer les habitudes des peuples et les obliger à se coucher de bonne heure n’échouent complétement. »

Il est significatif de remarquer que les cercles, si typiquement neuchâtelois, se sont développés à cette époque. Sans enfreindre les règlements, il était possible d’y boire et d’y manger jusqu’à minuit. A ce propos, Matile dit: « Heureusement que ces sociétés sont composés de gens les plus aisés et en parties les mieux pensants ».

En conclusion, Matile considère que le projet du nouveau règlement n’a pas été suffisamment réfléchi et qu’en conséquence, il est inutile d’entrer en matière sur les autres articles avant d’avoir cerné tous les aspects du problème.

Ainsi, le règlement de 1810 restait en vigueur, complété par le mandement de 1825.

Le 29 décembre 1829, le Conseil d’Etat introduisit un nouveau règlement en quatorze articles. L’heure de fermeture des auberges restait dix heures et celles des cabarets, neuf heures. De nouvelles prescriptions concernant les danses et les jeux de hasard apparurent. Le for concernant les difficultés qui pouvaient survenir entre aubergiste et clients fut défini. La peine de prison civile demeurait, pondérée toutefois par des amendes de 40 batz pour des infractions légères.

Une fois de plus, ce règlement n’était pas satisfaisant. Les bourgeoisies et les communes, se fondant sur le maintien de la liberté de commerce levée selon eux par les ordonnances sur les cabarets, demandèrent la suppression entière du mandement du 27 décembre 1825 et, à propos du règlement du 29 décembre 1829, une égalité entre les heures de fermeture entre les auberges et les cabarets et la suppression de la peine de prison civile.

Pour faire face à toutes ces requêtes, le Conseil d’Etat, pressé par le Corps législatif, chercha à connaître l’avis des chefs de juridiction sur ces questions.

Dans leur rapport, la plupart des officiers de juridiction, en particulier les chefs des juridictions les plus peuplées, furent d’avis qu’il fallait rendre caduc le mandement de 1825, soit parce qu’il blessait les droits du peuple, soit parce qu’il était plus nuisible qu’utile. Le Conseil d’Etat, devant ces réclamations si générales et si politisées, convint finalement qu’il fallait rapporter purement et simplement cette ordonnance de 1825 ainsi que l’arrêt du 26 juin 1827, qui déterminait les formalités à suivre par les propriétaires de vignes pour le débit au détail du vin de leur cru.

Avec la révocation des ces deux arrêts, ceux qui voulaient ouvrir un débit de vin ou de liqueur, n’avaient d’autres formalités que de s’annoncer à l’officier de la juridiction, afin qu’il soit pris note de leurs noms et qu’ils reçoivent un exemplaire du règlement des cabarets.

Avec 1831 triomphe donc le libéralisme le plus complet. Le droit de vendre du vin et des liqueurs en tenant un débit n’est plus soumis à l’autorisation du Conseil d’Etat comme cela fut le cas durant des siècles même si, au cours du XVIIIe siècle, le gouvernement avait délégué cette prérogative à ses officiers.

Si, au début du XIXe siècle, le Conseil d’Etat avait voulu rétablir dans son intégrité toute la force de son droit de police, au détriment des libertés communales et individuelles, suivant par là l’esprit de la Restauration, avec 1831 et le mouvement libéral, il abandonna cette démarche, renonçant à sa politique de rigueur. Il ne lui restait alors qu’à publier un nouveau règlement, ce qui fut fait le 16 août 1831.

L’article 1 révoque le mandement de 1825, l’arrêt du 26 juin 1827 et le règlement de 1829. L’article 2 intime l’ordre à chaque aubergiste et cabaretier qui veut continuer d’exercer sa profession et chaque particulier désireux d’ouvrir un débit de s’annoncer à l’officier de Juridiction. L’heure de fermeture à dix heures devient commune aux auberges et aux cabarets. L’article 6 autorise les villes et les communautés qui jugent utile d’obtenir une prolongation ou une restriction quant à l’heure de clôture d’adresser une requête écrite au Conseil d’État. Quant à l’article 14, il supprimait enfin la peine de prison jugée infamante.

Pour connaître l’impact des mesures prises et du règlement de 1831, le Conseil d’État demanda aux cours de Justice et aux consistoires de répondre à un questionnaire en seize points. Le 15 septembre 1837, le dépouillement des réponses fut opéré. Il en résulte que le règlement dans l’ensemble a été bien accepté, qu’il est dénombré 707 établissements, soit un pour 80 âmes, que les débitants respectent assez bien le règlement, que le nombre des ivrognes n’a pas augmenté sauf dans une juridiction, que les désordres ont diminué.

À la seizième question qui demandait quels remèdes il faudrait administrer, certains proposèrent qu’un droit de veto soit attribué aux communes afin de limiter le nombre des établissements. D’autres souhaitaient une surveillance accrue et quelques consistoires, le rétablissement du mandement de 1825.

En conclusion, les mesures libérales adoptées par le gouvernement furent assez bien accueillies par la population, un peu moins bien par les consistoires. Malgré une augmentation de 141 établissements par rapport à 1826, la débauche, l’ivrognerie et les désordres n’augmentèrent pas, bien au contraire! La libre concurrence et le libre établissement qui ont favorisé l’accroissement du nombre des débits, aboutirent finalement à une stabilisation de la situation.

La mentalité vue à travers les cabarets

Que ce soit au début du XVIIe siècle ou au milieu du XIXe siècle, les avis des gens « bien pensants » sont unanimes pour dire que les cabarets sont les lieux où les désordres et les rixes sont les plus fréquents. Le vin échauffe les esprits et l’abus de liqueurs incite à la violence. Cependant, si cet état de fait semble être pérenne, on peut quand même se poser la question suivante: à savoir si la clientèle des auberges et des cabarets est restée la même durant cette période.

Il convient tout d’abord de souligner que la population s’est accrue et que le pays de Neuchâtel a vu affluer bon nombre d’étrangers, tant des réfugiés protestants après la Révocation de l’Edit de Nantes que des sujets des cantons suisses. Le développement de l’industrie au cours du XVIIIe siècle, l’horlogerie dans le Haut, les indiennes dans le Bas, ont favorisé cet essor démographique. Pendant le siècle des Lumières, de nombreux Neuchâtelois ont aussi abandonné la terre au profit d’autres occupations, laissant ainsi cultiver leurs biens-fonds par une main d’oeuvre agricole d’origine étrangère. Il suffit de se rapporter aux contrats vignerons pour s’en convaincre. Le développement d’un prolétariat tant agricole qu’industrieux est indéniable pour les XVIIIe et XIXe siècles. Une nouvelle clientèle se présentait donc aux portes des pintes et des cabarets.

Au XVIIe siècle, les hommes se rendaient à l’auberge après leur travail tant pour simplement se retrouver entre connaissances que pour discuter plus sérieusement des affaires de la communauté. La grande salle de l’auberge, qui était souvent propriété communale, favorisait les réunions qui ne pouvaient se tenir chez des particuliers. Les comptes des administrations communales sont remplis d’articles concernant des dépenses faites à l’auberge à la suite de délibérations importantes. Disons que la mise du ban des vendanges était généralement suivie d’un repas sauf lorsque les récoltes s’annonçaient trop mauvaises comme en 1709 par exemple. Jusqu’à la fin du XVIIe siècle, il était normal que tous les hommes se rendent à l’auberge pour y discuter.

Avec le XVIIIe siècle, l’architecture changea. Les maisons, plus spacieuses, convenaient aux réceptions privées. Dès lors, toute une clientèle aisée se détourna des auberges, trouvant dans des soirées privées une compagnie de qualité. La femme joua un rôle considérable dans ce bouleversement des habitudes. Reléguée jusque-là à des tâches domestiques, elle devint une compagne dont on recherchait l’amitié. Une mutation sociale eut donc lieu et les membres de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie cessèrent de fréquenter quotidiennement les établissements publics, les abandonnant au profit de cercles privés, tel le cercle du Jardin fondé en 1759. La création de cercles privés détourna des auberges une quantité de citoyens.

Cette séparation entre les couches élevées de la population et la masse populaire accentua au XIXe siècle la tendance paternaliste dont le gouvernement fit preuve, voulant éduquer le peuple pour soi-disant favoriser son bonheur.

Cette volonté sincère des gouvernants d’essayer de protéger le peuple contre les méfaits de l’alcool correspond entièrement aux vues et aux idées de la Restauration. Il fallait sauvegarder l’ouvrier afin que celui-ci puisse travailler sans tomber à la charge des fonds pieux ou des communautés. Cette lutte contre l’alcoolisme fut soutenue tant par les gouvernants que par les ecclésiastiques. Ces derniers firent preuve d’un activisme certain. Il suffit pour s’en convaincre de lire les rapports que les consistoires adressèrent au Conseil d’Etat en réponse aux seize questions.

Cependant, face à la poussée libérale de 1830, le gouvernement dut céder, plus par peur politique que pour plaire aux communautés requérantes. 1831 ouvre pour le pays de Neuchâtel la liberté d’établissement pour les vendeurs de vin et de liqueurs. Cependant l’accroissement du nombre des débits résultant de cette ouverture n’a pas été suivi par une augmentation du nombre des buveurs, des rixes ou autres troubles. De cela, il serait plausible de tirer que le pourcentage d’alcooliques d’une population est constant. Qu’il y ait peu ou beaucoup de débits, ceux qui ont un penchant pour la boisson trouveront toujours le moyen de l’assouvir.

En conclusion, du XVIIe au XIXe siècle, si la population qui fréquente les auberges et les cabarets a changé en vertu des mutations socio-culturelles qui ont eu lieu au cours du XVIIIe siècle et de l’apparition d’un prolétariat, en revanche, il ne semble pas que le

nombre des alcooliques ait réellement augmenté, toute proportion gardée. Cependant, lorsque on appartient à une couche populaire, les distractions possibles ont un éventail plus restreint que pour les membres des classes favorisées. Le seul endroit où il était aisé de se distraire restait le cabaret et il est clair que selon leurs accointances, des groupes pouvaient se rassembler dans des endroits qui, aux yeux des bourgeois, pouvaient passer pour mal famés. Il en est de même aujourd’hui.

ANNEXES

Rapport de Monsieur le Procureur Général, Joël Matile du 6 janvier 1823

Le Conseil a ordonné le dépôt en chancellerie du travail de la Commission chargée de revoir les réglements concernant des cabaretiers. Il était de mon devoir de l’examiner tout comme il est de mon devoir de présenter mes observations dans tout leur détail.

Je distinguerai les auberges qui ont droit de schild des cabarets, pintes etc. Les premières sont utiles, la trop grande quantité des autres mine la prospérité publique dans ses fondements.

La Suisse passe pour être le pays de l’Europe qui a les meilleures auberges jusque dans des vallées les plus reculées, au moins à l’égard de quelques cantons. On ne trouve nulle part un meilleur gite, un meilleur accueil, une nourriture plus agréable et une plus grande sûreté tant pour les voyageurs que pour leurs effets, mais la Principauté de Neuchâtel n’a pas de part à de pareils éloges. Nous n’avons que peu ou point d’auberges bien montées, un grand nombre ne sont pas dignes de recevoir des gens qui se respectent et qui ont l’habitude de l’aisance; c’est particulièrement dans les cantons voisins et aux tables d’hôtes que l’on entend les plaintes des voyageurs contre notre pays à cet égard. N’esl il pas intéressant de rechercher les causes de ce désordre et de voir si le gouvernement n’a pas les mêmes moyens d’avoir de bonnes auberges que les cantons suisses?

Je prendrai pour exemple de comparaison le canton de Berne sans en exclure les baillages réunis. Les moyens que ce gouvernement a employés depuis bien longtemps et qu’il continue de mettre en usage sont aussi assurés qu’ils sont simples et à la portée de tous les gouvernements. L’un des principaux, le plus essentiel même, c’est d’ environner de quelques considérations les aubergistes. J’ai beaucoup voyagé avec des membres du gouvernement de Berne, et je n’ai pas été peu frappé d’entrée des égards et des témoignages de considération qu’ils semblaient se faire un devoir de donner aux aubergistes particulièrement en présence du public; plusieurs fois, je les ai vu prendre place à notre table; aussi voit-on dans l’ancien comme dans le nouveau canton, des gens très estimables, même des membres du Conseil souverain, ne pas dédaigner de suivre l’état d’aubergiste. Tous sont comme autant de Lieutenant du Gouvernement, sur lesquels celui-ci peut compter et dont la présence au milieu d’une chambrée de buveurs en impose comme un supérieur respectable à ses subordonnés.

Il est loin d’en être de même dans notre pays. Il semblerait au contraire quele bien-être et la sûreté exigent que les aubergistes soient emprisonnés, chargés de frais, découragés, mécontents du Gouvernement et en effet quelles sont les poursuites les plus communes devant nos tribunaux, ce sont celles contre les aubergistes et cabaretiers, je continuerai à ne pas m’occuper de ceux-ci car le public peut s’en passer, je dirai qu’il serait simplement plus utile de s’occuper à en réduire le nombre qu’à les soulever en quelque sorte contre l’autorité par des réglements dont la sévérité est sans exemple dans quel pays que ce soit et dont l’application est plus sévère encore. Le gouvernement calcule-t-il bien les résultats des sentiments qu’éprouvent un cabaretier lorsqu’il est poursuivi à trois jours et trois nuits de prison pour un prétendu délit dont sa conscience ne pas lui faire l’ombre d’un reproche; l’influence d’un homme dans ces dispositions a sur des réunions nombreuses de gens échauffés par le vin, lorsque ces aubergistes parlent du gouvernement des peines qu’il leur a fait subir, des frais considérables qui en ont été la suite en exposant le fait et en rendant le public juge de tels délits. Tantôt ce sera un gendarme qui n’est pas de sang froid et dont la montre ne s’accorde ni avec la pendule de l’auberge ni avec les montres de buveurs, tantôt c’est l’aubergiste qui règle un compte avec son voisin, tantôt c’est un cabaretier qui invite son tailleur gratuitement à dîner le dimanche, une autre fois l’aubergiste aura fait danser au moyen d’une carte de permission illimitée et sans que l’heure de la retraite soit fixée, à 10 heures et demie chacun se prépare à sortir mais le gendarme arrive et l’exigence du cas est ordonné. Quelques fois on plaide il est vrai et le Conseil, mieux informé sur le rapport des examinateurs des procédures abandonne la poursuite, mais que de frais, que d’inquiétude, que de courses pour l’innocent, et heureux si on ne peut dire que des malédictions contre le gouvernement, non seulement de la part du cabaretier poursuivi, mais encore de tous ceux qui s’intéressent à lui. On serait singulièremnet étonné si depuis près de 13 ans que le réglement des cabaretiers existe, on connaissait les frais et les écritures qu’il a occasionnés, aussi nos auberges sont en général tenues par des étrangers, souvent peu connus, qui ne jouissent que d’une très médiocre considération, qui ont peu de fortune et pour qui cet état n’est quelque fois qu’un accessoire. Ce sera un tailleur qui n’avait pas assez de talent pour suivre sa profession, un empirique chassé de son pays: je me suis trouvé cet été obligé à recourir à l’intermédiaire de Mr. le lieutenant du Landeron pour obliger l’aubergiste de la Croix Blanche à mettre mon cheval à l’écurie et de lui donner de l’avoine pendant que je devais faire l’inspection des routes de la commune, il n’y avait qu’une personne qu’on me dit être la femme de l’aubergiste, elle ne voulait pas se déranger ni pour soigner mon cheval, ni pour aller chercher son mari qui était à la boucherie et lorsque je le repris, on me fit payer une demie mesure d’avoine, en allèguant que je n’avais pas limité la quantité.

On m’objectera qu’il est bien impossible de faire naître de la considération en faveur de telles gens, j’en conviens, je voudrais voir des indigènes respectables prendre cet état et nos réglements tendre à ce but, plutôt que de présenter de l’arbitraire auquel un homme qui se respecte n’aime jamais à se soumettre s’il peut s’en dispendre, et plutôt que de prescrire des peines qui ne sont point en rapport avec les délits. Je ne suis pas assez jurisconsulte pour en parler comme tel, mais j’ai pris des informations au long et au large, et je sais que nulle part, les punitions ne sont aussi rigoureuses que chez nous pour les mêmes délits. Le ci-devant Erguel a montré l’exemple, pendant qu’il était sous la domination française, de la population la plus crapuleuse et la plus livrée à tous les désordres qui résultent de l’absence de toute police, et Mr. May, grand baillif de Courtelary, à qui je témoignai deux ans après son arrivée dans son baillage tout l’étonnement que j’éprouvais de ce qu’il avait pu ramener un ordre parfait avec des moyens aussi doux que ceux qu’employait le gouvernement, me répondit: » N’est-ce donc rien de payer 4 francs d’amende, 8 francs pour les récidives, de comparaître en cour bailliviale etc. , on ne s’expose pas souvent à cela pour vendre quelques bouteilles de vin de plus lorsqu’on ne serait dénoncé qu’une fois, sur 4 ou 5 contraventions, un cabaretier ferait toujours un métier ruineux, et preuve en est le succès que j’ai obtenu ». Il ne concevait pas nos trois jours et trois nuits de prison et nos trois ou quatre Louis de frais pour les délits de cette nature souvent involontaires, et plus encore souvent impossible à prévenir de la part d’un aubergiste. J’ai beaucoup voyagé dans cet évêché de Bâle, j’ai questionné tous les aubergistes chez lesquels je me suis arrêté et je n’en ai jamais rencontré un qui se du baillif, sur relation d’aubergiste quoiqu’ils sussent bien me dire que le peuple était loin d’être content.

Après ces considérations générales, je ne passerai en revue que le premier des articles du projet de réglement; cet article seul donne lieu à des observations importantes.

  1. À l’heure indiquée les auberges doivent être fermées. Qu’estque cela signifie? Une auberge peut être fermée et contenir des buveurs.

Si elle n’était pas fermée et qu’il n’y eut aucune personne étrangère y aurait-il contravention?

S’il y avait que des voyageurs et que l’auberge ne fut pas fermée, y aurait-il contravention?

Comme générallement, on se couche nulle part à 9 heures du soir l’hiver et rarement à 10 l’été, l’aubergiste, ses gens et domestiques ne pourront-ils pas vaquer à leurs affaires après les heures prescrites, s’entretenir correctement avec ses voisins, préparer leurs chars et leurs charrue pour le lendemain, car souvent les granges, les écuries, les remises sont séparées de l’auberge. Si les chevaux de l’aubergiste arrivent seulement à 9 heures du soir l’hiver et 10 heures l’été faudra-t-il dans ces cas, quand on a passé de la maison d’habitation aux granges, écuries, remises, chez le voisin et vice-versa, faudra-t-il que chacun ait une clef dans la poche, pour fermer l’auberge lorsqu’on sort pour vaquer à ces diverses occupations qui exigent des entrées et des sorties continuelles, quelquefois jusque bien en avant dans la nuit?

Il n’y a que peu de maisons qui n’ait plusieurs portes qui donnent à l’extérieur; lorsque les écuries sont dans le même corps de bâtiment que l’auberge, il y a toujours entre elles des portes de communication, on peut aller dans l’auberge par l’écurie, celles ci ou toutes autres portes doivent être ferméss comme les portes principales de la maison?

Toutes ces questions auxquelles, je crois, il est impossible de répondre d’une manière satisfaisante dans l’état actuel de la rédaction prouvent que l’expression du réglement  » fermé à telle heure » est mauvaise et qu’elle prête à l’arbitraire.

On dit dans ce morne article qu’il n’y a d’exception qu’à l’égard des voyageurs, suivant l’académie, un homme de la Chaux-de-Fonds, du Locle, des Verrières qui vient à Neuchâtel ou qui s’en retourne chez lui ne serait pas qualifié de voyageur; les aubergistes doivent-ils être punis pour leur ouvrir leur maison et comme ils ont l’ obligation de loger les voyageurs ne seraient-ils tenus à rien envers les habitants du Pays? Mais à supposé que nous donnions un sens différent au mot voyageur, et malgré les principes de la langue, il nous convienne de qualifier de voyageur les gens qui viennent des extrémités du Pays, que dira-t-on de ceux qui viennent de Dombresson, de Travers, de Bevaix? Entend-on que ce soit à l’aubergiste à expliquer à son gré si telle ou telle personne qui est chez lui est ou n’est pas un voyageur? Non, sans doute. Il faudra donc que cela soit remis au gendarme, mais ainsi que l’aubergiste, il ne connaîtra pas plus les individus que leurs domiciles. Dans le doute, l’officier de la Juridiction dressera procès-verbal, le Conseil ordonnera la poursuite et parce que le réglement prête encore ici à l’arbitraire, des aubergistes, quoique reconnus innocents, seront punis en soutenant un procès avec beaucoup de courses et de frais. Qu’il me soit permis de rappeler cette maxime de tout bon gouvernement, c’est qu’il vaut mieux s’occuper de prévenir les délits que de les punir.

Il n’y a pas d’années, il n’y a pas de mois et souvent il n’y a pas de semaines où le cas suivant ou des cas analogues n’arrivent dans les auberges situées sur les grand-routes, c’est une personne d’un village voisin qui arrive fatiguée d’une course qu’il vient de faire, elle conserve le désir et l’espérance d’arriver chez elle jusqu’à l’heure où l’auberge doit être fermée, mais la fatigue continue, le temps devient plus mauvais et ce sont quelques froides pluies qui permettent à peine de traverser la rue, des nuits si sombres que rien ne peut être vu, des tourbillons de neige qui ne sont bravés que par des gens

robustes et quelquefois imprudents, mais l’heure est écoulée, l’aubergiste a le pressentiment de l’arrivée du gendarme, il prie, il gémit, il supplie ses hôtes de s’en aller, cela est inutile, il n’a pas le courage de leur faire violence, il aurait peut-être à se reprocher la mort de quelques personnes et il préfère encore de s’exposer à trois jours et trois nuits de prison; plusieurs prennent la résolution de loger à l’auberge, ils ne peuvent pas se coucher sans souper, le gendarme arrive, il menace, toutes les explications sont inutiles, il voit des journées en perspective et l’aubergiste doit marcher en prison et payer une grosse liste de frais. Je me demande dans quelles dispositions peuvent être alors à l’égard du gouvernement les personnes qui ont été assez heureuses pour trouver un refuge, et à combien de parjures et de faux serments notre excessive sévérité n’a peut-être pas donné lieu de la part de telles personnes pour sauver de la punition un aubergiste auquel elles ont de si grandes obligations?

Et que dirai-je des aubergistes, de leurs femmes, de leurs amis, de tous ceux qui entendent conter de pareils faits? On loue, on rend un hommage pompeux à la sagesse, à la prudence et à 18 bonté des Quatre Ministraux dans l’exercice de leur police à cet égard, et on se demande si nous ne sommes pas sujets du même souverain.

L’expression voyageur est donc impropre et prête à l’arbitraire, je dois ajouter que généralement dans le public on croit qu’on fait exception si on est dans une auberge, hors de sa commune, si le Conseil d’ Etat l’entend autrement, ne serait-il pas de sa sagesse et de sa bonté de tirer le public de cette erreur.

J’ai encore quelque chose à dire, quoique bien malgré moi l’heure fixée à 9 en hiver et à dix en été: ce ne sont pas les heures où on se couche généralement dans notre pays particulièrement dans les Montagnes qui font environ le tiers de notre population, et je crains que les mesures du gouvernement pour changer les habitudes des peuples et les obliger à se coucher de bonne heure n’échouent complétement; je crains même que la fixation de ces heures ne soit la cause de désordres bien plus graves que ceux qui résulteraient de la fixation d’une heure plus reculée. Que feront les gens et particulièrement ceux qui sont forts et vigoureux lorsqu’ils seront forcés de sortir d’un café, d’un cabaret, d’un billiard et qu’ils ne voudront pas se coucher parce qu’il n’en est pas l’heure? Ils seront dans les rues, plusieurs trouveront quelques coins où on ne vendra pas de vin, mais qui seront beaucoup plus dangereux que des cabarets; ou il s’établira des sociétés nombreuses comme cela s’organisait déjà lorsque les officiers des Montagnes représenteront privément pendant des Etats à Valengin les grandes difficultés de faire observer le réglement de 1810 et lorsqu’ils reçurent cette sorte d’autorisation privée qui a été suivie jusqu’à présent de ne faire fermer les auberges qu’à 11 heures et les cabarets à 10. Comme à Neuchâtel, il y a à la Chaux-de-Fonds une société nombreuse, au Locle je crois, il y en a deux, aux Brenets une, on y boit et mange et on y veille jusqu’à 11 heures ou minuit sans enfreindre les réglements du Cercle; heureusement que ces sociétés sont composés des gens les plus aisés et en partie les mieux pensants. Mais que dans les classes inférieures, ils viennent à s’établir de semblables rassemblements, on en verra bientôt les funestes effets. D’un autre côté, des ouvriers assidus à leurs ouvrages et il y en a beaucoup et dans la proportion que

l’industrie va mal, ne se permettent de quitter leur travail que pour être une demie- heure dans un cabaret, dans un café ou dans un billiard, on m’a assuré que sur dix personnes qui y paraissaient à ces heures, on n’en peut pas compter plus d’une qui fasse un sol de dépense. Que deviendront ceux de cette classe d’ouvriers? Ne pas sortir du tout, cela est presqu’ impossible et du moins cela serait très contraire à la santé, et s’ils sortent, il faudra que ce soit une demie-heure ou une heure plutôt qu’ils ne le voudraient. Si l’on calcule l’heure de travail à raison de deux batz seulement, par le nombre de ces ouvriers, on verra quelle perte la fixation de ces heures fera faire au bout de l’année.

Si les observations générales que j’ai cru devoir présenter sur l’état des auberges de ce pays, si les réflexions que j’ai faites sur le premier article du projet de règlement ne suffisent pas pour faire comprendre que cette matière n’est pas suffisamment traitée sous tous les rapports sous lesquels elle peut l’être, il me serait assurément bien inutile d’entrer en discussion sur les autres articles du projet, je me borne donc à ce que je viens de dire et à le présenter comme mon opinion pour être enregistré si le projet est sanctionné.

le 6 janvier 1823 signé: Matile

Information de Monsieur le Maire de la Chaux-de-Fonds au sujet nombre du grand nombre de cabarets du 9 février 1825

Vous m’avez autorisé précédemment à vous signaler un de maux les plus grands qui existe au milieu de nous: vous m’avez demandé un rapport détaillé sur les cabarets et bouchons qui se trouvent en si grand nombre dans nos montagnes: je viens maintenant vous soumettre les observations recueillies à cet égard: j’aurais fait ce léger travail beaucoup plus tôt si je n’eusse désiré pouvoir vous offrir avec le mal, quelques remèdes salutaires: mais après avoir vainement cherché le moyen de parer à cet inconvénient, j’ai pensé que je devais soumettre à votre prudence, les moyens de nous faire sentir un jour qu’un abus quel qu’il soit est toujours intolérable et que tout bon citoyen doit s’efforcer de le détruire; ce principe n’est pas assez connu chez nous; vous savez que l’on y défend quelque fois avec toute la vigueur possible certains droits, certaines franchises pour l’acquisition desquels on ne ferait pas le plus léger sacrifice, parce qu’on les regarderait non seulement comme inutile mais comme dangereux. Je crois pouvoir vous assurer que le droit de vendre vin et liqueur, droit compris chez nous dans la classification de liberté de commerce, doit être rangé dans cette catégorie, et que tout ce qu’il y a de gens honnêtes verrait avec plaisir 1′ anéantissement d’un privilège pareil. Il n’y a rien de plus immoral et de plus ridicule que de voir et le cas n’est pas rare, une femme seule chargée d’un débit de liqueurs; demeurant quelquefois dans des endroits écartés, ayant à faire avec des ivrognes et des débauchés; comment

maintiendra-t-elle l’ordre dans sa maison? Une femme honnête voudrait-elle passer la soirée en pareille compagnie et si c’est une femme dépravée, pourquoi lui confier et lui permettre un vendage de vin: n’est-ce pas autoriser le vice que de protéger des repaires. On me dira que la police doit agir; que les gendarmes doivent faire des rondes, qu’ils doivent surveiller les leiux ouverts au public: oui,mais dans la juridiction de la Chaux-de-Fonds, il faudrait dix gendarmes et il n’y en a qu’un: Permettez-moi ici une observation un peu hors du propos, mais j’implore votre indulgence: pourquoi la Chaux-de-Fonds qui compte plus de 6000 habitants n’a-t-elle qu’un gendarme? I1 y en a 19 pour 48000 âmes, il mesemble que nous devrions en avoir 2 et 1/16. Il y en a bien un qui demeure près du Locle et qui fait trois fois la semaine une course ici, mais ces courses régulières ne signifient rien; ceux qui ne se soucient pas de les rencontrer les évitent sans peine. Outre cela, nous sommes sur les frontières de la France et du canton de Berne, la juridiction de la Chaux-de-Fonds borde ces deux pays sur cinq lieues d’étendue: il me semble que c’est dans une situation pareille que la gendarmerie devrait être placée.

Quand j’ai dit qu’un seul gendarme ne pouvait surveiller les cabarets et les cafés de la Chaux-de-Fonds, je n’ai pas parlé du nombre de ces dèrniers. Ce nombre s’élève à passé 60 dans la commune; ceci vous paraitra exagéré, mais vous pouvez compter sur al vérité dessous allogué. Les débitants trouvent mille moyens d’échapper après les heures fixées du soir à toute surprise qu’un gendarme pourrait leur faire: l’un loue un cabinet chez quelque voisin officieux, afin d’être en pleine sécurité la nuit: l’autre s’associe avec un parent, un ami; il demande un droit qu’on ne peut lui refuser, celui de vendre du vin; il fait passer son débit chez son sociétaire et le voilà sans crainte. Vainement j’ai cherché à dévouvrir ce genre d’industrie: les coupables connaissent bien les gens qui les fréquentent, qu’ils se reposent sur leur discrétion sans inquiétude et je me douterais pas même qu’un pareil négoce a lieu si souventl’on entendait au milieu de la nuit les cris, les jurements et le tapage de ceux qui sortent de ces endroits.

Est-il possible que tous ces détaillants gagnent leur vie? Je répondrais que je ne le crois pas: la concurrence a fait baisser les prix et je n’en connais aucun ait bienfait ses affaires malgré~cela, l’ouvrier-horloger qui ne peut plus gagner sa vie, veut monter un cabaret: il achète quelques meubles, prend à crédit chez ces marchands en gros la marchandise devenue nocessaire dans se nouvelle vocation: il se soutient un an, deux ans, à la fin les locations chères qu’il paye le ruinent absolument,il tombe à la charge des fonds pieux.

Malgré le petit nombre des agents de police, malgré la quantité des lieux publics, l’ordre dans le village de la Chaux-de-Fonds n’est pas souvent troublé, et en parlant d’une manière relative, infiniment moins que dans des endroits d’une importance et d’une population bien inférieure. Tous les étrangers qui ont demeuré quelque temps ici m’ont témoigné l’étonnement qu’ils éprouvaient en voyant une population aussi nombreuse, d’une classe ouvrière, être aussi tranquille. Mais dans les environs du village et sur les frontières, c’est autre chose. Les gens de Franche-Comté,spécialement occupés du commerce de contrabande, attendent dans ces cabarets le retour de la nuit; s’y livrent à tous les désordres qu’engendre l’oisiveté et la débauche. Ceux du canton de Berne y

viennent employer leur argent: ils y trouvent des avantages bien prétieux pour eux: l’eau-de-vie à meilleur compte et la mesure plus grande que chez eux. Souvent ils sont des difficultés entre eux et quelquefois se livrent à de graves désordres. Tout cela n’aurait pas lieu si la vente des liqueurs fortes n’était confice qu’à des personnes honnêtes ayant à coeur d’entretenir le bon ordre chez eux. Moins nombreux alors, ils gagneraient davantage, ce qui deviendrait pour les gens un motif de se vouer à cet état.

Voilà quant à la morale, venons-en maintenant aux inconvénients qui dérivent de l’usage des liqueurs fortes: au bout de quelque temps, ceux qui en font excès sont incapables de s’occuper des parties délicates de l’horlogerie. Le système nerveux est attaqué, ils n’ont plus d’adresse de fermeté dans la main: la misère survient, le desespoir les porte quelquefois aux plus violents excès. Chez les hommes mariés,les résultats sont les mêmes mais ils sont précédés de la discorde et des querelles domestiques, de mauvais exemple pour les enfants et des scènes scandaleuses. Que l’ouvrier après avoir travaillé tout le jour, se repose le soir en buavant un verre de vin si sa situation le lui permet, rien de plus naturel; mais pourquoi ne pourrait-ilpas se rendre dans les auberges et les cabarets de bonnes réputations et où l’on trouve toujours une compagnie honnête et tranquille? Ne serait-ce pas faire son bonheur que de fermer ces asiles du désordre et de l’inconduite et le forcer de fréquenter des gens de bonne compagnie? Le moyen infaillible de parvenir à ce but est d’empêcher la canaille de recevoir publiquement le monde dans ses habitations: on objectera peut-être que ce serait rendre un fort mauvais service aux gens d’un rang plus élevé car on les forcerait de recevoir~la canaille: cette objection est sans fondement, à moins que l’on suppose que chez nous, la canaille a le desus: au reste, elle serait fondée qu’il s’en suivrait la conséquence suivante: fatigués de vivre les uns avec les autres, ils se sépareraient bientôt, et alors on saurait quels sont les lieux fréquentés par les mauvais sujets et ceux-là seraient l’objet d’une surveillance particulière.

Il s’en suit que le remède indispensable est le réduction des deux-tiers des cabarets existants, l’abolition du droit de vendre vin et une surveillance plus active, surveillance qui aura nécessairement lieu quand elle sera non pas facile à exercer, mais possible, car jusqu’à présent, elle ne l’a point été. Quel plus important service pourrait nous rendre le paternel gouvernement de cet Etat que de s’occuper d’une réforme pareille: combien de familles lui devront le bonheur?

Je ne vous parlerai pas des suites qu’amène avec elle l’ivrognerie et la débauche sous le rapport de la santé; vous pourrez plus facilement vous les représenter que je ne peux vous les décrire et lesquelles que j’en tracerais, seraient bien en dessous de la réalité: si au moins les coupables étaient les seuls punis; mais le plus souvent ce sont les enfants qui portent l’iniquité du père.

Depuis que je suis à la Chaux-de-Fonds, j’ai déjà pris sur moi et c’est beaucoup de faire fermer deux ou trois de ces bouchons mal famés: mais je n’ose pas aller trop en avant de peur d’être forcé de reculer: un des débitants a voulu faire agir la bourgeoisie de Valengin, mais on lui a tout promis sans rien tenir; sans doute que Messieurs du Conseil de Bourgeoisie ont su quelle était la conduite de cette personne: ils n’auront

pas voulu se déclarer les protecteurs des mauvais sujets; il ne faut cependant qu’une mauvaise tête pour me susciter bien des embarras.

Veuillez pardonner à mon barbouillage de papier et d’idées: vous m’avez permis d’espérer vôtre indulgence, j’ose la réclamer dans l’état actuel de ce rapport. Agréez l’assurance de la haute considération

Chaux-de-Fonds 9 février 1825

Votre très humble et très obéissant serviteur

SANDOZ maire

J’ai oublié de vous informer qu’il n’y a pas un marchand épicier, droguiste et même pharmacien qui ne puisse offrir une variété de liqueurs vraiment remarquable. Ceux-ci ne sont point comptés dans les 60 précédents. Ainsi figurez-vous dans combien d’endroits les ivrognes peuvent assouvir leur passion, ceux que les lois ont frappé de discrédit, ceux qui ne doivent plus fréquenter les cabarets s’en vont dans une boutique et y boiront pour un batz un grand verre d’eau-de-vie, de façon que l’on voit souvent les ivrognes décriés aussi ivres qu’auparavant.

Rapport de Monsieur le Procureur général, Joel Matile, du 13 décembre 1825

La requête présentée au Conseil d’ Etat par la commune de la Chauxde-Fonds le 14 juin dernier pour la prier d’aviser aux moyens les plus efficaces pour remédier aux inconvénients graves provenant de la multiplicité croissante des débits de vins et liqueurs n’a pas sans doute signalé un mal inconnu du Gouvernement. Elle a été envisagée comme une nouvelle manisfestation d’un sentiment devenu général dans toute la partie saine de la population et qui plus bas degré par les membres même de l’administration. Le fait lui-même et ses déplorables conséquences sont également avérés. On voit par le tableau déposé à la Chancellerie qu’il y a soixante ans le nombre des cabarets s’élevait à 250. Aujourd’hui les feuilles de resensement en indiquent plus de 500. Soit le double, mais le nombre réel va beaucoup au-delà, car non seulement celui des débits clandestins, aux montagnes surtout, est considérable, mais à la Chaux- de-Fonds seule, on compte outre les cabarets soixante cafés; enfin les boutiques d’épicier, de boulanger et de pharmacien sont pour la plupart autant de lieux où ceux qui ont le goût de la boisson peuvent se livrer à leur penchant déréglé. Le métier de détaillant de vins et de liqueurs est devenu la ressource de ceux qui n’en ont plus d’autre, un ouvrier horloger ne peut-il plus gagner sa vie, il monte un cabaret, achète quelques meubles, prend à crédit chez un marchand en gros, et au bout d’un ou deux ans il se trouve absolument ruiné et tombe à la charge des fonds pieux. C’est surtout dans les endroits écartés que ces sortes de gens établissent leur cabaret; tous moyens leur sont bons pour attirer les ivrognes et les débauchés qui recherchent aussi de préférence ces sortes de lieux; les femmes dépravées en font des repaires de vices, et le long de la frontière, ils sont le rendez-vous des contrebandiers qui y attendent le retour de la nuit, et s’y livrent à tous les désordres qu’enfante l’oisiveté et la corruption. La situation même de ces cabarets, non moins que leur multiplicité paralysent l’action de la police, dix gendarmes ne suffiraient pas et il n’y en a qu’un seul dans la juridiction de la Chaux-de-Fonds et les cabaretiers ont mille moyens d’éviter toute surprise et de garder des buveurs une grande partie la nuit: ils se reportent sans inquiétude sur leur discrétion et les officiers ne se douteraient pas même de ces manoeuvres coupables si l’on entendait souvent au milieu de la nuit les cris, les jurements et le tapage de ceux qui sortent de ces lieux-là. A d’autres égard encore, non moins importants, l’exercice de la police devient impossible, c’est en vain que les administrateurs des fonds pieux interdisent les cabarets aux pauvres assistés, et que les débauchés et les prodigues sont interdits par le gouvernement avec défense aux hôtes de leur donner des boissons fortes, on ne les voit pas moins paraîtrejournellement dans un état dégoutant d’ivresse. L’usage des liqueurs est particulièrement funeste pour la classe des horlogers qu’elles rendent au bout de quelque temps incapables de s’occuper des parties délicates de leur art. Le système nerveux est attaqué, plus d’adresse, plus de fermeté dans la main; la misère survient, et ces êtres dont le moral n’est souvent pas moins attaqué par des lectures dangereuses que le physique par des excès habitude, sont prêts à se porter aux derniers actes du desespoir. De là sans doute une grande partie des suicides, dont la fréquence est déplorable dans nos montagnes. Le moment parait venu d’arrêter un mal aussi redoutable et au sujet duquel l’opinion de toutes les personnes qui ont à coeur le bien de leur patrie se prononce d’une manière de plus en plus forte et unanime, une réforme est vivement désirée par elles dans la généralité des montagnes. Les officiers du Locle et de la Chaux-de-Fonds y attachent aussi d’importance qu’ils y mettent de sollicitude et il a déjà près d’une annéee que Mr le Maire Sandoz a développé ses observations et ses vues à ce sujet dans une information détaillée jointe à ce rapport. Il a pris sur lui de faire fermer quelques uns des bouchons les plus mal famés, l’un des débitants a porté plainte à la bourgeoisie de Valengin qui par le fait seul qu’elle n’est plus intervenue auprès du Gouvernement, donne à connaître qu’elle sent le mal et ne veut pas s’en déclarer le protecteur. Enfin l’opinion des Audiences Générales sur cette matière est consignée dans le rapport qui leur fut fait le 24 juin 1818 par une commission chargée de l’examen de tout ce qui serait à l’assistance des pauvres et qui fut adopté par l’assemblée pour être mis sous les yeux du Conseil d’Etat. Voici les termes de ce rapport: » La commission a sincérement regretté de ne pouvoir proposé la réduction du nombre des cabarets dont la multiplicité est d’une des principales causes du désordre et de la misère publique. Cette réduction lui a paru blesser jusque à un certain point la liberté illimitée du commerce; elle espère toutefois que les corporations les plus jalouses de ce privilège provoqueront elles-mêmes des mesures pour empêcher que la première cause de leur prospérité ne devienne celle de leur ruine ». C’était déjà beaucoup obtenir des députés qui s’envisagent comme les défenseurs des libertés des particuliers comme de celles des corporations. L’expression du voeu de mesures restrictives, et la démarche faite par la communauté de la Chaux-de-Fonds pourrait être envisagée comme une réponse à cet appel mais la matière est celle du ressort des Audiences Générales, comme le conseil de cette commune paraît le penser dans sa requête? La liberté illimitée du commerce serait-elle blessée par une réduction du nombre des cabarets, et par quelles voies cette réduction devrait-elle s’opérer? Ce sont les trois questions qui méritent le plus sérieux examen. La principale sans doute et que les Commisaires de Audiences de 1818 ont bien sagement évité de trancher est celle du point jusqu’ auquel s’étend le droit d’un commerce libre acquis aux sujets de l’ Etat et spécialement aux bourgeois de Vallengin. L’examen de cette question doit précéder celui des mesures qu’il peut être convenable d’adopter pour atteindre le but; et de la nature même des mesures jugées nécessires dépend la question de savoir si le concours des Audiences est requis ou non par la constitution.

La première cause de prospérité du pays deviendrait celle de sa ruine comme s’exprimaient les Commissaires des Audiences, si la concession du Souverain qui assure aux habitants du Pays un commerce libre pouvait s’étendre dans un sens absolu et recevoir l’extension la plus illimitée. Mais il a été reconnu qu’une pareille opinion était aussi mal fondée en droit qu’elle serait injuste dans ses applications et funeste dans ses conséquences et que la liberté de commerce devait être nécessairement soumise à de nombreuses restrictions . C’est ainsi que le gouvernement a protégé le droit acquis aux moulins bannaux dans les diverses parties du Pays, prohibé les vins étrangers dans le vignoble,et interdit en tous temps et dans tout le pays l’entrée du bétail de France. La liberté de commerce peut et doit être restreinte quand l’intérêt public l’exige et comment cet intérêt pourrait être plus gravement compromis que par le mal dont on a signalé l’étendue. Ainsi on ne pourrait se fonder sur une liberté illimitée de commerce pour combattre une réduction du nombre des cabarets. Mais en examinant la question de plus près, on trouve de justes raisons que le droit d’exercer le commerce comprenne celui de tenir cabaret. Vendre du vin dans une cave en grande ou petite quantités comme on vend des marchandises dans un magasin ou dans un boutique, est évidemment toute autre chose que de tenir un lieu public dans lequel tous venants peuvent se rendre demander qu’on leur serve à boire et se tenir la journée toute entière aussi longtemps qu’ils ne commettent aucun désordre. I1 est sans doute loisible à tous propriétaires de maison de louer ses chambres comme il lui plait, à un boulanger de vendre du pain et à un boucher de la viande; mais celui qui loge et donne à manger à tout venant ne peut exercer cette industrie sans une permission de l’autorité. Si la liberté de commerce emporte le droit de donner à boire, pourquoi n’emporterait-elle pas le droit de loger et de donner à manger. Or c’est une règle invariable et inconstestée que personne ne peut tenir une auberge sans un octroi du Conseil d’Etat. D’après quel principe chaque sujet de l’ Etat aurait-il le droit d’établir un cabaret? L’opinion relachée qui semble avoir prévalu à cet égard n’a commencé à s’établir que depuis une époque peu ancienne et à mesure qu’on a perdu de vue les anciennes règles et les anciennes maximes de l’administration. Elles sont contenues dans un recueil de cent arrêtés rendus par les Conseil d’ Etat durant les deux derniers siècles, c’est-à-dire depuis l’année 1603 et qui est déposé sur le bureau du Conseil. Ce recueil d’arrêtés offre les résultats suivants qui ont le mérite d’être à la fois des principes et des faits, et par lesquels on voit que la bonne règle et la saine raison ont tracé la marche et dicté les décisions de nos pères en même tems que notre bonne et ancienne pratique a donné à la règle la fonction et l’autorité si nécessaire chez nous d’un usage établi et éprouvé. Le vendange du vin à pot et à pinte dépend de l’autorité de la Seigeurie et personne ne peut vendre vin de cette manière à moins qu’il ne soit de son cru sans une permission du Conseil d’ Etat ( arrêtés du 22 novembre 1603 -6 nov.1610 – 12 juin 1719 ).Les Justiciers comme toutes autres personnes sont soumis à cette règle ( 5 mai 1612) N.B. Le 6 déc. 1614, on décide même qu’aucun justicier ne pourrait tenir taverne et on fit fermer celle d’un justicier de Vallengin.

Tout sujet de l’ Etat a droit de vendre le vin de son cru en gros ou en détail, mais sans bouchon ni enseigne ( arrêts du 6 dec. 1603 – 2 sept. 1757 – 6 fév. 1758 ) à cette dernière date encore, un nommé Barbezat fut reconnu avoir le droit de vendre au détail à la Côte,aux- Fées, le vin du cru des vignes qui lui appartenaient, moyennant qu’il fit bien constater de l’identité du vin.

Le nombre de cabaretiers nécessaires dans chaque district était déterminé et les cabarets superflus retranchés et à cet effet on dressait de temps en temps des rôles nominatifs qui étaient mis sous les yeux du Conseil d’ Etat ( arrêtés du 3 nov. 1645 – 29 nov. 1652 – 17 juin 1704 – 10 juillet 1719 ) Le nombre de ceux qui pouvait vendre vin fut réduit à six pour le Vauxtravers le 8 nov. 1630, à cinq pour la Sagne le 9 nov. de la même année. Aux Geneveys-sur- Coffrane, le droit fut accordé comme un privilège exclusif à une seule personne le 9 mars 1637 , de même à Savagnier le 20 mars 1645 avec ordre à tous autres de fermer leur taverne. A la Côte-aux-Fées, le nombre des cabarets fut réduit à deux le 12 janvier 1739 et à deux aussi aux Bayards le 28 octobre 1754.

On n’accordait la permisssion de vendre vin aux personnes les plus capables et on attachait une telle importance à être bien informé sur ce point que 1′ on envoyait en tournée aux Montagnes et au Val de Ruz les principaux officiers, une fois le Maire de Neuchâtel, le Maire et procu reur de Vallengin, une autre fois le procureur général, le Chatelain de Thielle et le Maire de Vallengin . On demnadait aussi des attestations aux Communautés. (8 et 9 nov. 1630 – 12 février 1639 – 3 nov. 1645 29 nov. 1652 )

Ces mesures restrictives étaient prises à la sollicitation des peuples. Le 6 novembre 1610, on décida sur la représentation du Val-de-Ruz et des Montagnes que les cabarets et tavernes seraient supprimés partout, excepté dans les lieux où ils seraient nécessires pour les passants et étrangers, et pour faire noce tant seulement.Le 6 février 1654, la Bourgeoisie de Vallengin demanda qu’on fit le réglement des hôtes comme d’ancienneté. Le 19 janvier 1675, Villiers demanda la suppressior de deux vendages de vin qui étaient une source de débauche. Lignières n’en voulut plus qu’un en 1718 ( le 6 décembre) de même que la Côtesaux-Fées le 19 juillet 1735. Ce district obtint d’en avoir deux le 12 janvier 1739, un à chaque bout de la paroisse. Sur la requête des Planchettes, le nombre des cabarets y fut réduit à trois, le 15 avril 1802.

Les permissions de tenir taverne accordées par le Conseil d’ Etat étaient souvent restreintes à un temps limité comme une année ou quelques chars de vin ( 12 fév. 1639 – 8 mai 1643 – 7 fév. 1653 – 30 sept. 1653 – 7 fév. 1654 – 30 juillet 1654 ) La vente de vin sans permission était punie par une amende arbitraire ou quelques jours de prison, plus une amende de 30 à 50 livres avec menace d’un châtiment exemplaire en cas de récidive ( 26 août 1611 – 8 avril 1617 – 6 janvier 1619 -14 juillet 1620 – 28 nov. 1653 ).

On faisait prêter aux cabaretiers le serment d’observer les ordonnances de police ( 8 nov. 1630 – 9 mars 1637 )Les modifications à l’ancien serment furent approuvées par le rescrit de la Cour du 15 mars 1794 en même temps qu’elle règle que par essai l’heure de clôture serait fixée à 11 heures au lieu de 10 comme cela avait lieu auparavant ( 9 fév. 1767 – 18 juillet 1803 )

Les cabaretiers qui ne se conformaient pas aux réglements de police étaient châtiés et leur taverne fermée ( 27 mai 1606 -9 mai 1611 – 11 avril 1701 )

Enfin,il était de règle que l’on ne pouvait éluder la défense de vendre vin en détail en ayant ni enseigne ni bouchon et l’on n’en était pas moins réputé en contravention ( 30 mars et 31 mal 1784)

Après avoir rappelé l’ancienne règle suivie par l’administration à l’égard des cabarets, il est nécessaire d’examiner à quelles atteintes elle a été exposée le siècle dernier, et si les modifications qu’elle a essuyées ont compromis en quelque chose le droit de haute police du gouvernement. C’est en 1719 que la Bourgeoisie de Vallengin parait avoir constesté pour la première fois le droit dont il s’agit, en prétendant que ses bourgeois avaient celui de vendre vin sans que de la part de la Seigneurie on pût les en empêcher. Le Maire du Locle fit un rapport au Conseil d’ Etat à ce sujet le 28 mars, en annonçant que plusieurs personnes qui n’étaient pas même de la Communauté du Locle s’émancipaient à vendre du vin et à mettre des bouchons devant leur maison où il se commettait plusieurs désordres et scandales. Le Conseil chargea une commission de rechercher sur les manuels tout ce qui pouvait concerner le prétendu privilège des Bourgois de Vallengin, et sur son rapport, il fut arrêté le 10 avril qu’on ordonnerait au Maire du Locle de faire défense à tous les cabaretiers de donner à boire et à manger chez eux pour faire des écots, leur laissant cependant la faculté de vendre vin en pinte. C’était là une modification notable de l’ancienne règle d’après laquelle personne ne pouvait vendre en détail que le vin de son cru. Dans l’arrêt du 10 avril 1719, on reconnaissait à chacun le droit de vendre du vin par pinte, c’est-à-dire en détail en raison sans doute de la liberté de commerce mais on ne voulait pas que personne put donner à boire pour faire écot, c’est-à-dire tenir un cabaret et un lieu public sans une permission de l’autorité.La Bourgeoisie de Vallengin ne fut pas satisfaite de cette concession, elle réclama le premier mai et le 10 juillet contre la défense en demandant qu’il fut sursis aux poursuites commencés contre les récalcitrants; et sur le refus du gouverneur, elle le pria de se charger d’une lettre qu’elle avait l’intention d’écrire au roi pour l’informer du droit des bourgeois de Vallengin de trafiquer en pain, en vin, en sel etc… On ne voit pourtant pas que pour le moment la Bourgeoisie ait poursuivi ses remontrances; mais plus tard elle poussa bien plus loin ses prétentions. En 1784, la Seigneurie ayant fait défense à un Bourgeois de Vallengin nommé Elie Robert, domicilié à Hauterive de vendre du vin en détail, la Bourgeoisie réclama contre cette défense comme contraire à ses franchises et spécialement au premier des articles de 1709. Le 5 juillet, le Conseil d’ Etat lui répondit qu’elle donnait à cet article une extension dont il n’était pas susceptible et contraire à la pratique générale de l’Etat, et que les Bourgeois de Vallengin n’avaient point le droit d’exercer le commerce des vins en détail en vendant à pot et à pinte sans permission de la Seigneurie dans le district des Communautés dont ils n’étaient pas membres. La défense faite à Robert fut donc maintenue, et une nouvelle remontrance de la Bourgeoisie de Vallengin déclarée très mal fondée le 2 novembre de la même année.

En même temps que la Bourgeoisie de Vallengin manifestait ainsi ses prétentions croissantes, on ne peut disconvenir que le gouvernemnt ne se relachaiit de son côté à l’égard de la police qu’il exerçait précédemment. D’abord il abandonna aux officiers le droit d’autoriser ou non les vendages de vin; en déterminant ainsi qu’il le fit par les arrêtés du 12 et 17 juin 1719 que ces permissions devraient être accordées de préférence aux communiers du lieu et seulement à leur défaut aux sujets de l’ Etat non communiers et aux étrangers. Et ensuite il parût reconnai£re que le droit de permettre ou de défendre les vendanges de vin appartenait aux communautés elles-mêmes; en déclarant par son arrêt du 12 avril 1762 que la Communauté de St Blaise n’avait fait qu’user du droit qu’elle avait, de même que toutes les autres communautés de l’Etatlorsqu’elle avait fait défense à Emer Girard habiatnt au dit lieu de continuer à débiter du vin en détail.

Néanmoins et malgré tout ce qui s’est passé dans le XVllle siècle, on peut soutenir que les anciens droits du gouvernement en ce qui concerne les cabarets sont restés dans toute leur force. Et d’abord,quant aux droits des bourgeois de Vallengin, résultant du premier article particulier de 1707 portant qu’ils peuvent librement trafiquer en pain en vin etc., il est évident en soi, prouvé par tout ce qui précède, maintenu et déclaré à cette bourgeoisie après un mur examen; enfin reconnu réellement par cette Bourgeoisie elle- même, puisqu’éconduite par le Conseil d’Etat, elle abandonna les remontrances qu’elle annonçait vouloir porter aux pieds du trône, que les droits dont il s’agit ne s’appliquent absolument qu’au commerce proprement dit et ne comprennent nullement le droit de donner à boire pour faire écot et de tenir cabaret.

Et quant au droit exercé par les Communautés du Pays de permettre ou de défendre le vendange de vin dans leur district, on ne peut l’envisager que comme une dérogation que le Conseil d’ Etat a jugé sans inconvénient de leur faire en certain temps de son droit de police à cet égard, droit qu’il a d’ailleurs toujours maintenu et souvent exercé dans bien des cas particuliers, et qu’il peut inconstablement retiré entièrement à lui, si le bien de l’ Etat lui fait juger nécessaire d’exercer directement cette partie de police.

Ainsi en résumé, le droit de vendre en gros ou en détail le vin de son cru a toujours été et reste acquis à tous les sujets de 1’Etat; celui de faire le commerce même en détail de tout vin indistinctement a été reconnu à l’ancien comté de Vallengin par les articles de 1707 et ensuite par la déclaration royale de 1814 à tout le pays excepté le Vignoble, selon que cela a été règlé par l’ordonnance de 1820. Mais personne ne peut donner à boire pour faire écot, ni tenir cabaret sans une permisssion expresse de la Seigneurie; sauf pour ce qui concerne la Ville de Neuchâtel où ces permissions dépendent des Quatre Ministraux à raison de leur droit de police.

L’état légal et constitutionnel de la question étant une fois déterminé, ainsi qu’il paraît l’être suffisamment par tout ce qui a été allégué, il convient de traiter le second point que l’on s’est proposé d’examiner de savoir quelles sont les mesures convenables pour remédier au mal qui afflige le Pays, et on peut dire qu’elles découlent d’elles-mêmes de ce qui précède, et que puisqu’il faut qu’il y ait des cabarets, le parti le meilleur et le plus simple est d’en réduire le nombre autant que les besoins du Pays le comporteront et de ne les laisser tenir que par des gens honnêtes et sur lesquelson puisse compter pour le maintien de l’ordre.

La troisième des questions proposées, celle de savoir si le concours des Audiences est nécessaire ou non, paraît aussi déjà résolue. I1 est évident qu’il y a nullement lieu de faire intervenir les audiences au sujet de mesures qui ressortent entièrement de la police du gouvernement comme sont celles que l’on propose d’adopter. Mais c’est ici la place de parler d’une mesure d’un au. tre genre qui prendrait un caractère législatif, savoir une imposition sur les cabaretiers. Un grand nombre d’Etats et plusieurs cantons suisses non voisins ont admis ce moyen mais des considérations prépondérantes paraissent devoir le faire entièrement écarter chez nous.

Quel est le but que le gouvernement se propose? Ce n’est pas de se procurer de l’argent, mais d’améliorer les moeurs publiques. Or le but et le résultat de pareilles impositions sont presqu’uniquement de se procurer un revenu. Avec un pareil régime, on accorde le droit de tenir un cabaret à ceux qui peuvent et veulent payer et point du tout à ceux qu’on juge plus honnêtes et plus amis de l’ordre; En second lieu on sait qu’une grande partie des Communautés du Pays perçoivent déjà une imposition pareille de non-communiers auxquels elles accordent la permissian de vendre vin. L’établir maintenant au profit de l’Etat paraitrait dépouiller ces communautés et les priver d’une ressource; exiger qu’elles la perçussent pour elles-mêmes de leurs communiers serait inexécutable en partique. D’ailleurs et en troisème lieu, nous voyons tous les jours que les jets de 2 ou 3 Louis imposés ainsi par des communes à des habitants détournent nullement ceux-ci de vendre vin. Une faible imposition serait donc tout à fait inefficace et une imposition élevée serait inadmissible; car et c’est ici la quatrième considération, toute imposition mise sur un débitant de vin est mise en réalité sur le vin qu’il débite. I1 y a plus, c’est que l’imposition n’équivalut elle qu’à la lOe partie d’un creutzer par pot, le cabaretier ne manquerait pas d’élever son prix d’un creutzer au moins; et au lieu d’accuser de ce renchérissement l’avidité du cabaretier, on me manquerait pas de l’imputer à la mesure du gouvernement. Et dans un Pays où au moyen-âge déjà l’omguelt s’appelait le mauvais denier, et dont les habitants ont payé jadis pour s’en affranchir, la mesure serait tellement impopulaire ques jamais les Audiences , si opposées déjà à tout impôt, ne souscriraient à celui-ci. Et puton l’obtenir, son adoption, ou même la simple proposition qu’on en ferait, détruirait complétement le caractère bon et paternel qu’il importe extrêmement au gouvernement de donner aux mesures qu’il prendra pour la réduction des cabarets, caractère qu’elles auront réellement si on les restreint aux mesures administratives dont on a parlé et qui sont de la compétence exclusive du Conseil d’Etat.

Mais après les trois points dont on a traité, il en reste un fort essentiel à examiner de près. Plus le mal auquel il s’agit de remédier est grave et étendu, plus la nécessité de l’arrêter augmente dans l’intérêt du Pays, plus les moyens en paraissent simples et sûrs à la fois, plus il faut user de prudence et de ménagement dans leur application.Une grande réduction, de moitié, des deuxtiers peut-être sera nécessaire; mais vouloir l’opérer d’abord et d’un seul coup serait 7 premièrement impraticable,on ne saurait sur qui frapper et on frapperait au hasard, deuxièmement injuste et ruineuse pour deux ou trois cents familles auxquelles on ôterait subitement ce qu’elles regardent comme leur gagne pain.Troisièmement et par la même très inconvenante et propre à faire manquer le but et à échouer parce que tous ceux dont l’existence serait ainsi compromise, élèveraient de toutes parts des réclamations et que les corporations auxquelles ils appartiennent ne manqueraient pas de les appuyer chaudement, celle de Vallengin en particulier qui arguant du fait au droit, et d’une mesure mal prise en faveur d’un prétendu privilège, agirait dans le double but de faire manquer celle-là pour donner à celui-ci une plus grande consistance. Ainsi afin de prévenir cet inconvénient, d’éviter toute secousse et injustice, d’ôter aux corporations-tout sujet de remontrances, et même s’il se peut aux intéressés un motif de réclamer,il conviendrait de mettre tous les cbaretiers existants pour ainsi dire hors de cause et de se borner dans ce moment à arrêter immédiatement le mal, en statuant ainsi que cela aurait lieu dans le proiet d’ordonnace cy-joint, que peronne ne pourrait tenir un cabaret sans une permission expresse du Conseil d’Etat, en chargeant les officiers des Juridictions de dresser le rôle nominatif de tous ceux qui exercent ce métier, et faire un rapport au Conseil sur le nombre auquel il conviendrait de réduire ceux de leur juridiction. Ce rapport une fois discuté et l’étendue de la réduction qu’il conviendrait d’opérer une fois fixée en principe, le Conseil aurait un point de mire pour se diriger, le nombre des cabaretiers irait en diminuant chaque année; à mesure que l’un d’eux mourrait ou changerait de vocation, ou qu’à raison de désordre et mauvaise conduite, leurs débits de vin viendraient à être fermés par ordre du Conseil d’Eta-t, lequel appliquerait plus souvent et préférablement cette peine à l’égard des gens une bien avertis, et à moins de circonstances particulières n’accorderait plus de nouvelles permissions de vendre vin que lorsque le nombre des cabarets serait réduit au point où il aurait été jugé convenable, et n’accorderait ces permissions qu’à des individus honnêtes et amis de l’ordre,et pour aussi longtemps qu’ils ne donneraient pas des sujets de plainte.

Tels sont les moyens qui paraissent être présentés au Conseil d’ Etat , comme propre à remédier à un mal très grave, et qui attaque dans leurs bases la prospérité et la morale publique.

Dire sur la requête de la Chaux-de-Fonds tout en lui témoignant sa satisfaction des sentiments qui l’ont dictée, que le Conseil d’ Etat lui fait savoir qu’ila été pourvu à son objet par l’arrêt rendu à la date de ce jour.

Rapport de Monsieur le Procureur Général Joel Matile, cy devant archiviste, laquinzaine à la Chancellerie, 27 déc. 1825.

Articles concernant les cabarets et pintes tirés des Manuels du Conseil d’ Etat de 1603 à 1809

22 octobre 1603
A été dit que chaque officier envoyera par mémoire tous les hostes tenant taverne ou cabaret rière sa charge et advis de ceux que l’on pourra permettre de vendre vin afin de reprimer l’abus qui se commet par la trop grande quantité qu’il en est partout le pays.

6 décembre 1603
Il a été dit qu’il sera défendu aux Cabartiers et Hostes superfluz de plus vendre vin pour les divers abuz et maux qul en arrivent,et sera pareillement advisé que personne ne débite vin à la maison si ce n’est les hostes ordinaires, qu’il ne soit de son cru, mais seulement par pinte, sans soustenir ni loger personne.

28 février 1604
Sur ce qu’à esté proposé qu’à l’occasion du désordre qui est en la Sgrie de Vallengin la plupart des familles et ménages sont déserts et les autres ne sont pas loin de leur ruine par le trop de chicanerie en procès et artitrage et de dissolution et débauche aux tavernes et cabarets. I1 a esté dit que pour y remédier entant que faire se pourra que mandement sera décerné aux officiers et mayres de la d Sgrie ( suit ce quia rapport aux procès). Pareillement de retrancher la plus grande part des tavernes et hostelleries et à celles qui resteront connues propres, y afficher un tableau des mauvais ménagers et dissoluz pour Ieur défendre de les charger plus d’un écot, et de tenir de leur pain et vin trois ou quatre fois l’année, et sera entenu le Procureur de faire souvent la visite pour justifier les mesures que les d. hostes manient, et reconnoitre si le désordre est observé afin que ceux qui contreviendront soyent chatiés selon l’exigence et mérite du fait, et s’ils sont de justice démis de leur siège et rang.

27 mai 1606
Jaques Vitié pour avoir tenu taverne sans permission et donné vin le dimanche contre la défense à certains débauchés et auxquels les tavernes avoient été interdites, avec grand désordre; il a esté ordonné au Mayre de la Coste de luy défendre de vendre vin et en cas de refus et déobéissance de luy demander par justice qu’il soit eschu au bon vouloir de la Seigneurie.

6 novembre 1610
Sur la représentation des communes du Val de Ruz et des Montagnes, il fut répondu: Quant aux tavernes et cabarets que l’on fera cesser et oster partout hormis ès lieux et passages qu’il sera à propos et requis d’y en avoir pour la nécessité des passants et Etrangers et pour faire noce tant seulement, et ceux qui se voudront assujetir à tenir taverne leur seront prscrits certaines conditions comme de ne vendre pain ni vin que premier il ne soit taxé; de tenir vin à vendre tout le long de l’annce et autres semblables,

à peine aux contrevenants d’être chastiés, et ne sera permis à personne de vendre vin sans permission.

9 mai 1611
A été ordonné au Mayre de Rochefort de faire défendre à Claude Favre dit Bulle de tenir taverne, et de prendre information des excès qui se sont commis en son logis d’empuis qu’il a tenu taverne afin qu’il soit poursuivi au chatoi du désordre dont il sera la cause.

Il a été ordonné au Procureur Général de Vallengin de faire visite par toutes les communes et villages du Comté de Vallengin pour savoir combien il y a d’hostelleries ou tavernes soit cabarets à chaque village afin que s’il s’en trouve d’autres que ceux qui sont été nommés et ordonnés il les fasse châtier et cesser de vendre vin, comme aussi pour reconnoitre l’ordre que ceux qui sont été établis pour vendre vin tiennent afin aussi que s’ils ne se sont conformés ou conforment à la Police et aux réglements qui ont été pour ce regard dressés, il les fasse aussi cesser et chastier.

26 août 1611
Ordonné au Mayre du Locle de poursuivre par Justice ceux qui vendent vin rière sa charge sans licence de la Seigneurie , à l’amende arbitraire d’icelle.

5 mai 1612
Il a été dit qu’aucun justicier ne tiendra taverne ni personne autre que par le seul autorité et licence de la Seigneurie et en cas qu’il y aye quelqu’oppositions par quelque corps de Commune ou personne privée de la poursuivre et faire condamner par justice et déchoir de leurs oppositions.

11 février 1612
A été ordonné au Procureur de Vallengin de poursuivre exactement contre ceux qui vendent vin sans licence et permission de la Seigneurie, et d’autant que les dits Justiciers dudit Vallengin sont partiaux et suspects, fera venir renfort de juges
tant de la Châtellenie de Thielle que de Rochefort.

6 décembre 1614
Il a été arreté que les Justiciers ne vendront ni ne tiendront taverne et partant défendre à Ab. Ewarre de Chésard de tenir taverne.

4 septembre 1618
Mandement au Lieutenant de la Sagne pour faire descendre les hostes dudit lieu à Mardy prochain.

6 janvier 1619
Pierre Vesin du Locle mis en prison à Vallengin pour avoir vendu vin contre les défenses et autres fautes par luy commises, payera 30 livres d’amende pécuniaire.

8 avril 1617
Sur les plaintes faites contre le sauthier de Vallengin pour avoir vendu vin contre les défenses à luy faites, a été dit qu’il sera mis en prison un jour et une nuit, mais d’autant qu’il en a encore quelque reste luy a été permis de le vendre à condition que par cy après il s’en déporte sur peine d’être démis de sa charge.

14 juillet 1620
Jean Montandon mercier de la Chaux de Fonds pour avoir tenu taverne et vendu vin contre la defense de la Sgrie a été dit et arrêté qu’il payera 50 livres d’amende pécuniaire, et cependant luy est interdit et deffendu plus vendre vin à peine d’être chatié exemplairement.

15 mars 1625
Permis à Abram ffeu Jaques Matthey notaire du Locle de vendre vin et tenir taverne en sa maison dud lieu; en observant l’ordre et réglement cy devant été dressé pour les hostes à quoy est ordonné au Sr Mayre du Locle d’avoir l’oeil et tenir main qu’il soit observé et ensuyvi.

26 juillet 1624
Le règlement des hôtes des Montagnes sera maintenu et a été ordonné au sieur Guy de poursuivre aux demandes qui ont été formées contre tous ceux qui y ont contrevenu.

8 novembre 1630
Sur la défense faite naguère de vendre vinsans permission expresse, le d. Sieur Lieutenant ( du Vauxtravers) a représenté la nomination de ceux qui selon les lieux et personnes sont jugés les pluscapables rière le d. lieu, ont été élus et retenus Abram Petitpierre et Pierre Favre de Couvet, Jean Berthoud de Plancemont, Georges Guergil, Georges Vaucher de Fleurier, Louis Bouher de St Sulpice qui prêteront le serment requis.

9 novembre 1630
Le Sr Mayre de la Sagne a représenté ceux qu’il a jugé nécessaire pour tenir logis, desquels sont été choisis et retenus nommément Hugues frère du Sr Lieutenant Convert à condition il se déporte d’advocassement et assistance de causes, et le secrétaire David Convert, proche l’Eglise, David la Bille juré sans aucune conséquence, à Boinod Jean Vuille, à la Loge Esaye Vuille juré aussi sans préjudice de la défense aux dt. jurés de vendre vin.

9 mars 1637
Accordé à David Perregaux notaire des Geneveys sur Coffrane privilège de tenir taverne seul aud. lieu, à la charge de prêter serment pour l’observation des règlements qui luy seront prescrits.

6 juillet 1637
Accordé à Josué De La Chaux de vendre vin pendant que la garde des frontières durera, notamment au Dazenet et passage chez les Gendre, le tout sous les règlements ordinaires.

19 mars 1628
Il a esté arrêté que mandement sera publié et adressé au Mayre des Verrières pour règlement des tavernes, conformément aux anciens et à la charge que les hostes ne seront recevables à faire aucune action contre qui que ce soit pour les écots et dépenses qu’ils auront baillé à crédit.

12 février 1639
Accordé à requête de Pierre Gallon permission de vendre vin à Savanier pour un an et sous bon vouloir sous l’attestation de la Commune.

mai 1643
Sur requête de Josué Borquin de Savagnier aux fins d’avoir permission de vendre vin aud. lieu, accordé pour un an seulement

8 novembre 1645
A requête de Moyse Richardet aux fins de révoquer la défense à luy faite de ne plus vendre vin et luy permettre led. vendage pour gagner sa vie.- Ordonné Mr le Mayre de Neuchâtel, Maire et Procureur de Vallengin pour se transporter rière le Vaux de Ruz et Montagnes pour prendre information de ceux qui seront les plus capables et la quantité d’hostes qui seront nécessaires rière chaque lieu afin de le rapporter pour y être pourvu.

20 mai 1645
Sera défendu à Josué Borquin et à tous autres vendant vin à Savagnier de quitter led. vendage pour avoir baillé permission au Sr David Girard à l’exclusion de tous autres.

16 juin 1645
Sur la requête de la Communauté de Savagnier aux fins d’accorder à Josué Borquin de pouvoir tenir logis public et vendage de vin au dit lieu outre celui que tient le secrétaire David Girard. Econduit jusqu’à ce qu’il aye fait paroitre de l’obéissance rendue sur la défense qui luy a esté faite par l’officier du lieu de pratiquer taverne.

18 novembre 1652
Ordonné en faveur de ceux des Geneveys sur Fontaine qu’ils produiront la permission sur laquelle ils se réfèrent d’avoir un hoste seul en leur village pour y être pourvu plus outre.

29 novembre 1652
Ayant été cy devant député des Sr . du Conseil d ‘Etat et autres officiers qui de voient reconnoitre tous les lieux nécessaires au Comté de Vallengin auxquels doivent être établis hôtes nécessaires et les cabarets superfluz retranchés ont été de nouveaux députés en place des décédés les sieurs Tribolet Chatelain de Thielle, Pierre Chambrier Procureur Général et Henri Hory Maire de Vallengin auxquels en sera donné mandement qui leur confèrera le pouvoir nécessaire pour cette affaire.

19 février 1653
Concédé à Moyse Vuilleumier de Villiers au Vaux de Ruz de tenir quelques quantités de vin chez lui pour en débiter aux allants venants et nécessiteux sans abus ni conséquence et sous les mandemnts rafraîchis et règlements sur ce sujet.

7 février 1653
Suzanne veuve de feu honn. Guillaume Convert de la Sagne suplie être établie au vendage de vin qu’elle a cy devant exercé eu égard à sa maison propre et commode sur le crêt dudit lieu. Concédé pour une année gratuitement sous les règlements établis avec défense de continuer plus avant sans concession expresse et légitime et sans conséquence.

4 mars 1653
Accordé à Abram ffeu David Perret de la Sagne de débiter à pinte le vin qu’il a eu d’Abram Marchand de Boudri à change de graine, gratuitement et sans conséquence.

30 septembre 1653
Mgr le Gouverneur a permis à Pierre Humbert Droz Marchand de débiter le vin qu’il a et prendra en payement de ce que lui est dû pour marchandise ou à change d’icelle, en observant les ordres établis et rafraîchis auxquels mon Sgr n’entend déroger et pour une année.

28 novembre 1653
Entendu le Sr Maire des Brenets en plainte contre David Quartier La Tante dud. Lieu pour ses déobéissances jurements et tavernagë et refus du droit de Justice. I1 lui est défendu de vendre vin après avoir débité ce qu’il a et pour exemple il tiendra prison pour deux jours à Vallengin payant ses frais et amendes de Justice dont il faisait refus.

6 février 1654
A particulièrement suplient ( les Bgs de Vallengin) aussi vos Grandeurs à ce que finalement il soit pourvu au règlement des hôtes comme l’ancienneté selon la décrétale et coutumier, vu la confusion et désordre qui se multiplie de jour à autre au scandale et à la désertion du pauvre peuple. ( réponse) I1 y sera pourvu par ceux qui au nom de S.A. y ont été commis de la part de Mgr le Gouverneur.

7 février 1654
Le débit à pinte de quatre chars de vin a été accordé à Pierre Billon des Brenets.

30 juillet 1630
Accordé pour une année le vendange de vin à David Chédel des Verrières sous les ordres établis et renouvellés.

7 mai 1667

Quoi qu’on ait ordonné mardy passé an Conseil à Mr le Procureur de porter sur les parties casuelles les collocations eues au Décret de Jacob Bevaix pour tavernage de vin sur la requête aujourd’hui présentée par le fils dudit Bevaix au nom dudit son père, on la luy a remise pour la somme de 30 livres qu’il payera promptement en la recette des parties casuelles. En vertu de quoy le Sr Maire des Brenets luy relâchera les dites collocations.

5 février 1669
Sur la requête du Sr Pierre Quartier lieutenant des Brenets aux fins de tenir quitte des 12 livres que le Sr Receveur des Casuels luy demande pour chaque année depuis qu’il vend vin, sous prétexte que feu Mgr le Gouverneur luy bailla la permission à cette condition. Surquoy ayant considéré ses raisons là dessus, assavoir que les autres hôtes de qui on prétextoit aussi exiger la même chose n’en ont rien payé. Il a été dit qu’il ne sera pas obligé de rien payer pour la d. permission
baillée.

19 janvier 1675
Sur la plainte que le Justicier Jean Favre de Villiers a faite au nom de la Commune
dud. lieu contre deux cabaretiers qui vendent vin aud. Villiers qui sont cause que les jeunes gens et autres s’adonnent à la débauche et aux vices, priant d’interdire ces vendages de vin ou y apporter autrement les remèdes convenables, on a ordonné à Mr Chambrier Conseiller d’ Etat Maire de Vallengin d’y apporter les remèdes convenables.

11 mars 1673
Sur la requête de ceux de Rochefort qui prient la Seigneurie de confirmer l ‘Edit qu’ils ont fait portant défense à qui que ce soit de vendre vin à Rochefort à peine de payer 15 livres par chaque fois. Après avoir délibéré sur cette affaire et considéré qu’il n’appartient à la Commune de faire de semblables règlements, il a été dit qu’on met ce réglement à néant et on deffend aux d. de Rochefort d’en faire à l’avenir de semblables à peine d’être chatiés.

25 novémbre 1685
Sur l’abus qu’il y a rière le Val de Ruz par le nombre excessif de cabarets qu’il y a et qui ne vont qu’à la ruine des sujets de S.A.S. Mr le Gouverneur ordonne à Mr Chambrier Conseiller d’ Etat et Maire de Vallengin et au Sr de la Tour receveur des parties casuelles Justicier de Vallengin de prendre des informations et faire faire un rolle de tous ceux qui vendent vin pour après avoir été vu et entendu être avisé ce qui sera à faire pour y établir un meilleur ordre.

30 novembre 1686
Sur la requête présentée par les Gouverneurs de Rochefort contre des particuliers qui vendent vin dans le dit lieu, il a été dit qu’avant que de rien ordonner là dessus, les suppliants feront citer ceux dont ils se plaignent au prochain Conseil pour y être entendus.

8 décembre 1686

Sur la requête des Gouverneurs de Rochefort aux fins d’empêcher le Sr Carrel Greffier et d’autres qui vendent vin dans le dit lieu parce que cela diminue le prix de l’amodiation de leur maison de Commune; et qu’ils n’ont point d’autres revenus que cette amodiation pour payer les redevances seigneuriales et les charges de Commune. Après avoir entendu le Sr Carrel et délibéré là dessus, il a été dit que l’on défend à toutes personnes de tenir cabaret dans le village de Rochefort, excepté à l’amodiateur.

Et ce pour considérations susdites et autres contenues dans l’arrêt qui fut déjà donné le 24 février 1685. Toutefois sans que cela puisse tirer à conséquence, le présent privilège n’étant accordé à la Communauté que pour autant de tems qu’il plaira à la Seigneurie, et sans exclure personne de vendre vin en pinte.

7 juin 1687
Abram Renaud a présenté requête au nom de la communauté de Rochefort aux fins d’empêcher le Sr Carrel greffier de donner à boire et à manger aux gens qui vont chez lui d’autant que cela préjudicide au Cabaretier qui tient leur maison de commune à louage. Mais on n’a rien ordonné là dessus.

7 juin 1687
Mr le Chancelier ayant demandé s’il doit expédier à Pierre Bonjour de Lignières la permission qu’on luy accorda le ler de mars dernier pour tenir hôtellerie et pendre une enseigne puisque la Communauté dudit lieu n’insiste plus pour avoir cette permission elle-même et qu’apparemment elle a abandonné le dessein. Il a été dit qu’il peut expédier la permission en faveur dudit Bonjour.

11 avril 1701
Sur l’examen fait des dépositions des témoins ouis aux enquêtes prises au nom de la Seigneurie par le Lieutenant en la Justice du Vauxtravers touchant les excès commis dans la maison d’Abram d’Yvernois sur la personne de Jean Jacques Jeanrenaud au sujet de la déposition qu’il avait faite en une autre enquête de Seigneurie. Après avoir considéré ce que contiennent les dites dépositions, fait réflexion sur les diverses plaintes qu’on reçoit de divers endroits à l’égard de la mauvaise conduite dudit d’Yvernois et des désordres fréquents qui arrivent dans sa maison sans qu’il en avertisse l’officier et délibéré, il a été dit qu’on ordonne au Sr Capitaine et Chatelain du Vauxtravers, lequel est maintenant sur les leiux qu’il ait incessament à faire défense aud. Divernois de plus vendre vin ni tenir cabaret soeu peine de désobéissance.

12 avril 1701
Sur l’instance faite par le Sr Jean Petitpierre de Couvet Justicier du Vauxtravers et Antoine Favre dudit Couvet en faveur d’Abram Divernois leur parent tant aux fins d’avoir communication de la procédure ou enquête prise au nom de la Seigneurie touchant la batterie arrivée cet hyver chez ledit Divernois, afin de faire déposer d’autres témoins que pour obtenir la levoe de la défense qui luy ont été faites de vendre vin. Après avoir délibéré il a été dit qu’après que ledit d’Yvernois aura satisfait la partie civile ou qu’il aura traité avec elle, on ordonnera sur la dite instance ainsi qu’il conviendra.

15 novembre 1702
Sur la requête d’Abram Divernois de Motiers aux fins qu’il plaise à la Seigneurie de lever la défense qui luy a été cy devant faite de vendre vin après avoir délibéré il a été dit qu’on veut bien accorder au supliant les fins de sa demande; en conséquence de quoy il pourra vendre vin, à la charge qu’il aura soin de faire observer un si bon ordre dans son cabaret qu’il n’y ait plus lieu d’en pouvoir faire des plaintes légitimes faute de quoy on luy défendra le vendage de vin pour toujours.

5 mai 1704
La procédure tenue au Locle le 2 de ce mois par le Sr Maire dudit lieu contre Jean Jacques Bayche, Joseph Dubois sauthier et Abram Renaud ayant été vue dans laquelle il y a une défense faite aux dits Dubois et Renaud de vendre vin. Après l’avoir examinée et délibéré, il a été dit qu’on lève la dite défense en attendant que le serment que devront prêter les hôtes soit règlé, permettant auxd. Dubois et Renaud de continuer à vendre vin à la charge qu’ils n’en auront que de celui du Pays sans qu’ils en puissent débiter de celui qui vient de dehors.

17 juin 1704
Il est ordonné aux officiers des quatre Mairies des Montagnes de Vallengin de faire incessament visite par gens de Justice de tous les vins des hôtes de leur Juridiction, et de les faire déclarer d’où ils l’ont afin d’en dresser un état qu’ils envoyeront d’abord à la Seigneurie aussi bien que celui du nombre des dits hôtes et de leurs noms, afin que les dits états étant vus et examinés, il soit ordonné là dessus ainsi qu’il appartiendra.

6 décembre 1718
Sur la requête de la Communauté de Lignièresdans laquelle elle expose que plusieurs personnes du dit lieu s’érigent en cabaretiers et vendent vin, ce qui favorisent les jeunes gens à la débauche et à commettre plusieurs scandales; elle suplie très humblement qu’il soit défendud’autorité à ces nouveaux cabaretiers de plus vendre vin et qu’il n’y en soit souffert qu’un qui est dans la maison de Commune dudit lieu.

Après avoir délibéré il a été dit verbalement au Sr Lieutenant dud. Lignières qu’il pouvoit leur faire faire cette défense de son autorité, et que ceux qui y vendront vin devront prêter le serment ordinaire que sont obligés de faire les hôtes et les cabaretiers, aussi bien que leurs femmes et enfants qui sont en âge.

28 mars 1719
Le Sr. Tribolet maire du Locle a représenté que plusieurs personnes qui ne sont pas même de la Communauté du Locle s’émancipent de vendre vin et de mettre des bouchons devant leur maison où il se commet plusieurs désordres et scandales. Requérant le d. Sr. Maire qu’il lui soit déclaré s’il ne peut pas faire défense à ces gens là de ne plus vendre vin comme ils ont fait jusqu’ici, puisqu’il y a suffisamment d’hôtes et cabaretiers dans ce dit lieu. Après avoir délibéré on a chargé Mrs Huguenin et de Montmollin tous deux conseillers d ‘Etat de chercher sur les manuels du Conseil tout ce qui pourra y avoir concernant le droit et privilège que prétendant la Bourgeoisie de Vallengin de pouvoir vendre vin sans que de la part de la Seigneurie on puisse les empêcher afin d’en faire leur rapport dès lundy prochain en huit.

10 avril 1710
Le Sr Maire Tribolet ayant été entendu comme il le fut déjà le 28 du mois dernier sur le sujet du grand nombre de cabaretiers qui s’établissent de leur autorité privée et sans la permission de la Seigneurie dans le village du Locle. Après avoir examiné l’importance de cette affaire et délibéré il a été dit: qu’on ordonne audit Maire de faire défense à tous les cabaretiers qui ne se sont pas établis sous l’autorité de la Seigneurie de donner à boire et à manger chez eux pour faire des écots à moins qu’ils n’en obtiennent la permission de la Seigneurie leur laissant cependant la faculté de vendre vin en pinte.

1 mai 1719
Mgr le Gouverneur a déclaré que les Sieurs Maıtres Bourgeois de Vallengin l’ayant prié jeudy dernier de vouloir surseoir de 15 jours l’exécution des ordres donnés en Conseil d’ Etat le 10 du mois dernier au Sr. Maire du Locle de défendre aux cabaretiers dud.lieu qui n’en ont pas obtenu la permission de la Sgrie de continuer à vendre vin comme ils l’ont fait du passé, puisque sur les remontrnaces que les dits cabaretiers leur ont faites sur la susdite défense ils sont obligés d’en informer le Conseil de la Bourgeoisie et recevoir ses ordres là dessus; il leur avoit accordé leur demande.

10 juillet 1719
La Seigneurie voulant être informé du nombre d’hôtes et cabaretiers qu’il y a dans les mairies dela Sagne, des Brenets et de la Chaux de Fonds, il est ordonné aux officiers des dits lieux d’en faire faire un état juste et fidèle pour l’envoyer ensuite à Mgr. le Gouverneur.

10 juillet 1719
Mr le Cons. Hory a fait rapport que mercredy dernier les Sr. Maîtres Bourgeois et Députés du Conseil de la Bourgeoisie de Vallengin étant descendu pour faire remontrance à Mgr. le Gouverneur sur le sujet des ordres qui ont été cy devant donné au Sr Maire du Locle de défendre à tous ceux de la Juridiction qui vendent vin sans la permission de la Sgrie de le plus faire à l’avenir. Mais comme Mgr le Gouverneur étoit à la campagne, ils s’adressèrent à mon d. Sr. Hory comme doyen du Conseil d’ Etat et lui dirent que le Conseil de la Bourgeoisie ayant été informé par quelques particuliers de la défense à eux faite de plus vendre vin sans en avoir au préalable obtenu la permission de la Sgrie. , il avoit trouvé que cette défense intéressant les liberté et les franchises des Bourgeois de Vallengin il avoit envoyé des députés pour prier la Sgrie qu’il fut imposé silence au Sr Maire du Locle sur les demandes qu’il a formées à Abram Humbert et à la soeur de David Tissot habitant aud. Locle pour avoir l’ordre venu aux dites défenses; mais d’autant que mon d. Sgr le Gouverneur n’étoit pas en ville,ils prièrent mon d. Sr le Conseiller Hory d’ordonner au d. Sr. Maire de surseoir les demandes jusqu’à ce qu’ils eussent fait leur très humbles remontrances à mon d. Sgr. le Gouverneur, ce qu’il luy accorda.Après avoir ouy le d. rapport aussi bien que ledit Sr Maire du Locle qui s’est trouvé ici, et délibéré, il a été dit que les dits deux particuliers ayant eu tort de ne pas obéir aux d. défenses, le d. Sr. Maire poursuivra aux demandes qu’ils leur a formées.

15 août 1719
Mgr le Gouverneur a fait rapport que les Srs Maîtres Bourgeois et Députés du Comité de la Bourgeoisie de Valengin allèrent ces jours passés le trouver à Montmirail où il étoit et lui firent de la part dudit Conseil la remontrance dont Mr le Conseiller Hory fit rapport le 10 du mois dernier, le prièrent d’imposer silence au dit Maire du Locle sur la poursuite qu’il fait contre les deux particuliers dont il est fait mention cy devant sous la date susdite du 10 du mois dernier, ce que n’ayant voulu lui accorder, il le prièrent de vouloir se charger d’une lettre que led. Conseil de Bourgeoisie vouloit se donner l’honneur d’écrire à Sa Majesté pour l’en informer du droit que les Bourgeois ont de trafiquer en pain, en vin, en sel etc, et la supplier très humblement de vouloir conserver dans leurs droits et franchises dont ils ont usé et joui sans empêchement jusques à présent. Après avoir délibéré, il a été dit que lorsqu’on aura vu la copie de la lettre que la dite Bourgeoisie écrire au Roy on prendra alors telles mesures qu’il conviendra.

21 mars 1719
Ayant été cy devant jugé à propos de faire un tarif pour le payement du droit de transmarche des vins étrnagers qui passeront par cet Etat. Après avoir délibéré, il
a été dit:

 

Que la queue de vin du Duché de Bourgogne payera

batz 30

la demi queue dud. vin payera

15

le quart de queue dud. vin payera

7 ½

la queue de vin du Comté de Bourgogne payera

20

la demi queue dud. vin payera

10

le poinçon ou carry simple de vin d’Arbois payera

7 ½

le double poinçon ou double carry dud. vin payera

15

12 juin 1719
Sur la requête de Maurice Cosseville de Zofingue habitant aux Verrières aux fins qu’il lui soit permis de continuer à vendre vin, aussi que du pain et de la viande, comme il a fait depuis quelques temps en ça nonobstant la défense qui luy a été faite par la Générale Communauté des dites Verrières; ou que si on ne trouve pas à propos de luy accorder sa d. démarche pour tous le tems qu’il résidera aux d. Verrières, on veuille bien lui permettre au moins d’achever de débiter les denrées dont il est encore pourvu dans sa maison. Après avoir entendu le Secret. Vuittel au nom de la Gnle Communauté des d. Verrières et délibéré, il a été dit que le vendage du vin à pot et à pinte dépendant de l’autorité de la Seigneurie; on permet audit Cosseville de vendre encore vin pendant trois mois comme il a fait jusques ici, afin que pendant le temps il puisse débiter les denrées qu’il a dans sa maison, après quoi il ne luy sera plus permis.

12 juin 1719
Sur l’instance faite par la veuve et hoirs du Sr. Jonas Breguet et par la femme de Jean Louis Meuron, habitantes aux Verrières, aux fins d’enlever d’autorité les défenses qui ont été faites aux suppliantes de vendre vin, boulanger, faire boucherie et tenir boutique ouverte, sous prétexte qu’elles ne sont pas communières dud. lieu, et qu’elles soient maintenues aux mêmes droits et avantages dont elles ont joui jusqu’à présent. Après avoir vu la requête que le secrétaire Vuittel a présenté au nom des cinq communes qui composent la Générale Communauté des Verrières, priant d’être maintenues auprès de l’arrêt du Conseil d’ Etat du 21 mars dernier, lequel elles ne croient pas avoir outrepassé envers les d. Breguet et Meuron, oui contradictoirement les dites parties et délibéré, il a été dit: qu’on ordonne aux d. Communautés de renvoyer incessamment à la Chancellerie le sus dit arrêt du 21 mars dernier en application duquel on déclare qu’on n’a point entendu comprendre les d. femmes Breguet et Meuron dans la dénomination d’étrangers dont il est fait emntion, puisqu’elles sont sujettes de l’Etat, outre que leurs maisons sont privilégiées par les enseignes que la Sgrie a permis qui y fussent pendues. C’est pourquoi on ordonne aux dites communautés de ne les plus inquiéter à l’avenir pour le sujet susdit. Et pour ce qui est des bouchons, ou du vendage de vin à pot et à pinte, comme cela dépend de l’autorité de la Seigneurie, le Sr. Maire en devra donner la permission sous cette réserve que s’il y a des communiers du lieu qui veulent vendre ou qui vendent actuellement du vin à pot ou à pinte, il devra le leur permettre préférablement et par exclusion aux étrangers non sujets de l’Etat. Et pour ec qui concerne la femme de Jean Louis Meuron et le voyage que cette affaire luy a causé, les dites cinq communes luy devront délivrer un écu blanc pour remboursement de ses frais.

19 juin 1719
Les cinq Bourgeaux de la Générale Communauté des Verrières ayant de nouveau présenté requête aux fins d’être maintenu auprès de l’arrêt qui leur fut donné le 21 du mois de mars dernier; ou qu’en explication de celui qui fut rendu le 12 de ce mois sur les requêtes et instances de la veuve et hoir de Jonas Breguet et de la femme de Jean Louis Meuron habitantes aux d. Verrières, on accordat aux communiers de ce lieu les mêmes droits dans les autres communautés de cet Etat que l’on attribue à ceux qui en sortent pour venir habiter aux d. Verrières; que l’on enlevat la condamnation à un écu blanc de frais portée dans l’arrêt expédié à ladite femme de Jean Louis Meuron, que l’on ordonnat aux Officiers des d. Verrières de les protéger et maintenir lorsque pour raison de scandales de bien public ils seraient obligés de faire sortir des Etrangers de leur district, ou quand on gageroit quelque bête appartenant à quelqu’un des d. Etrangers sur leurs paturages communs, que l’on voulut bien étendre l’article de l’arrêt du 12 de ce mois où il est dit, que l’officier des Verrières devra donner les permissions de vin à pot et à pinte aux communiers du lieu préférablement par exclusion aux étrangers non communiers des Verrières, soit qu’ils soyent sujets de l’ Etat ou non. Que l’on dit aussi que la femme de Jean Louis Meuron ne pourroit avoir boucherie que pour l’usage de son hôtellerie tant seulement et qu’enfin à l’égard de la boutique, elle ne pourroit l’ouvrir et vendre la marchandise qu’aux jours de foires et marchés, à moins que pour ecla elle n’en traite et s’en accorde avec la Communauté. Les Députés des susdites cinq Bourgeaux des Verrières, toutes ces demandes apportées dans leur requête… après les avoir examinéees et avoir délibéré, il a été dit que pour le présent et jusqu’à ce que l’on trouve à propos d’en ordonner autrement, on ne eput rien changer au dit arrêt du 12 de ce mois; tel qu’il a été délivré à la dite femme de Jean Louis Meuron, le laissant subsister en tout son contenu , sous et excepté le dernier article qui règle les permissions que l’officier pourra donner pour vendre vin à pot et à pinte, et ordonne que les Communiers devront être préférés aux Etrangers et non nos sujets de l’Etat, auquel article on veut bien aussi comprendre les sujets mêmes de l ‘Etat qui ne sont pas communiers des Verrières; auxquels les communiers tant qu’iI y en aura suffisamment pour cela devront être préférés. Et comme les d. des Verrières en tant que sujets d’un même souverain, doivent aussi jouir dans le reste de l’ Etat des mêmes droits et privilèges dont les autres sujets de Sa Majesté jouissent chez eux, si quelqu’un est tombé dans l’exercice de ce droit ou y trouve de l’obstacle en quelque lieu de ce pays qui ne sera pas autorisé à ce faire par des privilèges ou concesssion particulière, il devra incessamment s’adresser à nous pour en obtenir satisfaction, à quoy nous pourvoirons d’une manière convenable. Ordonnant au surplus au Sr. Maire des Verrières soit à son lieutenant de ne souffrir dans l’étendue de sa juridiction, aucun étrnager dont la vie et la conduite soyent en scandale ou mauvais exemple, non plus que de ceux qui par leur misère ou fainéantise, ou par quelqu’autre raison sont à charge au public et détournent une partie des subventions qui seraient utiles et nécessaires à des gens du lieu, et de châtier exactement et sans support tous ceux d’entre les Etrangers dont Ies bêtes seront trouvés sur les paturages communs sans permission ou octroi obtenu pour cela de la générale Communauté.

10 septembre 1720
Le Sr François Fallet Député de la Communauté du Grand Bourgeau aux Verrières s’étant présenté a très humblement supplié qu’il soit ordonné à Maurice Gosseviller de Zofingue nonobstant la défense qui luy a été faite par arrêt du 12 juin 1719 de vendre vin aud. lieu plus de trois mois après la date dudit arrêt il n’a cependant pas laissé de continuer jusques à présent ce vendage de vin au préjudice des communiers du d. lieu. Après avoir délibéré il a été dit qu’on ordonne au Sr. Petitpierre maire des d. Verrières de prendre information s’il est vrai que ledit Gossviller ait vendu après les trois mois porter dans l’arrêt. Et au vu que cela soit, il le fera condamner comme réfractaire et désobéissant aux ordres de la Sgrie et luy fera ensuite commandement de sortir de cet Etat.

19 août 1732
La Sgrie ayant été informée de la mauvaise conduite et débauche de Jean Jaques Redard dit l’Allemand des Verrières, et qu’il serait nécessaire pour en arrêter le cours et l’empêcher de mettre sa famille à la mendicité de luy établir d’autorité un tuteur, et qu’à fin de prévenir la ruine totale de la Juridiction des Verrières, il luy plaise de faire supprimer au moins les 3/4 des cabarets, bouchons et vendeurs d’eau de vie qu’il y a en très grand nombre; comme aussi de donner des ordres convenables pour les crimes et délits soyent punis puisqu’il ne s’en faut guère qu’ils ne le soyent point du tout. Après avoir délibéré, il a été dit qu’à l’égard de Redard il est ordonné au Sr Petitpierre Maire des Verrières de s’informer exactement de sa conduite et au cas qu’elle soit telle qu’il est dit cy dessus, il luy fera établir un tuteur d’autorité et par connaissance de Justice, et pour ce qui concerne le reste il en informera le Conseil, afin qu’ensuite il soit donné les ordres qu’il convient.

19 juillet 1735

Sur la requête des Paroissiens de la Côte aux Fées aux fins que vu le grand nombre de cabarets qui se sont établis au d. lieu ce qui tourne au grand préjudice et à la ruine de plusieurs particuliers, il plaise à la Sgrie de les interdire tous ou au moins n’en laisser subsister qu’un seul, avec défense de donner à crédit aux enfants de famille pour plus de cinq batz. Après avoir délibéré il a été dit: que l’on accorde à la dite paroisse les fins de sa requête, ordonnant au Sr. Petitpierre maire des Verrières d’interdire à toutes sortes de personnes de vendre vin et tenir cabaret sans permission de la Seigneurie, laquelle ne sera donnce que pour un seul cabaret, n’étant pas à propos qu’il n’y en ait davantage, avec ordre au cabaretier de ne point donner à crédit aux enfants de famille sous peine à tous contrevenants d’être punis et châtiés ainsi qu’il conviendra , luy enjoignant d’y tenir exactement la main.

4 octobre 1735
Sur la représentation de Jaques Fallet de la Côte aux Fées, suppliant qu’il plaise à la Sgrie en révoquant en sa faveur la défense qui lui a été faite de vendre vin et tenir cabaret, luy permettre de continuer à le faire, sous promesse qu’il fait de se soumettre et exécuter exactement les ordres émanés de la Seigneurie par rapport aux cabaretiers et de dépendre son bouchon dés qu’on aura le moindre sujet de plainte sur sa conduite. Après avoir délibéré il a été dit que vu les bonnes relations que l’on a sur la conduite dud. Fallet, on luy accorde la permission de continuer à vendre vin à la Cote aux Fées, et cela pour autant de tems qu’il plaira à la Sgrie, sous condition qu’il se conforme soigneusement aux ordres et règlements faits tous les hôtes et cabaretiers de l’Etat, il prêtera en cette qualité entre les mains du Sr. Maire des Verrières le serment requis et accoutumé.

12 janvier 1739
Sur les représentations faites de la part de la Paroisse de la Côte aux Fées aux fins que vu les inconvénients qui résultent de la réduction faite des cabarets qu’il y avoit audit lieu à un seul, en ce qu’on vend le vin beaucoup plus cher et qu’il est très incommode pour les particuliers qui en ont besoin pour quelques cas pressants d’aller le chercher fort loin, il plaise à la Seigneurie de leur permettre d’en établir quelques uns de plus pour la commodité tant des habitants du lieu que pour les Etrangers qui y passent. Après avoir délibéré il a été dit: que l’on permet à la d. Paroisse d’avoir deux cabarets au d. lieu sans plus, l’un à l’extrémité de la d. Paroisse et l’autre à l’autre extrémité, soit auprès du temple si cela est plus commode et convenable.

11 décembre 1743
Ensuite de l’Evourtion accordée à Louis Wintrecht habitant de la Jonchère le 22 courant.- pour le giet – défendant au surplus aud. Wintrecht de continuer le vendange de vin qu’ilavoit entrepris jusqu’à ce qu’il se soit pourvu d’une permission de la Seigneurie qui elle seule peut l’accorder; et pour cet effet se présentant au Conseil, il sera ordonné là dessus ce qu’il conviendra.

28 octobre 1754
Sur la requête de la Paroisse de la Côte aux Fées aux fins qu’il plaise au Conseil de leur permettre d’exposer en monte le droit de vendre vin au profit de lad. Paroisse, et qu’il ne puisse y avoir que deux cabarets aud. lieu en se choisissant les gens capables et d’ordre pour ce fait, surquoy après avoir entendu le Sr. Bole lieutenant en la Justice des Verrières et délibéré, il a été dit que l’on accorde à la Paroisse suppliante les fins de sa requête, Et en conséquence on leur permet d’exposer en monte publique au plus offrant et dernier enchérisseur le droit de vendre vin au profit de lad. Paroisse, moyennant qu’elle se choisisse deux cabaretiers qui sont tenus de prêter entre les mains de l’officier le serment ordinaire de cabaretier et qui soyent capables et d’ordre dans les lieux désignés par l’arrêt du 22 juillet dernier, le tout sans conséquence et pour aussi longtemps qu’il plaira au Conseil de maintenir cette permission.

22 juillet 1754
Sur les avis donné à la Sgrie de la quantité de bouchons et vendages de vin qu’il y a à la Côte aux Fée au grand préjudice et désavantage des habitants dudit lieu qui se livrent à la débauche et commettent ensuite des actions dignes de repréhension; et comme le bien public demande de prévenir la ruine des habitants de cet Etat, il est très sérieusement ordonné au Sr. Bolle lieutenant en la Justice des Verrières, d’interdire tout vendage de vin à la Cote aux Fées à tous ceux qui vendent excepté à la veuve Fallet et à ses enfants aux Bolles devers vent, et à David Juvet près de l’ Eglise de la Cote aux Fées, en assortissant tous les autres vendeurs de vin que la Seigneurie veut bien par grâce la permission de vendre en pinte le vin qui leur reste entre cy et la St Martin prochaine; mais qu’après ce terme expiré, s’il leur arrive encore de vendre vin en pinte, et s’ils ne posent leur bouchon, il les poursuivra sans grâce ny mercy , aux fins de les faire châtier et punir avec toute la rigueur que leur désobéissance le mérite, luy enjoignant pour cet effet de même qu’à toutes personnes assermentées de tenir la main à l’exécution du présent sous peine d’en répondre en son propre.

28 octobre 1754 Grand que du Petit Bayard s’avisent à tenir cabaret et de vendre vin ce qui occasionne des débauches et désordres continuels; et comme il convient de prévenir de pareils abus; il est ordonné au Sr. Lieutenant Bolle de se rendre aux Bayards afin de savoir les deux cabaretiers qu’il convient de laisser subsister, savoir l’un au Grand Bayard et l’autre au Petit Bayard, en faisant notifier à tous les autres que la Sgrie leur accorde jusqu’au Nouvel An prochain pour se défaire du vin qu’ils ont actuellement et qu’après ce temps expiré défense leur est faite de vendre vin et de tenir bouchon sous peine en cas de contravention d’être recherché et punis de leur désobéissance.

27 novembre 1754
Sur la requête de Suzanne Marie femme de David Juvet de la Cote aux Fées aux fins qu’il plaise au Conseil de la laisser jouir de la grâce que la Sgrie leur a accordé de leur permettre de tenir cabret, surquoy après avoir délibéré, il a été dit que vu que la grace accordée à la Paroisse de la Cote aux Fées n’est que précaire on luy ordonne à cause du rapport qui a été fait au Conseil de la bonne conduite dud. Juvet de luy donner la préférence sur tout autre et à un prix raisonnable pour vendre vin dans son quartier sans quoy, si elle refuse de le faire, la susdite requête devra être remise au Sr. Lieutenant Bolle et à la Justice des Verrières, pour qu’elle informe le Conseil des faits qu’elle renferme: en y joignant la dâte de l’arrêt qui permet au dit Juvet de continuer de

vendre vin, après quoy et sur son rapport il en sera ordonné plus outre ce qu’il conviendra.

9 décembre 1754
Sur la requête de la Paroisse de la Cote aux Fées aux fins qu’il plaira au Conseil de luy faire la grâce de révoquer la préférence de vendre vin accordée à David Juvet et à sa femme et de laisser subsister la monte publique et l’échute que la Paroisse en a faite conformément à l’arrêt qu’il a plu au Conseil de luy accorder; après avoir délibéré il a été dit: que pour mettre fin à cette affaire on laisse subsister la monte que la Paroisse de la Cote aux Fées a fait du vendage de vin et en conséquence on charge le Sr. Bolle lieutenant de la Justice des Verrières de s’informer exactement de la quantité de vin et d’autres provisions que David Juvet a achétés pour l’usage de son cabaret, et de luy accorder et limiter le tems qu’il croira suffisant pour débiter les dites denrées après lequel tems expiré défense luy sera faite de n’en plus vendre sous quelque prétexte que ce puisse être.

27 janvier 1755
Sur la requête du Grand et du Petit Bayard aux fins qu’il plaise au Conseil d’ordonner l’abolition de tous les cabarets des dites deux Communautés et de ne laisser sustsiter que celui de la maison de Paroisse qui est situé entre les deux villages et très à portée pour les deux communautés en autorisant la Paroisse à faire faire taxe tous les mois du pain et du vin qui s’y débitera, surquoy vu le rapport du Sr. Bolle lieutenant en la Justice des Verrières et délibéré, il a été dit: que l’on ne peut pas accorder aux deux Communautés suppliantes les fins de leur requête et pour cet effet il est ordonné au Sr. lieutenant Bolle de ne laisser subsister que deux cabarets dans les dites deux Communautés, le tout conformément à l’arrêt du 28 du mois d’octobre de l’année passée et cela sans conséquence et pour si longtemps qu’il plaira à la Seigneurie.

8 février 1755
Le nommé Landri des Bayards ayant supplié le Conseil que vu l’arrêt du 28 octobre 1754 qui restreint les cabarets dans cette Paroisse à deux tant seulement, il luy soit permis de continuer à vendre vin jusqu’à ce qu’il ait pu débiter et consommer les provisions qu’il avait faite dès avant le d. arrêt rendu et de plus qu’il luy soit loisible d’avoir du vin en sa cave pour luy et pour les amis qui luy en demanderont avec lesquels il commerce surquoy délibéré il a été dit : que l’on veut bien accorder au d. Landri jusqu’au premier jour du mois de mai prochain pour débiter le vin qu’il a dans sa cave et ses autres provisions. Le Conseil s’enteant au surplus à ce qu’il a statué dans ses précédents décrêts au sujet de la réduction des cabarets à deux tant seulement.

2 décembre 1757
Sur la requête de Jacques ffeu Etienne Barbezat de la Cote aux Fées aux fins qu’il plaise à Mgr le Gouverneur de luy permettre de vendre vin en détail à la Cote aux Fees le vin du cru des vignes qui luy appartiennent quoiqu’il soit défendu tout vendage de vin à autre personne que celui préposé par la Paroisse de la Cote aux Fée, sans que pour cela il veuille tenir bouchon ni enseigne public surquoy Mgr le Gouverneur a bien voulu accorder au suppliant sa demande, en conséquence luy permet de vendre le vin qu’il

aura de son propre cru ainsi qu’il doit l’être à tous sujets de l’Etat, mais sans tenir bouchon ni enseigne public.

6 février 1758
Sur la requête de la Paroisse de la Cote aux Fées aux fin qu’il plaise au Conseil de la maintenir auprès de l’arrêt du 31 janvier 1757 et de révoquer celui du 2 Xbre passé que Mgr le Gouverneur a accordé à Jaques Barbezat Beaufils de David Juvet par lequel il luy permet de vendre le vin de son cru sans bouchon ni enseigne public surquoy après avoir délibéré il a été dit que l’arrêt rendu le 2 Xbre dernier par Mgr le Gourverneur ne déroge en rien à l’arrêt que le Conseil d’ Etat a accordé à la Paroisse de la Côte aux Fées sous la date du 31 janvier dernier, vu qu’il n’a ajmais prétendu priver par le dit arrêt les sujets de cet Etat qui ont des vignes de la liberté qu’ils ont de vendre leur vin en gros soit au détail, et en con-séquence led. Barbezat ne peut pas non plus être privé de ce droit: mais on autorise les Gouverneurs de la Paroisse à obliger led. Barbezat à leur faire voir la quantité de vin qu’il entrera à la Côte aux Fées et à leur faire comter que ledit vin qu’il veut débiter est de son propre cru, à défaut de quoy il ne pourra du tout point bénéficier de la grace qui luy a été accordé par Mgr le Gouverneur que renferment tacitament les susdites conditions.

14 février 1758
Sur la requête de la Paroisse de la Cote aux Fées aux fins qu’il plaise au Conseil de révoquer la permission accordée à David Juvet et à Jacques Barbezat de vendre du vin en pinte, et d’ordonner que la Paroisse suppliante soit maintenue dans la monte de ses deux cabarets vu que les acquisitions que le d. Juvet et Barbezat ont faites de quelques vignes sont simulées, surquoy après avoir délibéré, il a été dit: qu’en exécution de tous les arrêts précédemment rendus sur cette difficulté on défend de nouveau et de plus fort à David Juvet et à Jacques Barbezat de la Cote aux Fées de vendre du vin en pinte dans ladite Paroisse sous peine d’être recherché et punis, vu qu’il se comte par la situation dans laquelle ils se rencontrent l’un et l’autre actuellement qu’ils n’ont point de vignes qui leur appartiennent et qu’ils ayent acxquises à juste titre, n’empêchant pas lorsqu’ils auront acquis des vignes en bonne et due forme qu’ils ne puissent profiter de la liberté acquise à tous les sujets de l’ Etat en prenant les précautions requises dans l’arrêt du 6 du courant lorsqu’ils voudront faire entrer le vin de leur propre cru à la Côte aux Fées .

12 avril 1762
On a lu une remontrance des Sr. Maîtres Bourgeois de Valengin priant le Conseil de mettre au néant la défense que la Communauté de St Blaise a faite au Sr. Emer Girard de Savagnier habitant au d. lieu de continuer à débiter du vin au détail à St Blaise, quoiqu’il ne débite que celui de son cru ou de celui de quelques communiers du dit lieu, priante d’être maintenue au contenu des franchises et privilèges qui luy sont acquis comme Bourgeois de Vallengin. Surquoy après avoir délibéré, il a été dit que l’on trouve la remontrance des Sr Maîtres Bourgeois de Vallengin très mal fondée d’autant que la Communauté de St Blaise n’a fait que d’user du droit qu’elle a, de même toutes les autres communautés de l’ Etat lorsqu’elle a fait défense au d. Sr. Girard habitant au d. lieu de continuer à débiter du vin en détail.

12 novembre 1765
Sur les informations données à la Sgrie des débauches excès et mauvaises choses qui se commettent journellement à Fresens chez la veuve de Pierre Porret qui s’avise d’y vendre vin sans en avoir obtenu la permission et sans avoir prété le serment requis en pareil cas; et et comme une conduite de ctte nature ne peut absolument être tolérée ni soufferte, il est ordonné au dit Sr. Andrié Chatelain de Gorgier de luy interdire tout vendage de vin, sous quel prétexte que ce puisse être, en luy déclarant que si elle s’avise de contrevenir à la défense qui luy est faite, elle en sera recherchée et punie avec la dernière rigueur.

9 février 1767
Le Sr. Du Terraux Maire des Verrières a fait parvenir au Conseil les plaintes que la Paroisse de la Côte aux Fées luy a portée, au sujet de la multiplication des cabarets et que les cabartiers y tiennent le monde les dimanches dès la sortie du Prêche du matin jusques après minuit et même jusques au lundy suivant où ils commettent des batteries et des scandales affreux, surquoy entendu le Sr. Du Terraux Maire des Verrières de se conformer en tout point à l’arrêt rendu le 22 juillet 1754 qui règle la quantité de cabarets qu’il doit souffrir à la Côte aux Fées et de ne point s’en écarter en leur faisant tenir la main ponctuellement aux mandements de la Seigneurie qui défendent de donner du vin après les dix heures du soir et de rechercher ceux qui s’en écarteront aux fins de les faire punir à teneur du d. mandement, de même que le nommé Juvet s’il y est contrevenu.

17 février 1783
Sur la requête de D1 Haldiman sujet de Berne et natif de ce Pays demeurant au dessus de la Rançonnière rière le Locle, exposant qu’étant locataire d’un petit maix de terre écarté du village, il établit un vendage de vin pour les passants, mais que la Communauté luy ayant fait faire une défense de continuer led. vendage de vin il avait retiré et abbattu la marque et que comme la petite provision n’étoit pas épuisée, un homme des environs passa chez lui et but avec luy sans qu’il ait rien payé, malgré cela ayant été rapporté au Sr. Wuagnière Maire du Locle, celuy cy luy a formé demande et le poursuit comme réfractaire et désobéissant ce qui l’engage à supplier le Conseil de bien vouloir enlever ladite demande, après avoir entendu le rapport de la Gommission des Jetes et délibéré, il a été dit que comme le suppliant ne peut ni ne doit vendre vin sans en avoir obtenu la permission de la Seigneurie et qu’il est poursuivi pour être contrevenu à une défense qui luy avoit été faite sous l’autorité de l’Officier de la Seigneurie, on ne peut enlever la demande qui luy avoit été formée à ce sujet le Conseil le renvoyant à se défendre par Justice comme mieux il luy conviendra.

30 mars 1784
Le Conseil ayant été informé que divers particuliers de la Chatellenie de Thielle vendent du vin en détail dans leurs maisons où ils reçoivent du monde à toutes heures; et parce qu’ils n’ont pas de marque, ils prétendent se soustraire à l’obligation de prêter serment de cabretier. Après avoir délibéré, il a été dit: que l’on
charge M. de Sandoz de Travers Conseiller d’ Etat et Chatelain de Thielle de faire

défense à tous particuliers de la dite Chatellenie de Thielle de vendre du vin en détail dans leur maison lorsmême qu’ils n’auraient pas de marque, qu’au préalable ils n’ayent solemnisé le serment de cabaretiers.

30 mars 1784
Mr de Sandoz de Travers Conseiller d’ Etat et Châtelain de Thielle a informé le Conseil des plaintes qui luy ont été portées par la Communauté d’Hauterive contre un nommé Robert Bourgeois de Vallengin habitant aud. Hauterive qui vend du vin en détail quoiqu’il n’ait pas de marque de vendage, et de la requisition que luy a faite ladite Communauté de faire défendre audit Robert de continuer à vendre vin en détail dans la suite, à l’occasion de quoy mond. Sr. la Châtelain prie le conseil de luy donner une direction, surquoy après avoir délibéré, il a été dit que l’on charge Mr de Sandoz de Travers Conseiller d’ Etat et Châtelain de Thielle de faire notifier de la part de la Seigneurie au nommé Robert habitant à Hauterive défense de vendre vin en détail sous peine en cas de contravention d’être puni comme réfractaire et désobéissant.

31 mai 1784
Le Sr Rougemont maire de Travers a présenté de nouveau au Conseil qu’ayant fait prêter en Justice de Travers le serment de cabaretier à divers particuliers vendants du vin en pinte; ils se sont plaints de ce que plusieurs personnes qùi n’ont ni enseignes, ni bouchons vendent comme eux du vin en détail sans avoir aucun serment, et qu’après avoir fait retirer le monde de chez eux après dix heures du soir selon leur serment, les buveurs vont descendre chez ces personnes qui n’ont ni enseigne ni bouchons et point prêté serment, et y restent bien avant dans la nuit: surquoy après avoir délibéré il a été dit qu’on ordonne au Sr. de Rougemont Maire de Travers de faire notifier à tous ceux qui vendent du vin en détail une défense de continuer à moins qu’ils ne prêtent le serment de cabaretiers au préalable.

5 juillet 1784
Sur les remontrances du Sr. Maître Bourgeois de VAllengin aux fins qu’il plaise au Conseil de lever la défense qui a été faite de la part de la Seigneurie à Elie Robert leur Bourgeois habitant Hauterire de vendre vin en détail aud. lieu estimant le dit Sr. Maître Bourgeois qu’elle est contraire à leurs franchises et coutumes et spécialement au premier des articles qui leur ont été accordé en 1707. Entendu le rapport de Mr Rougemont Commissaire Général, de Sandoz de Travers Châtelain de Thielle et de Pierre Procureur Général, tous trois Conseillers d’ Etat et délibéré, il a été dit les dits Sr. Maîtres Bourgeois donnent aud. article une extension dont il n’est pas susceptible, ce qui est contraire à la pratique générale de cet Etat et que les Bourgeois de Vallengin n’ont point le droit d’exercer le commerce de vin en détail, en vendant à pot et à pinte dans le district des Communautés dont ils ne sont pas membres, à moins qu’ils en ayent obtenu la permission de la Seigneurie, ensorte que par ces raisons le Conseil ne peut point lever la défense qui a été faite aud. Elie Robert.

18 octobre 1784

Sur la remontrance des d. Sr. Maîtres Bourgeois de Vallengin exposant au Conseil qu’ils ont eu la douleur de voir par l’arrêt rendu le 5 juillet dernier que leur demande n’a point été appointée au sujet d’Elie Robert leur Bourgeois habitant Hauterive, de vendre vin en détail au d. lieu et qu’estimant que la d. défense est contraire à leurs franchises et spécialement au premier des articles qui leur ont été accordés en 1707, ils ont cru devoir recourir de nouveau à Mr. le Président et de le prier très humblement de vouloir bien examiner de nouveau cette affaire et la mettre hors de grief et de plainte à cet égard surquoy délibéré il a été dit que le Conseil renvoye de nouveau cette affaire à l’examen de Mr de Pury Maire de la Côte, de Pury lieutenant colonel, Boyve Chancelier, de Montmollin Procureur de Vallengin et de Sandoz de Travers Châtelain de Thielle, tous Conseillers d’Etat, et sur leur rapport il sera ordonné plus outre.

2 novembre 1784
Sur la remontrance des Sr Maîtres Bourgeois de Vallengin aux fins qu’il plaise au Conseil de lever la défense qui a été faite de la part de la Seigneurie à Elie Robert leur Bourgeois habitant Hauterive de vendre vin aud. lieu en détail estimant lesd. Maîtres Bourgois que lad. défense est contraire à leurs franchises et spécialement au ler des articles qui leur ont été accordé en 1707, surquoy entendu le rapport de Mrs de la Commission et délibéré, il a été dit que le Conseil trouve lesdites remontrances très mal fondées et ne peut conséquemment rien changer à son arrêt rendu le 5 du mois de juillet dernier.

7 avril 1794
On a lu un gracieux rescrit en date du 15 du mois passé par lequel S.M. répondant à la très humble relation du Conseil du 24 février approuve le nouveau serment des cabaretiers comme une mesure de police nécessaire, mais fixe la lle heure au lieude la lOe pour la clôture des cabarets, cela par forme d’essai et pour tant et aussi longtemps qu’il n’y sera pas vu d’inconvénient surquoy après avoir délibéré,il a été dit que le Conseil renvoye le gracieux rescrit à l’examen et au rapport de Mrs de la Commission des Montagnes.

15 décembre 1794
Le Conseil ayant lieu de remarquer que divers particuliers de ce Pays se permettent sans avoir d’enseigne et sans être assermentés de vendre à pot et à pinte du vin chez eux et souvent à des heures indues, prétendant parce qu’ils n’ont point d’enseignes ils ne peuvent être assujettis au serment de cabaretiers, charge la Commission nommée pour s’occuper dudit serment de prendre en objet le cas susmentionné et de présenter à cet égard son préavis au Conseil.

25 janvier 1790
Mons. de Sandoz de Travers Cons. d ‘Etat et Chât. de Thielle a présenté au Conseil le verbal qu’il a adressé qu’il a dressé aux fins de vérifier si dans le cabaret du Sauvage à St Blaise, on a débité du vin dans des bouteilles qui ne tiennent pas le demi pot, surquoy lecture faite du dit verbal entendu en s~nr rapport Mons. Le Châtelain après avoir délibéré il a été dit que comme il se conste par le dit verbal que la femme du nommé Mauler Cabartier aud. cabaret a débité du vin dans des bouteilles trop petites,

le Conseil ordonne à mond. Sr Châtelain de former demande à la dite femme Mauler en concluant contre elle à trois jours et trois nuits de prison civile et à tous les frais.

23 mars 1790
Sur la requête de Suzanne femme d’André Mauler cabaretier à Marin aux fins qu’il plaise au Conseil de bien vouloir luy faire grâce de la prison civile à laquelle elle est assujetie par le passement qu’elle a donné à la demande suivant l’exigence du cas que Mr. le Châtelain de Thielle luy a formée pour avoir débité du vin dans des bouteilles trop petites. Surquoy entendu en son rapport Mr de Sandoz de Travers Conseiller d’ Etat et Châtelain de Thielle, après avoir délibéré il a été dit que le Conseil veut bien faire grâce à la suppliante de la prison civile qu’elle a encourue; moyennant qu’elle acquite tous justes faris et le présent arrêt devant être lu en ouverte justice un jour de plaid ordinaire.

25 février 1795
On a lu un rapport du Sr Wuagneux Maire du Locle demandant d’être autorisé à faire prêter aux cabartiers et vendeurs de vin de sa Juridiction l’ancien serment en attendant qu’on ait pourvu ultérieurement à cet objet de Police, surquoy délibéré, il a été dit que le Conseil renvoye le rapport du Sr Wuagneux Maire du Locle à l’examen de la Commission dont Mr. de Boyve Conseiller d’ Etat et Chancelier est le chef.

23 mai 1796
Le Conseil étant informé des plaintes que l’on porte dans diverses juridictions des Montagnes relativement à la trop petite contenance des bouteilles dont se servent les cabaretiers, ordonne au Sr Wuagneux Maire du Locle d’enjoindre les cabaretiers de sa Juridiction d’avoir conformément à l’ancien usage dans la chambre du cabaret des pintes en étain étalonnée de la mesure d’un pot, de demi-pot et de quart de pot, afin que chacun puisse s’assurer de la juste contenance des bouteilles dans lesquelles on donne à boire. ( Cet ordre a été adressé aux officiers du Locle, de la Sagne, des Brenets et de la Chaux-de-Fonds)

18 juillet 1803
On a lu un rapport du Sr. Droz, maire de la Chaux de Fonds informant le Conseil que les cabaretiers de sa Juridiction n’ont pas encore solemnisé le nouveau serment et priant qu’il luy soit donné des ordres; surquoy délibéré il a été dit : que les oppositions et remontrances de la Bourgeoisie de Valengin ayant été répondu par le gracieux rescrit du 15 mars 1794, le Conseil ordonne au Sr Maire de la Chaux de Fonds de faire prêter à tous les cabaretiers et gens vendant vin ou liqueur dans se Juridiction le serment adopté le 29 décembre 1789 en subsituant pour la clôture des cabarets les onze heures du soir à dix heures, ainsi que le portait le dit serment.

15 août 1803
Sur la représentation en date du 13 de ce mois par laquelle les Srs Maîtres Bourgeois de Valengin prient le Conseil de suspendre l’exécution des ordres par luy donnés de faire prêter aux Cabartiers du locle et de la Chaux de Fonds le serment de cabaretiers du 29 décembre 1789, les dits Srs Mt Bgs annonçant que ce sursis est nécessaire pour examiner les réclamations qui leur sont adressées de la part de plusieurs de leurs Bourgeois Cabaretiers rière le Locle et la Chaux de Fonds et d’en apprécier le mérite. Surquoy après avoir délibéré, il a été dit que le serment des cabaretiers adopté le 29 décembre 1789 ayant été approuvé par Sa Majesté, qui par égard pour la représentation de la Bourgeoisie de Vallengin a bien voulu renvoyer à onze heures le moment de la clôture des cabrets, et ce serment étant et devant être en vigueur dans toutes les parties de l’Etat, le Conseil ne peut accorder la suspension demandée; vu qu’elle ne tendrait qu’à prolonger les désordres qu’il importe essentiellement defaire cesser.

26 septembre 1803
On a lu une remontrnace des Sr Maîtres Bourgeois de Vallengin en date du 27 août dernier priant le Conseil en suite de l’arrêt rendu le 15 dud. mois relativement au serment des cabaretiers du 29 Xbre 1789 de leur accorder copie de la réponse de S.M. mentionnée dans le dit arrêt afin de faire cesser les réclamations desd. cabartiers.Délibéré Il a été dit que le Conseil ne peut déférer à la demande déplacée des Sr. Mt.Bgs de Vgn et continue à leur réïtérer que conformément aux ordres de S.M. il pourvoira à ce que le serment des cabaretiers soit incessament solemnisé par tous ceux qui s’y seroient refusés jusqu’à maintenant.

26 septembre 1803
Il est ordonné au Sr. Droz Maire de la Chaux de Fonds de donner effet sans ultérieur renvoi à l’arrêt du 18 juillet dernier qui luy enjoint de faire solemnisé aux cabaretiers de sa Juridiction le serment du 29 Xbre 1789 en substituant onze heures du soir à dix heures conformément à la Royale Résolution de Sa Majesté dans son gracieux rescrit du 15 mars 1794.

26 septembre 1803
Sur la requête de Jacob Jeannot, Charles Nicolet, Jean Georges Schoeffer et Jacob Haberly cabaretiers à la Chaux de Fonds, exposant qu’étant citer à paroître en justice dud. lieu pour y solemniser le serment de cabaretier, ils prient le Conseil de suspendre cette prestation de serment jusqu’à ce qu’elle soit exigée des autres cabaretiers qui sont Bourgeois de Vallengin et d’admettre la réserve que font les suppliants de bénéficier des adoucissements qui pourraient être apportés aud. serment ensuite des remontrances de la Bourgeoisie de Vallengin. Délibéré il a été
dit que le Conseil ayant par son arrêt de ce jour ordonné que tous les cabaretiers de la Chaux de Fonds sans exception prèteroient sans retard le serment de cabaretiers la requête des suppliants est actuellément sans objet.

15 août 1808
Sur la requête de la Paroisse des Planchettes priant le Conseil de fixer son attention sur le trop grand nombre de cabarets qui existent dans son district, le Conseil renvoya cet objet à l’examen et aurapport dud Droz Maire du Locle et Matile maire des Brenet qui annonceront quel est le nombre des cabarets dans le district des P1anchettes,et celui auquel d’après leur opinion il pourroit être réduit.

Août 1808
Vu un procès verbal dressé à la Brévine le 10 de ce mois constatant que Barthelemi Herrn Cabaretier au dit lieu est contrevenu à son serment en tolérant des buveurs et du tapage dans son logis pendant le service divin, entendu le préavis de l’officier de la Juridiction et délibéré, le Conseil ordonne que led. Herrn soit poursuivi par une demande protant pour conclusion trois jours et trois nuits de prison civile et l’acquit des frais, et qu’il luy soit signifié qu’en cas de récidive d’un pareil scandale, le débit de vin luy seroit interdit.

15 septembre 1808
Sur la requête de la Paroisse des Planchettes se plaignant du grand nombre de cabarets qui existent dans son district, entendu en leur rapport les Sr Maires du Locle et des Brenets chargés d’indiquer le nombre des cabarets existant dans lad. paroisse et celui auquel il pourroit être réduit, le Conseil après avoir délibéré arrête: 1° le nombre des cabarets de la Paroisse des Planchettes est restreint aux trois qui existent dans le Village et à ceux qui se trouvent sur les bords du Doubs dans des lieux de passage. 2° Tout débit de vin cessera dans les cabarets interdits àl’époque fixée par les Sr Droz maire du Locle et Matile maire des Brenets qui sont chargés de veiller à l’exacte observation du présent ordre et à celle du règlement du25 Xbre 1789 pour la Police dans le district de la Paroisse des Planchettes.

23 may 1809
Sur la requête de la Paroisse des Planchettes exposant le préjudice qui résulteroit pour divers membres de sa corporation de l’exacte observation de l’arrêt du Conseil du 20 septembre dernier qui fixe le nombre des cabarets dans cette Paroisse , et solicitent en faveur de Daniel Aimé Calame la faculté de vendre vin, le Conseil, après en avoir délibéré arrêt: Il ne peut rien être changer à l’ordre général établi par l’arrêt du 20 septembre 1808. 2° si quelque paroissien des Brenets demande la permission de vendre vin individuellement et en son propre et privé nom, le Conseil y avisera selon les circonstances.

12 juin 1809
Sur la requête de Daniel Aimé Calame Paroissien des Planchettes demandant de pouvoir vendre vin dans la amison qu’il tient en amodiation de Charles Louis Robert des Planchettes qui a aussi signé la requête, entendu le préavis du Sr Matile maire des Brenets, le Conseil après en avoir délibéré accorde aux suppliants les fins de leur requête pour autant de tems qu’il n’y sera pas vu d’inconvénients.

MANDEMENT CONCERNANT LES CABARETS DU 27 DÉCEMBRE 1825.

Nous LE GOUVERNEIUR ET LIEUTENANT-GÉNÉRAL, pour SA MAJESTÉ, dans la Principauté de Nenchâtel et Valangin.

Savoir faisons:

Il y a long-tems que le nombre excessif des débits de Yins et de liqueurs dans l’Etat est un grave sujet de sollicitude pour le Gouvernement. Non-seulement durant les dernières années surtout, leur nombre s’est multiplié dans une proportion croissante, mais ce genre d’occupation est devenu dans bien des cas comme la dernière et trompeuse ressource des hommes obérés et corrompus, que l’appât du gain et 1eurs penchans déréglés incitent également à favoriser le désordre, et qui, choisissant de préférence des lieux écartés, loin de l’oeil des honnêtes gens et propres à les soustraire à la surveillance de la Police, font de leurs demeures des refuges du vice, et même des lieux de débauche et de scandale. De-là une source de maux les plus déplorables: Au- dehors les rixes, les tumultes, les désordres de toute espèce; dans l’intérieur des familles, le troubIe, les dissentions, l’exemple du vice sans cesse sous les yeux des enfans, I’incapacité pour le travail, la misère, le désespoir, et ses derniers excès les plus coupables et les plus affreux; Pour les Communautés et les fonds de charité, un fardeau qui devient accablant, des familles entières à leur charge, des enfans abandonnés par leurs parens, des pauvres assistés, qui détournent au profit de leurs passions les deniers des aumônes qu’on leur accorde et qui dérobent ainsi la nourriture à leur propre famille, des hommes déclarés

prodigues et auxquels on a interdit l’entrée des cabarets, et qui, bravant les défenses, trouvant dans les cabaretiers eux-mêmes des séducteurs et-des complices, se montrent publiquement et pour ainsi dire chaque jour dans un état dégoûtant d’ivresse; Pour l’Etat ;enfin et pour la religion, la corruption et la ruine d’une classe nombreuse de la société et d’une grande portion de l’Eglise chrétienne.—Allarmé et affligé par le développement d’un mal si redoutable, et qui est aujourd’hui non moins vivement senti par toute la partie saine de la population du pays; le Conseil d’Etat s’est appliqué à en chercher le remède, et le résultat de son examen a été de le convaincre qu’il falloit remettre en vigueur les anciennes règles administratives maintenues pendant des siècles, et sur les~instances mêmes des peuples et des corporations de l’Etat, et que suivant les exemples et les principes de nos pères, aussi conformes à la droite raison qu’éprouvés par une longue expérience, il étoit nécessaire de réduire considérablement le nombre des débits de vins et liqueurs, et de n’accorder la permission d’exercer l’état de cabaretier qu’à des hommes probes, attachés au maintien de l’ordre et des bonnes mœurs. Mais quelque urgente que soit cette réforme, toutefois, considérant les inconvéniens réels qu’il y auroit à vouloir l’opérer incontinent et tout d’un coup par une mesure générale; Nous avons résolu de n’y procéder que par degrés, en ayant égard à tout ce que peuvent exiger les circonstances locales et particulières, et en conséquence, de l’avis de Messieurs du Conseil d’Etat, arrêté les mesures suivantes:

ARTICLE 1er.

A dater du jour de la publication de la présente ordonnance, il est interdit à tous les sujets ou habitans de l’Etat, de tenir un cabaret, café, pinte ou bouchon, et de vendre en détail et donner à boire dans un lieu quelconque, au vin ou des liqueurs, sans une permission spéciale du Conseil d’Etat, qui devra se demander par une requête, et qui ne sera valable qu’aussi longtems que la personne à laquelle elle aura été accordée continuera à tenir elle-même un débit de vin ou liqueurs.

ART. 2.

Tous les sujets ou habitans de l’Etat, qui, antérieurementàce jour, ont ouvert de pareils débits de vins ou de liqueurs, et qui désirent les continuer, devront se déclarer au plaid ordinaire à l’Officier en chef de la Juridiction avant le 1er Avril prochain, et note en sera prise par le Greffier. Les Officiers mettront ces rôles sous les yeux du Conseil d’Etat.

ART. 3.

Les Officiers adresseront au Conseil, avant le 1er Avril prochain; leur rapport motivé touchant le nombre auquel- il convient de réduire les débits de vins et liqueurs dans chaque village ou quartier de leurs Juridictions, et ils prendront à cet effet l’avis des Communautés de leur ressort, chacune pour ce qui la concerne.

ART. 4.

Tout sujet ou habitant de l’Etat, qui, n’ayant pas été porté sur le rôle mentionné à l’Art. 2, ni obtenu une permission du Conseil d’Etat aux termes de l’Art. 1er, ou qui, malgré que cette tolérance ou permission lui eut été subséquemment retirée, se permettroit de contrevenir en manière quelconque à l’Art. Ier’ sera poursuivi à trois jours et trois nuits de prison civile, et d’une manière plus grave en cas de récidive.

ART. 5.

La présente ordonnance n’est point applicable à la vi}le de Neuchâtel, attendu les mesures déjà prises dans le même but, par les Quatre-Ministraux et Conseil de la dite ville, en vertu de ses droits de police.

ART. 6. i.

Donné au Conseil tenu sous notre présidence au Château de Neuchâtel, le 7 Décembre 1825.

Le Gouverneur, Z A S T R O V.

Réclamation contre l’ordonnance du 27 décembre 1825 signée par les bourgeoisies du landeron, Boudry et Valangin

Votre Excellence

Les déclarations émanées du souverain en 1707, et la charte constititionnelle que le plus chéri des Monarques daigna donner à ses sujets de cette Principauté à l’époque où ils eurent le bonheur d’être replacés sous sa douce et paternelle domination; ces actes qui contiennent les principes fondamentaux de notre droit public consacrant une liberté de commerce pleine et entière. Cette liberté de commerce devoit naturellement s’étendre aussi bien à l’établissement de cabarets et de pintes qu’à la vente au détail d’autres denrées et marchandises quelconques; aussi les sujets de cet Etat ont-ils été constamment en possession du privilège d’ouvrir des débits de vin et de liqueurs dans toute l’étendue de la Principauté,sous la seule condition de se conformer aux règlements sur la police à observer dans leurs cabarets. L’exercice de ce droit n’a jamais été limité qu’autant que cela auroit pu porter atteinte à quelques concessions particulières faites anciennement à un très petit nombre de communes, tel étoit l’état des choses qui subsistoit depuis longtemps lorsque le Conseil d’ Etat fit publier son ordonnance du 27 décembre 1825.

Par cette ordonnance il prohibe les débits de vin dont il n’auroit pas autorisé l’existence ou permis l’établissement; en sorte qu’au lieu de pouvoir former comme précédemment des cabarets ou pintes à volonté, on ne peut plus le faire qu’après en avoir obtenu la permission.

Les Bourgeoisies du Landeron, de Boudry et de Valengin ont été invitées par un grand nombre de leurs ressortissants à réclamer contre cette mesure et elles n’ont pu se refuser de déférer aux demandes qui leur ont été faites à ce sujet: Toutes fois, comme elles avoient à coeur de concilier autant que possible l’exercice de la liberté de commerce au maintien de laquelle il est de leur devoir de veiller, avec les vues sages du Gouvernement, elles se sont bornées à solliciter par leur respectueuse remontrance du 12 juin 1826, de simples modifications à l’ Ordonnance. Elles pensoient qu’en donnant aux communes l’autorité de décider, sous la surveillance de Messieurs les Officiers de Juridiction, des demandes qui survients faites pour l’établissement ou la suppression de cabarets et pintes dans leurs ressorts respectifs, on attendroit le but de la mesure, en même temps qu’on éviteroit les frais d’une requête et les graves inconvénients qui peuvent résulter dans de certains cas de ce que l’obtention ou le refus d’une permission de vendre vin peut dépendre entièrement de la personne chargée de faire un rapport sur la demande qui en est faite. Elles esperaient d’autant plus que leur remontrance seroit appointée, que le mode qu’elles proposoient, se pratique déjà dans la ville et banlieue de Neuchâtel, sans que l’on ait à regretter les conceaons faites à cet égard à 1’autorité municipale de cette Ville, et qu’il auroit pu être adopté pour les autres communes de l’Etat, sans qu’il en fut rien résulté de fâcheux pour le maintien de l’ordre.Mais elles ont été loin d’obtenir ce qu’elles demandoient. Lé Conseil d’ Etat par son arrêt du 25 juin dernier n’a accordé autre chose, sinon la faculté aux propriétaires de vignes de vendre à pot et à pinte le vin de leur cru, et encore n’est- ce que sous des astrictions et moyennant des formalités qui rendent l’exercice de cette faculté beaucoup moins facile et moins avantageux qu’il ne l’étoit autrefois.

Cet arrêt ayant été communiqué aux Bourgeoisies réclamante s, les Chefs des Bourgeoisies en ont reçu des ordres en exécution desquels ils viennent supplier respectueusement Votre Excellence de faire rapporter l’Ordonnace du 27 décembre 1825 et de rétablir l’ordre des choses qui existait auparavant touchant les pintes et les cabarets. Leur demande n’ayant d’autre but que de faire maintenir dans toute son intégrité la liberté de commerce illimitée acquise aux sujets de cet Etat et de remettre ce qui se pratiquoit de tems immémorial, ils se flattent de l’espoir que leur très humble remontrance sera appointée et qu’ainsi les voeux manifestés avec une entière unanimité par ceux dont ils sont les organes resont remplis.

Dans cette attente ils renouvellent à Votre Excellence l’assurance de leur très profond respect et ils implorent sur Elle les bénédictions célestes.

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En l’absence du secrétaire de Bourgeoisie du Landeron | Guinchard 
Le secrétaire de la Bourgeoisie de Boudry | J.J. Martenet
Le secrétaire et boursier de la Bourgeoisie de Valengin | Delachaux

Serment des cabaretiers du 27 février 1786

 

LE CONSEIL D’ETAT ayant mis en objet les représentations qui lui ont été faites par divers Cabaretiers de cet Etat, a jugé à propos d’apporter quelque modification à la formule de ferment qui avoit été adoptée à la date du 28 juin 1778, & de la faire rédiger & imprimer comme fait: ordonnant en conséquence à tous les Officiers de faire paroıtre par devant eux tous ceux qui, riere leurs juridictions respectives, tiennent cabaret, ou vendent publiquement vin & donnent à boire chez eux, afin qu’ils prêtent ledit ferment; & au cas que quelqu’un de ces Cabaretiers refuse de prêter ledit ferment, il lui fera défendu de tenir plus outre cabaret ou pinte publique chez lui.

Donné en Conseil tenu sous notre présidence au Château de Neuchatel le 27 février 1786. Signé, D. CHAMBRIER.

SERMENT POUR LES CABARETIERS ET VENDEURS DE VIN DE CET ÉTAT. vous jurez, promettez devant Dieu votre Créateur:

  1. De rendre bon & fidele compte de tout ce qui vous fera mis en mains, soit hardes, argent ou autre chose, par tous ceux qui logeront chez vous, sous peine d’en répondre.
  2. De ne receler, recevoir ni retenir chez vous aucun garnement, larron, blasphémateur, ni gens de mauvaife vie, à vous connus pour tels.
  3. De tenir en ordre votre logis, & d’empêcher autant que possîble qu’il ne s’y commette du bruit & des scandales; d’en faire retirer le monde le soir, en telle sorte qu’il n’y reste personne après les dix heures; & de ne donner à boire à personne le dimanche pendant le Service divin, exceptant cependant de l’un & de l’autre de ces deux derniers engagemens les voyageurs ou les passans, & tels cas extraordinaires, pour lesquels vous aurez préalablement obtenu une dispense de l’Officier.
  4. De rapporter verbalement ou par écrit à l’Officier en chef, soit à son Lieutenant, ou en cas d’absence à un Justicier ou au Sautier, toutes batteries, appels & en général toutes contraventions aux mandemens de Seigneurie, à vous connues, qui se commettront dans votre logis ou bouchon, ou au sortir d’icelui; & cela dans l’espace de trois jours, y compris celui où le délit aura été commis.
  5. Et enfin, s’il fe faisoit quelque complot, monopole ou machination contre les droits & autorité de SA MAJESTE notre Souverain Prince & Seigneur, vous jurez de révéler le tout à l’Officier en chef, ou au Gouvernement, incontinent après que vous en aurez connoissance.

Ainsi que vous souhaitez que Dieu vous soit en aide.

Lettre adressée au Gouverneur par le maire de Valangin Chambrier concernant la requête de trente cabaretiers du Val-de-Ruz, 5 juillet 1820

Monsieur le Gouverneur

Les aubergistes et cabaretiers du Val-de-Ruz ont présenté en février au nombre de trente une requête dans la quelle ils rappellent les discussions relatives aux horloges des cabaretiers et aux montres des buveurs mises en opposition avec les montres des gendarmes. Ils parlent ensuite des permissions accordées à quelques cabartiers et refusées injustement à d’autres. Ils inculpent après cela ceux qui prennent les cabaretiers en contravention, d’être influencés par l’amitié, la haine, la jalousie, puisque des cabaretiers notoirement en faute ne sont jamais dénoncés. Ils demandent que les auberges et cabarets soient fermés une heure plus tard que le règlement ne le porte, ainsi que cela a été accordé dans la Juridiction des Montagnes et qu’enfin le cabartier en défaut ne soit puni une première ou une deuxième faute que par des amendes pécunières comme cela a lieu dans la Ville de Neuchâtel où les buveurs sont aussi amendables.

Quant aux trois premiers points j’ai été surpris d’une pareille accusation qui tendraient à inculper les fonctionnaires publics de la Juridiction de Valangin et en conséquence j’ai fait citer tous les signataires afin qu’ils eussent à s’expliquer clairement; mais quoique je les aie interpellé tous,ils n’ont pu alléguer aucun fait et se sont bornés à retirer tous les passages de leur requête qui contenait une accusation.

Prenons donc uniquement les deux derniers points de la requête, j’observe qu’en hiver l’heure est bien assez tardive;et qu’ en été des agriculteurs qui ont travaillé dès le point du jour doivent avoir besoin de repos. Quant à ce qui se passe aux Montagnes, je pense que les réclamants sont dans l’erreur et que les aubergistes y sont soumis aux mêmes règles que dans le reste du Pays; mais s’il en était autrement, je crois que cela mériterait d’être pris en considération, car les différences sont mauvaises dans un aussi petit pays où on se soumet avec peine à une loi à laquelle vos voisins ne sont pas obliger de s’astreindre.

Quant à la convenance de punir les cabartiers en faute pour la première fois par une amende, il faut convenir que la peine de prison est bien forte et je ne sais si on ne pourrait pas la remplacer par les amendes de £ 20 usitées pour le délit de chasse.

Quant à la punition des buveurs, elle pourrait être convenable si elle était possible; mais dans des Juridictions de de 5 à 6000 âmes et de plusieurs lieues d’étendue, il est impossible de faire surveiller les auberges et les cabarets par deux seuls gendarmes. On ne découvre souvent les contraventions que deux jours aprés et si on ne pouvait pas appeler les buveurs en témoignage, la Seigneurie n’aurait point de preuves. Cependant à l’occasion de cette requête, je dois faire deux observations. L’article 1 du réglement de 1810 reconnait qu’il y a des cas de repas de corps, noces etc. dans lesquels on peut faire des exceptions au réglement et le second paragraphe du même article déffend de faire l’exception pour les simples cabarets. Cependant il est évident que s’il y a des cas exceptionnels, ils se présentent aussi bien dans les villages où il n’y a pas d’auberge que dans ceux où il s’en trouve, et qu’ainsi le deuxième paragraphe pourrait être retranché et les officiers autorisés à accorder également des permissions aux simples cabaretiers. Quant à l’article deux qui déffend de donner à boire pendant le service divin, il conviendrait de l’expliquer, parce que dans une méme paroisse, il se trouve plusieurs villages et dans chaque village divers cabarets soit dans le village, soit dans les Montagnes. Or l’heure du sermon et du catéchisme variant, et l’après dîner étant le moment où les gens des villages vont se promener, il n’est guère possible de savoir dans chaque cabaret si le service de la Paroisse est fini ou s’il ne l’est pas en sorte qu’un cabaretier peut se trouver fort innocemment en contravention. En conséquence, je propose à vos Seigneuries de faire examiner cette affaire.

Neuchâtel, 5 juillet 1820
F de Chambrier

Avis des localités concernant les anciens règlements, 16 août 1831

16 août 1831

La plupart des Bourgeois et Communes de l ‘Etat se fondant sur le maintien de la liberté de commerce, levée selon eux par les ordonnances concernant les cabarets; et sur la gene qui résulte pour les sujets de l ‘Etat de ces ordonnances: ont demandé le raport en entier du mandement du 27 décembre 1825 concernant les cabarets, et quant au règlement du 29 X 1829 elles ont insisté surtout sur l’extension de l’heure de fermeture des cabrets, en telle sorte qu’elle soit la même que pour les auberges: et sur la suppression de la peine de prison civile pour les délits concernant les cabrets. L’objet de ces représentations a été recommandé au Conseil par le Corps législatif. Et le Conseil a demandé aux chefs de juridiction de l ‘Etat leur avis à cet égard: il convient d’en lire le résumé.

L’on voit par ces rapports quant au mandement de 1825: que la plus grande partie des officiers de Juridiction, et ceux surtout des juridictions les plus populeuses sont d’avis qu’il soit raporté: soit parce qu’il blesse les droits des peuples, soit parce qu’il a été nuisible loin d’être utile: plusieurs d’entre eux voudroient cependant que les communes fussent consultées pour l’établissement de nouveux cabarets.

Le Conseil a été divisé d’opinion: l’un de ses membres demandoit si l’on vouloit renoncer à toute police pour les cabarets, tandis que dans les cantons à constitutions très libérales, cette police l’exerçoit avec une extrême vigueur. Les autres n’étoient pas également convaincus de la solidité des motifs présentés par les corporations réclamantes: il n’étoit pas bien prouvé à leurs yeux que la libertée de com merce eût été violée par les ordonnaces: ni que la diminution si faible encore du nombre des cabarets eût pu déjà produire ses effets pernicieux dont parlent deux officiers. Néanmoins les réclamations sont si générales et si politisés; et l’utilité de l’ordonn æ e de 1825 tellement problèmatique qu’ils pensent qu’il convient d’avoir égard à ces réclamations, et de raporter purement et simplement cette ordonnance de 1825 sans même faire mention de l’intervention des Communes, laquelle ne manqueroit pas de provoquer de nouvelles plaintes: de raporter également l’arrêt du 26 juin 1827: reglant les formalités à suivre pour ceux qui veulent débiter du vin de leur cru.

Si le Conseil paratge cette opinion: il restera encore à décider si elle doit être soumise à Sa Majesté, laquelle dans le tems avoit refusé d’avoir égard aux remontrances de la Bourgeoisie de Valengin contre le mandement de 1823: ou si ensuitte du pouvoir donné à Mons le Commissaire Royal, et des intentions que lui auroient connues les membres du Conseil qui étoient le plus en contact avec lui pour ces sortes de matières; l’arrêt pourroit partir du Conseil.- Dans cette dernière suposition et pourroit être rédigé dans les termes suivants.

Plusieurs Bourgeois et Conseillers de l’Etat ayant présenté tant à son Excellence Monsieur le Commissaire Royal qu’au Conseil d’Etat la demande que le mandement du 27 X 1825 concernant les débits de vin ou liqueur soit raporté: et cette demande ayant été apuyée par le corps législatif auprès du Conseil d’Etat, celui-ci ensuitte des in… à lui bien connues du Sr E M le C.R. arrête qu’il révoque à dater d’aujourd’hui le dit

mandement du 27 X 182S et l’arrêt du 26 juin 1827 règlant les formalités à suivre pour les propriétaires de vignes pour le débit en détail du vin de leur cru: rétablissant les choses à cet égard comme elles existaient avant le 27 X 1825 : en sorte que ceux qui ont déjà ou qui veulent ouvrir un débit de vin ou de liqueur, n’auront plus d’autres formalités à suivre que de s’annoncer à l’Officier de la Juridiction, afin qu’il soit pris note de leurs noms et qu’ils reçoivent un exemplaire des règlements concernant les cabarets.

La Commision a été … d’accord sur le règlement des cabarets, et les modifications à y apporter touchant l’heure de la fermeture des cabarets: et la peine de la prison civile: elle a puisé les motifs en partie des les raports des Officiers de Judiction: et elle pense qu’il dépend sans contredit du Conseil de modifier un arrêt rendu par lui. Quelqu’uns de ses membres avoient cru d’abord qu’il sufisoit de publier un arrêt modificatif: mais tout considéré, les modifications seroient trop nombreuses pour qu’il ne lui semble pas préférable de publier un nouveau règlement.

Landeron: demandele maintien de l’ordonnance.

Boudry et pour Bevaix: ne croit pas que l’ordonnance ait produit aucun bon effet: et quant à l’heure préféreroit que les buveurs fussent dispercés de 9 à 10: plutôt que réunis dans une seule ou dans un petit nombre d’auberges.Il voudroit donc que chacun pût ouvrir cabaret en en faisant la déclaration en ouverte justice, et en produisant acte de la Commune qu’elle n’y voit pas d’inconvénients.

Thielle: n’est pas pour le report de de l’ordonnance.- On voudroit dans cette juridiction que les auberges ferment à 9 heures.- qu’on ne vende plus de liqueur: qu’il ne fût pas donner de la peine de la prison civile.- Les ordonnances n’ont contribué à réduire que d’un le nombre de cabaret.- voudroit encore que le guet prévint les cabaretiers de l’heure de cloture.

La Côte: voudroit l’ordonnance moins sevère: que les peines fussent 20 puis 40 batz d’amende, puis la défense du débit; et de 8 à 12 batz contre les buveurs: voudroit l’avertissement du guet. Peseux seul aimeroit que pendant l’été les cabarets vendentvin de 9 à 10 h. ( ne parle pas de l’or. de 1825)

Rochefort: on pense que la différence d’heure a été utile: mais on voudroit que les aubergistes vendent vin jusqu’à 11 et les cabarets jusqu’à 10h.

Colombier: L’ordonnance n’y a eu aucun résultat: seroit pour égaliser l’heure: induire pour le rétablissement de la liberté de commerce du vin en détail quant aux villes et villages: mais non dans les maisons écartées: qu’il n’y eut plus de peine que l’amende: que les sujets de l ‘Etat obtiennent quelques préférences sur les étrangers.

Cortaillod: voudroit qu’il n’y ait pas de prison civile: ne voit pas de grands inconvénients à ce que pour l’heure, les cabarets fussent assimilés aux auberges.

Verrières: pour la conservation de l’ordonnance: parce que le nombre des cabarets augmentant leur surveillance deviendroit impossible: que les cabarets écartés deviendroient des lieux de désordre: que le nombre des cabaertiers, c’est à dire de gens fainéants augmenteroit:- voudroit que l’officier ne soit pas tenu à pourvoir à la prison civile, celui qui a vendu vin sans permission, ce qui peut être quelquefois nocessaire: ne pense pas que l’on puisse assimiler les cabarets aux auberges sans rendre difficile l’exercice de la police.

Brévine: l’ordonnance n’a eu aucun résultat: les débits ne purent être empêchés et font beaucoup de mal.- voudroit rétablir la liberté de débit de vin, mias sous l’obligation d’inscription au greffe, et de permission à demander à la justice ou à la Communauté.- voudroit conserver la distinction des leurs.

Gorgier: l’ordonnance a produit peu d’effet: elle a cependant empêché l’ouverture de nouveau cabaret dans de lieux isolés, ce qui est bien. Voudroit distinguer entre
les cabarets de villages qui seroient autorisés sur la simple recommandation de la Commune à l’officier: et ceux des maisons isolées pour lesquels l’ordonnance seroit maintenue.- On réclame plutôt dans la juridiction contre l’heure de clôture des auberges: il seroit donc convenable de la fixer à 9 heures.- mais vu ce qui se fait dans les montagnes, peut-être vaut-il mieux les fermer à 10 heures partout indifféremment.

Vaumarcus: Egaliser l’heure: interdire les petits débits de liqueur.
Travers: voudroit maintenir les peines de prison: la différence des heures: et le mandement aussi. ( ne parle pas de l’ordon. de 1825)

Valangin: voudroit la même heure pour le bas et pour la montagne: pour les cabarets et pour les auberges: et si le réglement est maintenu, prolongation d’une heure pendant l’été.- l’ordonnance n’a pas eu grand effet sur les yvrognes: davantage sur les cabaretiers qui craignent d’être renvoyés.- Si les sujets de l’Etat ont droit devendre vin sans autorisation, il faut rétablir l’ancien ordre de chose: s’ils ne l’ont pas, conseiller les communes: et pour les nouveaux astreindre à demander une autorisation à l’officier.

Locle: croit que l’ordonnance a été utile sous plusieurs raports: mais des gens fort
bien pensants estiment qu’elle portoit atteinte à nos franchises. Mr Nicolet voudroit que l’exécution de l’ordonnance fut confiée aux Communes, sauf recours au Gouvernement: il termine par dire qu’il voudroit peut être mieux qu’elle fut reportée.- Il pense que l’heure doit être la même partout. –

La Sagne: L’ordonnance de 1825 a été déconsidérée par les remontrnaces de la Bourgeoisie de Valengin. Puis on a cherché à l’éluder ev buvant des liqueurs chez les marchands détaillants puis chez les particuliers eux-mêmes. Soit une famille boit là où avant 1825 son chef seul fut allé au cabaret.- Il vaudroit mieux reporter l’ordonnance. Il seroit convenable aussi que les autres communes industrielles jouissent de l’avantage d’heure accordé au Locle et à la Chaux de Fonds. Les cabaretiers devroient consulter la Commune.- détails sur les peines, Mr Challandes voudroit qu’il en fut infligé aux buveurs.

Les Brenets: comme le Locle.

La Chaux de Fonds: Il se boit beaucoup plus d’eau de vie depuis l’ordonnance: elle se boit dans les familles. Il faut reporter l’ordonnance; et égaliser les heures.
Il faudroit plus tard imposer l’eau de vie, et du produit construire une maison pénitencier.

manquent: Neuchâtel, Val de Travers et Lignières.

Lettre de Cosandier de Bôle concernant les danses, 30 mai 1829

Monsieur le Gouverneur et Messieurs du Conseil d ‘Etat

Un arrêt du 19 de ce mois appelle les officiers de juridiction à faire connoître au Gouvernement, en quel nombre chaque année et avec quelle réserve les permissions de danser le Dimanche, ont été accordées dans leur juridiction, en distinguant les cabarets situés dans les villages de ceux qui existent dans des maisons écartées. Je dois commencer par dire qu’il me seroit pas possible d’indiquer avec exactitude le nombre de ces permissions qui a probablement varié d’une année à l’autre, et dont jusqu’ici, les officiers n’ont pas été chargés de tenir note: toutefois je les évalue à huit ou dix annuellement pour Boudry et quatre ou cinq pour Bolle. Dans l’un et l’autre endroit, il n’y a pas de partie de danse, dans une auberge ou un cabaret, qu’elle n’ait été autorisée par une permisssion écrite de ma main, indiquante, si c’est un Dimanche, non seulement l’heure où elle doit finir, mais aussi celle avant laquelle elle ne doit pas commencer, et renferme la condition expresse qu’elle sera surveillée d’un bout à l’autre par un homme d’office qui, pour l’ordinaire est un gendarme ou le grand sauthier de la juridiction. Si la partie de danse a lieu dans un cabaret, il doit être fermé à neuf heures du soir, et je ne crois pas m’être jamais écarté de cette règle. Il n’en est pas ainsi des auberges où selon les circonstances je permets de danser plus tard. Par exemple à l’époque de Silvestre ou du premier jour de l’an, j’autorise les jeunes gens à danser une partie de la nuit. Ceux de Boudry étant très nombreux, il faut nécessairement, pour qu’ils jouissent tous de la même faveur accorder une nouvelle permission à ceux qui n’ont pas pu profiter de la première. Du reste je crois leur rendre justice de dire que depuis un grand nombre d’années, ces sortes de parties de plaisir ont cessé d’être des occasions de scandale et de voyes de fait entre eux. Tout s’y passe gayement et sans désordre; ils savent que s’il en étoit autrement, la première peine que je leur infligerois, seroit de les priver plus ou moins longtemps de ces parties de danses auxquelles ils paroissent tenir beaucoup. ; On peut conclure de ce que je viens de dire, que je ne propose pas d’en diminuer le nombre dans ma juridiction; en le limitant à celui de huit pour Boudry et de quatre pour Bolle, on maintiendroit sans inconvénient l’état de choses actuel auquel, pour ma part, je ne puis pas désirer qu’il soit apporté de changements. Quant aux maisons écartées de la juridiction, il n’y en a point où l’on vendr vin et liqueurs et j’aime à croire qu’on n’y autorisera jamais d’établissement pareil. J’ai l’honneur d’être avec respect.

Bolle le 30 may 1829

Cousandier

Projet d’arrêt pour les officiers de Juridictions concernant les danses dans les auberges et cabarets

Le Conseil d’Etat ayant fait examiner les rapports faits par les officiers des Juridictions, ensuite de l’arrêt du 19 mai dernier, sur la manière en laquelle sont æ cordées les permissions de faire danser dans les auberges et cabarets situés, soit dans l’intérieur des villages, soit dans les lieux écartés, saisissant l’occasion de la promulgation de nouveaux règlements pour la sanctification du dimanche et pour la police des auberges et cabarets, a résolu de donner aux officiers en chef des Juridictions, les directives suivantes, qu’ils devront observer et faire observer, lorsqu’on leur demandera la permission de faire danser, et cela dans le but, d’un côté de diminuer le nombre de œs danses, et de l’autre, de changer insensiblement l’usage qui s’est introduit de danser de préférence dans les auberges et cabarets écartés, plutôt qu’en l’intérieur des villages; en conséquence:

  1. Les officiers en chef feront en sorte que les permissions de faire danser qu’ ils croiront devoir acorder tombent autant que possible sur les mêmes dimanches afin de prévenir par là les trop grands rassemblements et la sucession continue des ces danses.
  2. Ces permissions seront invariablement données par l’Officier en Chef et par écrit, elles spécifieront l’heure de fermeture des auberges et des cabarets, qui pour ceux qui sont écartés devra toujours avoir lieu une heure avant la chûte du jour. Les Officiers en chef feront surveiller ces danses par des gens de confiance porteurs de leurs permissions et autant que possible par des membres de leur Cour de Justice; lorsque l’Officier en chef prévoirait un grand rassemblement, il pourra demander à la direction de la gendarmerie et celle-ci mettra à sa disposition les gendarmes qu’il jugera nécessaire au maintien de l’ordre, le tout au frais du cabaretier.
  3. Ils accorderont de préférence des permissions de faire danser aux cabaretiers dans les maisons desquelles il n’y aura pas eu de désordre précédemment.
  4. Ils tiendront note de ces permissions de manière à pouvoir en faire rapport au Conseil lorsqu’il leur sera demandé.

29 décembre 1829